Les délais liés à l’intégration de Fiducie AGF ont indisposé plusieurs conseillers traitant avec B2B Banque. L’intégration sera complétée d’ici la fin d’octobre, et le PDG de B2B, François Desjardins, croit que l’image de son entreprise se trouve renforcée à la suite de cet exercice même si son niveau de service s’en est ressenti, a-t-il confié en entrevue stratégique au Journal de l’assurance.Dans sa stratégie de croissance, François Desjardins a misé sur les acquisitions plutôt que sur la croissance organique. En trois ans, le PDG de B2B Banque et vice-président exécutif de la Banque Laurentienne a réalisé des acquisitions qui ont fait passer le nombre de ses clients conseillers de quelque 7 000 avant 2011 à 27 000 aujourd’hui.

La banque dédiée aux conseillers a acquis Fiducie AGF au cout de 242 millions de dollars (M$).Cette transaction lui fait acquérir un réseau potentiel de 4 000 conseillers et un important volume de dépôts et de prêts. Elle avait acquis, en 2011, M.R.S. au cout de 165 M$, gagnant un potentiel de 14 000 conseillers et un volume en compte autogérés, domaine où elle était jusqu’alors peu présente. Ces transactions et d’autres plus petites ont permis à l’organisation de faire passer le volume de ses prêts de 1 milliard de dollars (G$) en 2004 à 8,5 G$ à la fin de 2013, et celui de ses dépôts, d’environ 2 G$ à 13 G$, pour la même période.

L’intégration de Fiducie AGF sera finalement terminée en octobre, mais des détails demeurent en suspens. Ce sera le cas des processus manuels instaurés durant la transition pour pallier certaines modifications des systèmes. « Nous devrons aussi amener plus loin des processus qui ne sont pas nécessairement là où on voudrait qu’ils soient », explique M. Desjardins.

 

Le prix à payer pour fusionner 3 compagnies en 1

 

Or, la taille de Fiducie AGF et son acquisition pendant l’intégration de M.R.S. ont créé un goulot d’étranglement. « Gérer un processus d’intégration complet peut prendre de 12 à 18 mois », dit M. Desjardins. Dans le cas de Fiducie AGF, le compteur tourne depuis plus de deux ans. C’est le prix à payer pour amener trois compagnies en une », dit-il.

Parmi les défis posés par l’intégration, le PDG de B2B Banque cite le choix des produits à conserver, les changements administratifs et le fait que les employés et les conseillers puissent migrer dans un sens ou dans l’autre. « Nous avons acquis Fiducie AGF au début de l’intégration de M.R.S. C’était le moment où nous devions faire le choix des produits à offrir et des processus à adopter, ainsi que le moment où les employés migreraient d’une façon ou d’une autre. Il fallait aussi retourner sur le marché pour faire connaitre à nouveau nos produits auprès de nos clients. »

Le processus a pesé lourdement sur les activités courantes de la banque. « Durant la phase d’intégration, nous devions prendre en main les clients actuels de l’acquéreur et de l’acquis. Plusieurs changements administratifs sont survenus et surviennent encore en ce qui concerne les comptes, les systèmes et les processus. Les équipes de soutien au téléphone doivent faire plus de service à la clientèle que de vente pure », dit M. Desjardins.

Certains grincements de dents se sont fait entendre chez les conseillers, et M. Desjardins dit le comprendre. « Une intégration est un moment difficile à passer pour tous, a-t-il rappelé. Des conseillers indépendants qui avaient choisi l’autre organisation n’aiment pas se faire dire du jour au lendemain que seul le détergent à lessive Tide sera désormais offert et non plus celui de Sunlight », a-t-il lancé.

Les réactions peuvent varier, a observé M. Desjardins. « Les conseillers indépendants sont rémunérés à la commission. Ils peuvent percevoir un travail administratif qui leur prend du temps sans leur rapporter de revenus comme une tâche qu’ils préfèreraient ne pas avoir à faire. D’autres conseillers m’ont dit que ces tâches leur donnent l’occasion de rencontrer des clients. »

M. Desjardins a aussi relaté la difficulté de regrouper les employés de trois organisations différentes en un seul groupe, chose faite depuis janvier 2014. Chacun doit apprendre de l’autre, explique-t-il. Un employé peut servir à un conseiller, sans le savoir, une réponse déjà dépassée.

