La proposition de l’Association des syndicats de copropriété du Québec (ASCQ) de créer une régie de la copropriété pour régler les conflits entre administrateurs de condos et assureurs reçoit un accueil tiède.
La Régie de la copropriété que propose de créer l’ASCQ est inspirée de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ). Elle serait ainsi financée par les copropriétaires eux-mêmes, tout comme les automobilistes paient pour la SAAQ. En cas de conflits entre assureurs et syndicats, cette régie pourrait nommer des médiateurs.
Son président Michel Charlebois a aussi proposé de mettre en place un Groupement des assureurs, semblable à celui qui existe pour l’assurance automobile, si jamais ces conflits venaient à s’aggraver.
Me Yves Joli-Cœur, spécialiste du droit de la copropriété et secrétaire général du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires, ne croit pas du tout que la création d’une Régie de la copropriété ou d’un groupement d’assureurs sous le modèle de la SAAQ soit envisageable. Il soulève notamment les couts reliés à une telle opération, qui ne pourraient pas être seulement financés par les copropriétaires.
Me Joli-Cœur, qui fait partie du Comité consultatif sur la copropriété, considère qu’en ce qui a trait à la couverture, comparer la copropriété avec l’automobile équivaut à comparer des pommes avec des oranges. « Les risques ne s’évaluent pas aussi facilement pour les condos que pour les véhicules. Pour les immeubles, l’écart des niveaux et types de risques est significatif. »
La responsable des affaires publiques du Bureau de l’assurance du Canada, Anne Morin, envoie le même son de cloche. « Quand on considère les problématiques soulevées, c’est peut-être un peu exagéré comme solution. Lorsque le Groupement des assureurs automobiles (GAA) a été créé, il avait de multiples mandats, pas seulement le règlement des conflits. »
Selon elle, les solutions proposées semblent disproportionnées par rapport au problème de base. « L’ASCQ parle peut-être d’une vingtaine de cas dans les vingt dernières années. Pour nous, ce n’est pas une situation de crise qui justifie la création d’un organisme de l’ordre de la SAAQ ou du GAA », dit-elle.
En entrevue à FlashFinance.ca, une publication-sœur du Journal de l’assurance, M. Charlebois, président de l’ASCQ, avait convenu que, dans le moment, les conflits qui aboutissent sur son bureau se règlent à l’amiable. Néanmoins, il dit croire que si le gouvernement, et ensuite les assureurs, offraient un meilleur encadrement, c’est tout le domaine de la copropriété qui en bénéficierait. « Les immeubles à condos seraient ainsi mieux entretenus », dit-il.
Tant Me Joli-Cœur que Mme Morin croient qu’il existe plusieurs solutions possibles avant d’en arriver à certaines propositions de l’ASCQ. « On ne voit pas trop en quoi la création de ces organismes va régler des problèmes qui, à notre avis, sont de base. Notamment la gestion de risques, la révision du Code civil du Québec pour avoir un encadrement révisé, l’uniformisation de la déclaration de copropriété, etc. », dit Mme Morin. Dans son mémoire déposé en mai dernier lors de la consultation publique sur ce sujet, le BAC avait de mettre en place un « registre des travaux » et un « carnet d’entretien ». Le président de l’ASCQ, Michel Charlebois, se dit lui aussi en faveur d’un meilleur suivi de l’entretien des immeubles, mais croit que les assureurs ont aussi leur part de responsabilité dans la création de balises plus claires.
Me Joli-Cœur croit aussi qu’il faut avant tout prioriser la modification du cadre législatif actuel avant tout. Toutefois, l’idée d’avoir des médiateurs dédiés à la question de la copropriété, telle que proposée par l’ASCQ, n’est pas complètement illogique selon lui.
« Je ne serais pas contre l’idée d’avoir un tribunal spécialisé en matière de copropriété. En France par exemple, il y a des juges dédiés à la question ».