La venue de Serge Lavoie et de Ron Pavelack chez Echelon a suscité de grandes attentes chez les courtiers du Québec. Ils les ont fait patienter le temps de restructurer l’entreprise. Ils se disent maintenant prêts à ouvrir la machine.
Le Québec occupera une grande part dans la croissance d’Echelon, ont affirmé MM. Lavoie et Pavelack, respectivement PDG et vice-président principal Québec de l’entreprise, en entrevue au Journal de l’assurance, lors d’une rencontre dans leurs bureaux de Laval. Echelon a été longtemps réputé comme un spécialiste de l’assurance non standard. La grande partie du volume de l’assureur se trouvait d’ailleurs dans le marché non standard de l’automobile en Ontario.
Le modèle est en train de changer. M. Lavoie indique qu’il veut offrir une grande étendue de produits aux courtiers pour justement soutenir le réseau de courtage. Devenir une compagnie qui est aussi active dans le marché régulier lui permet aussi de développer de nouvelles gammes de produits, notamment en assurance des entreprises, comme le cautionnement ou encore le camionnage.
L’assurance des entreprises prendra une plus grande place chez Echelon, dit M. Pavelack. Echelon souhaite ainsi se développer de nouveaux marchés dans ceux auxquels elle n’était pas présente auparavant.
Même si elle n’en est qu’à ses débuts, la stratégie rapporte, du moins au Québec. Il y a trois ans, le volume de l’assureur y était de 12 millions de dollars (M$). Il a triplé pour avoisiner aujourd’hui les 37 M$.
Système technologique presque à point
Un des éléments qui a ralenti Echelon dans sa stratégie était que ces systèmes technologiques pour servir les courtiers n’étaient pas au gout du jour. Ce n’est plus le cas, assure M. Lavoie. Il affirme qu’Echelon sera en mesure d’offrir des fonctionnalités plus intéressantes aux courtiers que ce qu’offrent certains grands assureurs. À titre d’exemple, Echelon est sur le point d’offrir une transaction en assurance des particuliers entièrement automatisée, qui partira du système de gestion de courtage (BMS) et qui s’y terminera.
« On représentera un marché additionnel pas mal plus intéressant pour les courtiers. Nous avons réalisé de grandes avancées par rapport où nous étions il y a six mois ou il y a encore douze mois », dit M. Lavoie.
Le PDG d’Echelon précise une chose. Il ne vise pas à devenir un joueur de premier plan dans le marché. Par analogie, il compare son modèle à celui de Couche-Tard. « Nous ne sommes pas un concurrent direct à une épicerie, mais bien un marché alternatif, comme le fait un dépanneur. Le courtier ne peut plus faire affaire avec deux ou trois grands assureurs seulement. On se positionne pour compléter son besoin. Le petit courtier qui a un marché majeur, nous sommes là pour lui. »
M. Pavelack précise qu’Echelon considère les catégories de risque que les autres joueurs refusent d’assurer. Le tout doit toutefois être attrayant pour l’assureur, stipule-t-il. « C’est de cette façon qu’on va se démarquer. On veut voir ce que les courtiers ont à nous offrir. »
Se positionner comme assureur aux entreprises va aussi dans cette veine, ajoute M. Lavoie. « Nous voulons offrir un marché aux petits et moyens courtiers qui ont besoin d’outils additionnels pour se battre dans le marché. Ils ont besoin d’alternatives s’ils veulent demeurer indépendants. Selon nous, il est plus prometteur d’avoir une croissance en présentant une diversité de produits. Le courtier voit ainsi davantage d’incitatifs à utiliser notre compagnie. »
L’assureur a toutefois dû partir de zéro pour bâtir son offre d’assurance aux entreprises au Québec, n’y ayant encore écrit aucun risque il y a encore trois ans. Des équipes ont ainsi été créées dans divers segments, notamment dans le cautionnement et dans le camionnage. « Nous avons bâti une nouvelle compagnie », image M. Pavelack.
52 M $ de pertes en 3 ans en Europe
Les deux hommes indiquent que cette parenthèse nécessaire n’a pas couté d’occasions à l’entreprise. « Un de nos grands défis a été de changer les perceptions et l’image qui nous était associée. Il fallait faire comprendre que nous sommes maintenant un marché régulier. Au début, les courtiers nous envoyaient des risques dont personne ne voulait. C’était normal, avec un historique de produits non standards, mais ça s’est régularisé maintenant », dit M. Pavelack.
Echelon fonde aussi de grands espoirs sur l’expérience qu’il acquiert par le biais d’ICPEI, un assureur qu’il possède, et qui compte près de 30 M$ sur le marché de l’Île-du-Prince-Édouard. « Echelon profite de l’expérience d’ICPEI qui s’est fait une niche dans son marché. ICPEI est un assureur qui ne prend pas toute la place dans son marché et qui réussit très bien, avec une offre alternative, à occuper une part de marché enviable auprès des courtiers indépendants. Ils sont orientés vers le courtier. C’est le même modèle qu’Echelon met de l’avant »
Répétition de Jevco
Il y a un autre modèle que M. Lavoie entend recréer, soit celui de Jevco, une compagnie d’assurance qu’il a dirigée jusqu’à ce qu’elle se fasse acheter par Intact Corporation financière. « Je reprends chez Echelon les mêmes stratégies et segments de marchés visés que j’avais mis en place lorsque j’étais président de Jevco en 2012. J’ai recruté certaines des équipes de gestion avec qui je travaillais à l’époque, notamment en cautionnement, en auto des entreprises et en camionnage. Cette équipe avait développé une belle part de marché à l’époque, marché pour lequel une compagnie comme Echelon a sa place aujourd’hui. »
M. Pavelack ajoute que cette croissance se fait sans nécessairement recourir à des transferts de volumes. « Il y a beaucoup de cabinets qui développent de l’interne. Ils aiment ce qu’ils voient chez nous. Ils veulent nous soutenir. »
Quant à la forte présence d’Intact dans le marché du courtage québécois, les deux hommes ne la voient pas comme une menace, mais comme une opportunité. « Notre taille fait de nous le partenaire idéal pour supporter les courtiers indépendants. Par ailleurs, nous ne sommes pas un assureur qui fait directement concurrence aux courtiers comme L’Unique avec La Capitale, Economical avec Sonnet ou encore Aviva avec son Aviva direct. Nous sommes totalement centrés sur les courtiers indépendants », dit M. Lavoie.
M. Pavelack ajoute par ailleurs qu’avoir un président québécois l’aide dans son démarchage. « Avoir une structure décisionnelle au Québec, y compris un président québécois, aide dans le développement au Québec. Nous ne sommes pas un assureur où tout est géré de Toronto. La majorité des stratégies touchant le Québec sont développées localement. »
Echelon sera aussi un acheteur dans le marché, que ce soit pour des assureurs ou des cabinets, et ce, partout au Canada. Étant une compagnie publique, l’accès aux capitaux s’en trouve facilité, dit M. Lavoie.
Se sent-il plus à l’abri d’un scénario à la Jevco, où la compagnie a été vendue sans qu’il ait son mot à dire ? « Aucune compagnie publique n’est à l’abri d’une acquisition forcée, pas même les plus gros joueurs de l’industrie. Nos actionnaires principaux nous soutiennent dans notre modèle d’affaires », dit le PDG.