« Il faut former à nouveau les employés et les conseillers, car les processus ont changé. D’un autre côté, le conseiller qui a reçu une mauvaise réponse peut penser que toute l’expérience sera négative alors que ce n’est pas le cas. »

Par contre, l’image de B2B Banque est ressortie grandie de cette période tumultueuse, soutient M. Desjardins. Il appuie ses dires sur de récents sondages auprès des clients.

« Avons-nous actuellement le même niveau de service qu’avant? Non, il est un peu plus faible, mais l’image de la compagnie a grandi à travers cela grâce à notre croissance. Nous tâchons maintenant de rebâtir la confiance et de continuer à offrir des produits qui sont meilleurs qu’ils ne l’étaient. Nous investissons dans nos processus pour les rendre plus efficaces et pour réduire la charge administrative liée à nos produits », dit-il.

Le PDG de B2B Banque dit mettre résolument l’accent, pour 2015, sur les ventes futures, sur le service et sur le soutien aux conseillers dans le développement de leurs affaires. « Je dors bien la nuit. Cette perspective m’enchante beaucoup plus que seulement faire des intégrations. »

« Toujours en business »


M. Desjardins ajoute que B2B Banque s’est montrée résiliente depuis la crise. Alors que des joueurs se retiraient des produits de crédit, notamment en durcissant leurs critères, les produits de B2B sont demeurés intacts.

 

« Notre message est que nous sommes encore en business. Depuis la récession de 2009, 30 prêteurs se sont retirés du marché canadien, rappelle le PDG de B2B Banque. C’est le cas de FirstLine (Banque CIBC) qui détenait, environ 18 % du marché du courtage de prêts hypothécaires. Dans cette période, au cours de laquelle l’offre rétrécissait, nous avons fait de la croissance. Nous avons bâti de meilleurs produits et des relations clients. Nous avons converti nos 35 000 produits de comptes d’investissement vers les 300 000 de M.R.S, qu’on juge meilleurs. »

L’acquisition d’AGF a, en outre, octroyé à B2B un actif de 3 G$ en prêts leviers et hypothécaires. « Elle nous a permis de lancer une gamme de prêts hypothécaires alternatifs qui ont fait des trois derniers les meilleurs de notre histoire », dit M. Desjardins. Ces produits non traditionnels s’adressent aux consommateurs touchés par le resserrement du financement hypothécaire.

« Certains consommateurs, qui pouvaient autrefois obtenir une hypothèque non assurée couvrant jusqu’à 80 % de la valeur de leur maison, n’obtiennent plus que 65 %, dans certains cas. Il s’agit de consommateurs qui ne cadrent pas dans le moule familial que les banques aiment bien voir, a expliqué M. Desjardins. Il peut s’agir, par exemple, d’un travailleur autonome dont la demeure sert en partie à un usage commercial. Nos produits pourront leur permettre d’obtenir jusqu’à 80 %. »

 

Ventes croisées et hausse des revenus

 

Dans sa recherche d’efficacité, B2B souhaite aussi permettre aux conseillers de réaliser autant de ventes croisées qu’ils le veulent, et ainsi accroitre leurs revenus, a dit son PDG. « Ce n’est pas nécessairement de vendre un produit de plus au client. Il s’agit plutôt d’amener chaque conseiller à se voir comme l’expert financier de son client parce qu’il est en mesure de lui offrir tous les produits. »

M. Desjardins croit que la vente croisée peut permettre d’amener à niveau certains produits d’épargne qui ne sont pas encore arrivés au degré de maturité que l’on croit. « La majorité des Canadiens ne cotisent pas à leur REER à hauteur de ce qu’ils devraient. Leur conseiller peut, par exemple, leur faire réaliser qu’emprunter pour investir est excessivement intéressant dans un moment où les taux d’intérêts sont bas. »

Il rappelle que B2B Banque offre ce produit depuis sa création en 2000. Depuis, elle a signé une soixantaine d’ententes interentreprises avec 33 entreprises, telles Placements Manuvie et Transamerica Vie Canada. Ces ententes visent la distribution aux conseillers de prêts pour l’acquisition de fonds communs, de prêts pour l’acquisition de fonds distincts ou de prêts REER, parfois les trois, comme c’était le cas avec Standard Life Canada, depuis acquise par la Financière Manuvie.

La banque offre également aux conseillers des comptes d’investissement et d’épargne à intérêt élevé, des comptes d’investissement autogérés, des certificats de placement garanti, des marges de crédit non garanties et une large gamme de produits hypothécaires.