Mise sur la tablette par les gros assureurs, la proposition d’assurance de personnes électronique s’impose de plus en plus… sous l’impulsion des petits joueurs de niche.
Assomption Vie s’est installée sur ce terrain, il y a déjà depuis plus de cinq ans, alors qu’Équitable Vie y est apparue tout juste avant la fête du Travail. Arrivé entre les deux, Humania Assurances a fait le saut en juillet.
Cet assureur se plait sur les avenues sans grand trafic, voire dans le « vide markéting », a confié en entrevue au Journal de l’assurance son vice-président, ventes et markéting de l’assureur de Saint-Hyacinthe, Stéphane Rochon. Les polices d’assurance vie ou de prestations du vivant accessibles à partir d’une proposition électronique s’inscrivent dans ces marchés peu achalandés qu’Humania veut occuper. « Nous nous montrerons très agressifs dans le marché simplifié », a-t-il annoncé.

Les écueils qui ont fait reculer les grands assureurs (format des données et signature électronique, par exemple) n’ont pas gêné ces petits joueurs qui ont lancé leurs propres solutions, sans chercher à créer une norme à l’échelle de l’industrie canadienne. Leurs produits sont tout de même accessibles à travers le Canada.

L’avantage de la rapidité

Le système sur lequel repose Assurance sans examen médical permet au représentant de passer à l’ère que M. Rochon qualifie de « conseiller 2.0 », soit le conseiller qui accepte de faire des affaires par l’entremise d’Internet.

Selon M. Rochon, la rapidité figure parmi les avantages du conseiller à transiger avec Internet. Comme chez les autres joueurs de niche présents dans ce marché, les délais d’émission se trouvent sensiblement raccourcis. Humania expédie sa police au client par la poste dans les 24 à 72 heures qui suivent. « C’est très différent de l’ancien processus, qui prenait entre 14 et 20 jours », témoigne-t-il. Humania émet la police à minuit, le jour de la proposition.

Meilleure conformité

Un deuxième avantage pourrait aussi attirer le conseiller à passer à l’ère Internet, soit la conformité inhérente à cette méthode de transaction. Pour le conseiller, il s’agit d’un processus sans papier qui va de pair avec les exigences de conformité d’aujourd’hui, ajoute M. Rochon. « Il y a des étapes à respecter et une série d’autorisations à obtenir. Tout doit être authentifié par le client, qui répondra à des questions à chaque étape, et ses réponses seront ensuite consignées en ligne. »

La proposition électronique est aussi plus robuste. Bien des choses possibles avec la proposition papier deviennent impossibles avec la proposition électronique, dit-il, comme les retours en arrière ou les modifications après coup.

Un tel produit vise en outre à donner le change aux banques, qui dominent actuellement l’offre d’assurance par Internet. Permettre l’accès du produit Internet au public vise ainsi une clientèle « qui a l’habitude d’acheter en ligne, dit M. Rochon, notamment dans sa relation avec les banques et les assurances ».

Assurance sans examen médical suscite majoritairement des réactions positives chez les conseillers. Après seulement un mois d’activité, le site reçoit déjà beaucoup de demandes d’assurance. « 20 % de mes courtiers, surtout dans la strate des 60 ans et plus sans ordinateur, me disent que nous faisons fausse route, mais 80 % sont enthousiasmés par l’efficacité d’exécution. L’assurance voyage et de dommages transigent de cette façon depuis des années. Nous pouvons aussi le faire, car le produit est simple », dit M. Rochon.

Vide markéting

Conformément à sa philosophie, l’assureur cible avec ce produit un marché presque désert : celui de l’assurance refus. Entre le 2 juillet, date d’ouverture du site, et le 30 juillet, soit une période de 28 jours, Humania dit avoir reçu plus de 9 500 visites, dont 6 800 visiteurs uniques. « Le nombre de pages visitées durant la période a dépassé 29 000 et la durée moyenne des visites excède 3 minutes par visite, ce qui est considéré comme excellent pour le Web », dit M. Rochon.

Il se dit prudent en termes d’objectifs de vente d’Assurance sans examen médical, mais affirme connaitre des débuts fort encourageants. « Dans les 30 jours du lancement, 150 courtiers uniques ont transigé avec le nouveau système qui, de son côté, a émis 200 polices », a révélé M. Rochon. Il croit pouvoir engranger au moins 2 millions de dollars de primes la première année.

Le produit cible les clients qui éprouvent des difficultés à souscrire une des trois couvertures offertes : vie, invalidité et maladies graves. « C’est une innovation pour combattre les refus. Vous répondez oui à deux questions, non à quatre autres et vous êtes automatiquement couvert », dit M. Rochon. Les autres questions, dont l’issue négative mènerait à un refus ailleurs, déboucheront tout de même sur une acceptation au sein du produit simplifié d’Humania, « même si ce ne sera pas à prix d’aubaine », dit-il.

Un homme de 32 ans non-fumeur affecté de plusieurs troubles ou limitations, mais ayant répondu favorablement aux questions de base, pourraient décrocher une protection d’assurance maladies graves de 50 000 $ pour un peu plus de 66 $ par mois. Un client qui répond favorablement aux autres questions aura une prime plus agressive. Il peut toutefois trouver moins cher du côté d’un produit traditionnel. « Le conseiller peut l’offrir à un client en santé, dit M. Rochon, mais ce produit s’adresse fondamentalement à ceux qui ont de la difficulté à s’assurer. »

L’assureur peut offrir ce produit à bas prix parce qu’il évite la double entrée des données. « Nous n’avons pas à affecter un préposé à l’entrée des données reçues sur papier. La structure du produit engendre des gains d’efficacité pour le courtier, son cabinet et nous. On peut facilement considérer que ce système nous permet d’engendrer un cout marginal d’économie de 200 $ », a révélé M. Rochon. Par Internet, ce cout est coupé au moins de moitié.

Le cout de développement de la plateforme Internet annule pour l’instant cette économie, mais celle-ci fera bientôt connaitre des gains nets à l’assureur, dit M. Rochon. Autre avantage, la plateforme existe déjà et permet d’intégrer de nouveaux produits avec un minimum de modifications.