Autant pour les conseillers que pour leurs clients, la fidélité auprès d’un assureur peut s’avérer avantageuse au moment du renouvellement des régimes d’assurance collective. Un élément qui entre en ligne de compte lors de la négociation.
Le marché de l’assurance collective est ultra concurrentiel, surtout depuis ces dernières années où les hausses de primes ont poussé nombre de preneurs de régime à aller voir si l’herbe n’était pas plus verte dans la cour du voisin.
Conseiller principal, assurance collective chez Mercer, Alain Robillard constate que malheureusement bien des preneurs vont au marché plus souvent qu’ils ne devraient. Pour lui, y aller tous les trois à cinq ans serait amplement suffisant. « Mais souvent le client veut que l’on trouve mieux que la proposition que l’assureur fait lors du renouvellement », justifie M. Robillard.
Fuir l’assureur dès que le taux de renouvellement ne convient pas est une erreur, soutient M. Robillard. En effet, s’il en croit son expérience, un assureur se montrera plus souple en matière de négociation si le client est avec lui depuis plusieurs années. « Quand on a une bonne relation avec un assureur, il est parfois possible de s’arranger pour ne pas avoir de hausses si l’année a été difficile pour le preneur », soutient M. Robillard.
Un fait que corrobore Marc Carrier, vice-président tarification chez Desjardins Sécurité financière (DSF). M. Carrier reconnaît que cette pratique existe et qu’elle est effectivement mise en application lorsqu’un preneur de régime qui est en affaires avec DSF depuis plusieurs années éprouve certaines difficultés ponctuelles.
L’assureur fait aussi des exceptions lorsque des conseillers, qui ont un portefeuille sain, en font la demande. « Si on a une relation à long terme avec un conseiller et que son portefeuille est sain, on va en tenir compte s’il a besoin de souffler une année », explique-t-il.
Pour Michel Cyr, président du Regroupement des cabinets en avantages sociaux du Québec (RCASQ), rien de tel que la fidélité pour pouvoir obtenir de meilleurs taux à long terme. « Ça permet de mieux projeter les coûts ».
L’appât du gain l’emporte pourtant encore souvent sur la fidélité. On a beau entendre depuis des années que d’aller au marché trop souvent nuit au dossier du preneur de régime, que les primes à rabais ne sont qu’un leurre pour attirer les clients, le maraudage continue d’aller bon train.
Depuis deux ans, les assureurs ne sont plus les seuls à se livrer bataille. Clément St-Laurent vice-président principal, Réseau des ventes du Québec pour le Groupe financier AGA inc, a constaté que les conseillers en font désormais autant. Il a effectivement remarqué que certains de ses clients se sont fait approcher par des confrères qui leur proposaient des taux défiants toute concurrence. « Dans ces cas-là, j’explique à mes clients qu’aller au marché ne leur apportera rien puisque l’année d’après ils se retrouveront à payer une prime faramineuse », défend-il. Certains plongent, d’autres pas.
Il y aurait selon M. Cyr, quelque 500 ou 600 millions de dollars de primes qui se baladeraient ainsi d’une compagnie à l’autre. Il déplore du reste que les compagnies continuent de coter à perte. « Quand une compagnie baisse la prime de 25%, elle va juste chercher le client. J’ai vraiment de la difficulté avec ce concept-là », lance-t-il.
D’ailleurs, M. Cyr a été confronté à ces surenchères avec l’un de ces groupes où il y a avait deux invalidités. En allant au marché, un assureur a proposé à son client une baisse de prime de 25 %. Michel Cyr a conseillé à son client de demeurer avec son assureur actuel, lequel a revu la prime à la baisse. « Je reconnais que parfois ça a du bon car au lieu d’avoir une hausse de 17%, mon client s’en est tiré avec une augmentation de 9% », constate-t-il
« Il est dangereux d’aller au marché uniquement pour des fins financières », prévient Alain Robillard. En bout de ligne, au prochain renouvellement, le preneur de régime risque de se retrouver avec des hausses très importantes. La raison est simple, explique-t-il, les assureurs prennent en compte les mêmes paramètres pour établir une prime. « La tarification est la même d’un assureur à l’autre, la consommation du groupe sera la même peu importe l’assureur et idem pour les réclamations. La seule différence ce sont les frais administratifs et la qualité du service », souligne. M. Robillard.
Pour DSF, il ne s’agit pas de maraudage ou de cotation à perte. M. Carrier voit plutôt le fait d’offrir des primes plus basses pour attirer le client comme un investissement. « Plutôt que de couper les primes, nous donnons des rabais. C’est un investissement, on avance de l’argent pour avoir un rendement », indique-t-il.
Les conseillers doivent être prêts
Pour que les éléments avancés lors de la négociation avec l’assureur soient entendus, M. Carrier recommande aux conseillers de bien étayer leur argumentation et de s’appuyer sur des faits tangibles.
Les conseillers sont encore trop nombreux à arriver à la dernière minute en refusant la hausse « parce que c’est trop cher », reproche M. Carrier.
Le conseil qu’il leur donne est de suivre les dossiers de leurs clients toute l’année. « Nous travaillons avec des tarificateurs et nous aimons négocier avec des gens qui ont un argumentaire logique », soutient Marc Carrier. Autrement, plaisante-t-il, il y a une sélection naturelle des conseillers qui se fait et seuls ceux qui rencontrent les critères de l’assureur restent.