Le Mouvement Desjardins avait été avant-gardiste en lançant son premier site Internet en 1991. Le mouvement coopératif a toutefois réalisé plusieurs avancées technologiques depuis, au fil des changements de comportements de ses membres.

Lors de la Journée de l’assurance de dommages 2016, Mathieu Staniulis, directeur principal du programme d’évolution des services aux particuliers du Mouvement Desjardins, a fait le survol de la progression de Desjardins en matière technologique. Il l’a aussi mise en contexte quant au positionnement futur du mouvement coopératif.

Il a rappelé qu’il y a 25 ans, 30 % des transactions du Mouvement étaient faites par des chèques, comparativement à 2 % en 2014. Quelque 35 % des interventions étaient faites dans les points de service du réseau, mais seulement 3 % en 2014. De plus, 22 % des transactions passaient par les guichets automatiques en 1991, mais seulement 9 % en 2014. Enfin, 11 % des transactions se passaient de manière automatique, par dépôts ou retraits préautorisés, comparativement à 18 % en 2014.

En 2014, ces modes transactionnels ont été remplacés par le téléphone mobile (11 %), les cartes de débit et de crédit (de 2 % à 27 % durant la même période) et le service AccèsD, utilisable par n’importe quelle plateforme (28 %). On comprend mieux pourquoi l’institution financière doit revoir le déploiement de ses centres de services financiers.

« On pense que d’ici deux ans, nous aurons plus de transactions par l’entremise du téléphone mobile que tous les autres canaux réunis. C’est vraiment une transformation importante dans notre industrie », indique-t-il.

Mathieu Staniulis rappelle que, dans la structure hiérarchique propre au Mouvement Desjardins, ce sont les membres qui sont les vrais patrons, de même que les employés. Pour chacun de ces deux groupes, il propose deux recettes pour mieux les servir et leur faciliter la vie. La première recette est la création conjointe avec les membres et les clients.

Historiquement, les entreprises modifiaient leur approche client en menant des consultations minimales auprès des consommateurs. Aujourd’hui, les couts d’implantation des technologies sont moindres, et on peut tenir une véritable consultation de la clientèle et obtenir des réactions en temps réel, dit-il.

Son équipe a travaillé à l’évolution du service AccèsD sur le Web et le mobile. Quelque 980 personnes ont été impliquées dans la mise à jour du service. Desjardins Lab, qui a été créé en 2011, a pignon sur rue dans des locaux situés au rez-de-chaussée du complexe à Montréal depuis novembre 2015.

Grâce à la technique de l’oculométrie, on peut voir où les utilisateurs regardent quand ils naviguent dans le site Internet. En lançant une nouvelle version du site desjardins.com en 2013, les collègues du markéting avaient très hâte d’utiliser la vitrine commerciale du site. « Ça semblait bien fonctionner au début, mais on a vite constaté une certaine fatigue des utilisateurs », raconte-t-il.

« Pour le vérifier au laboratoire, on a créé une fausse nouvelle qui disait : “ Faillite chez Desjardins : aucun membre remboursé”. C’était assez dramatique. » Grâce au laboratoire d’oculométrie, on a pu constater que les utilisateurs regardaient partout, sauf la section de la vitrine commerciale. Personne n’avait remarqué la fausse manchette.

Deuxième recette : une nouveauté tous les mois, ou presque. Mathieu Staniulis énumère les grands changements apportés depuis l’ouverture du site Internet en 1991. En 2015, la nouvelle version d’AccèsD sur le Web et le mobile a été lancée, et la montre intelligente est aussi désormais utilisable sur la plateforme. Enfin, depuis janvier 2016, le dépôt mobile grâce à la photo d’un chèque est en fonction. Et la vitesse des nouveautés technologiques ira toujours en s’accentuant.

Le deuxième patron chez Desjardins, ce sont les employés. Écouter les employés est la troisième recette proposée par Mathieu Staniulis. Chaque année depuis cinq ans, son équipe se demandait que faire pour autoriser le dépôt mobile, avec une photo du chèque. Comme le paiement par chèque n’est pas « la méthode du futur », Desjardins s’est demandé s’il valait de peine de consentir autant d’efforts pour numériser une opération qui est vouée à disparaitre.

Chaque année en consultant les employés du centre d’appels d’AccèsD, il y avait toujours au moins une personne qui rapportait des demandes de la clientèle à ce sujet. Quand on a constaté que les pressions des consommateurs étaient aussi exprimées en succursale et dans les autres points de service, la décision a été prise d’aller de l’avant. « Si on avait un peu moins réfléchi dans nos tours de bureaux, et écouté un peu plus ce que nous disaient nos employés, on aurait agi plus vite », dit-il.

Innover à bas prix

Enfin, la quatrième recette proposée par Mathieu Staniulis est l’innovation à faible cout. En cette ère numérique, les gens pensent de manière erronée que le moindre projet est très long et couteux à implanter, mais c’est faux, insiste-t-il. On a fait un virage en mode agilité chez Desjardins, afin de mettre à jour toutes les applications. Dans les institutions financières, on a souvent tendance à dépenser de grosses sommes pour de gros projets, en pensant qu’il faut tout changer d’un coup, note-t-il.

Desjardins a pu prouver son agilité lors du lancement de l’Apple Watch en avril 2015. « Nous étions l’une des 20 premières applications à être offertes sur l’Apple Watch, et nous avons été invités au lancement du produit en Californie. Ça a été fort plaisant de voir le logo de Desjardins lorsque Tim Cook, PDG d’Apple, expliquait le fonctionnement du produit », relate-t-il.

Il a fallu trois semaines à deux programmeurs pour réaliser l’application. La première version était loin d’être parfaite, mais elle est régulièrement mise à jour en fonction des commentaires des utilisateurs, qui sont encore assez peu nombreux malgré la relative popularité de la montre.

Les besoins de la clientèle évoluent et les institutions financières n’ont pas le choix de suivre, ajoute M. Staniulis lors des échanges. Les gens utilisent de plus en plus le centre d’appels en mode assistance, au lieu de se déplacer en succursale. La tendance de l’utilisation du numérique a commencé depuis un bon moment dans les opérations courantes, mais on la sent poindre aussi pour les produits reliés à l’épargne et au placement. Cela finira par survenir aussi pour les produits hypothécaires, estime-t-il.