Le virage numérique que prennent plusieurs assureurs rapporte-t-il. Ça semble être le cas chez Intact Corporation financière, qui y a triplé ses ventes. L’assureur précise toutefois que cette hausse est comparable à celle enregistrée dans d’autres secteurs d’activités.

Les participants à la récente Journée de l’assurance de dommages ont eu la chance d’avoir un regard unique sur les travaux menés dans l’Intact Lab, d’Intact Corporation financière. L’équipe que dirige Imen Zitouni, vice-présidente à l’innovation numérique et à la R&D chez Intact Corporation financière, est formée des experts en innovation, dont la mission est d’offrir aux clients de l’assureur une expérience numérique exceptionnelle, dit-elle.

Sa famille est très active en hôtellerie et en restauration. Servir ce que le client a commandé, c’est le minimum, dit-elle. « Qu’est-ce qu’il faut faire pour que le client trouve le service exceptionnel ? Pas en faisant ce qu’il s’attend qu’on fasse en temps normal. C’est en dépassant ses attentes. »

Chez Intact Lab, il n’y a pas que des programmeurs et des designers de site Internet qui y travaillent. « Nos gens spécialisés en intelligence numérique suivent et comprennent ce que veulent les consommateurs. On a aussi nos experts en stratégie numérique, en création et développement. Enfin, on a nos spécialistes de la gestion des projets numériques. Ils veillent à ce que notre offre corresponde aux besoins exprimés par les consommateurs », dit-elle.

Au Québec, le volume de recherches faites en utilisant les mots « assurance auto » augmente de manière soutenue depuis 2005. Le modèle de distribution entre assureurs directs ou par le courtage n’intéresse pas ces internautes, dit-elle. « Ils recherchent une bonne offre qui satisfera leurs besoins. »

Les perturbateurs

Beaucoup de choses changent dans l’industrie et forcent les assureurs à adapter leur offre, souligne-t-elle. Les consommateurs sont notamment de plus en plus exigeants envers l’offre numérique. L’ère des perturbateurs (« disruptors ») est arrivée.

Les perturbateurs ont beau jeu de trouver les problèmes dans l’industrie et proposer des solutions plus attrayantes pour les consommateurs. Et ils ne se verront pas imposer des contraintes comme celles touchant l’encadrement règlementaire. « Leur accent est mis sur le client, et c’est comme cela qu’ils arrivent à occuper le marché », insiste-t-elle.

Quelque 68 % des Canadiens possèdent désormais un téléphone intelligent, et la mobilité offerte par ces appareils a contribué à l’explosion de l’économie de partage. La convivialité d’utilisation de ces appareils facilite aussi l’accès plus rapide à l’information. Les gens se déplacent avec l’engin au bout du bras et peuvent le consulter quand ils le veulent.

Imen Zitouni souligne que les gens qui consultent le site d’un assureur ne se limitent pas à comparer l’offre d’Intact avec celle d’un autre assureur. « Ils nous comparent à toutes les expériences numériques qu’ils peuvent vivre, tous les jours, avec plein d’autres fournisseurs. »

Les ventes triplent

La valeur des ventes numériques chez Intact a triplé entre 2013 et 2016. « Nous ne sommes pas les seuls à connaitre cette progression. Tous les grands joueurs du numérique font la même chose et surveillent l’impact de ces tendances sur leur croissance. »

La convivialité, ou l’ergonomie du site, est le degré de facilité avec lequel le produit peut être exploité par des utilisateurs déterminés, afin d’atteindre des buts définis de manière efficace et satisfaisante, avec efficience, selon le contexte particulier de son utilisation, explique-t-elle.

La filière belairdirect.com de l’assureur a été la première à offrir une souscription en ligne en 2013. Il y a deux ans, on a refait entièrement le processus en assurance auto en mettant l’accent sur l’ergonomie. L’objectif était d’augmenter le taux de conversion des demandes en souscriptions en ligne.

Le site de l’assureur était le premier à reconnaitre le type d’appareil utilisé pour souscrire en ligne : ordinateur personnel, tablette ou cellulaire. Les gens magasinent leur assurance auto, dans le meilleur des cas, au moment du renouvèlement, mais ils utilisent Internet tous les jours pour les autres produits consommés. « Ce n’est pas aux consommateurs de s’adapter à notre système, c’est nous qui devons adapter notre processus d’affaires à leurs besoins », insiste-t-elle.

Le processus adopté reprenait le même principe du panier de magasinage utilisé dans d’autres sites, avec diverses options. Peu importe l’ordre dans lequel les clients répondaient aux questions, ils devaient obtenir une prime. Mais le processus demeurait assez long.

Un processus simplifié

En 2013, l’assureur pouvait poser jusqu’à 61 questions à l’assuré avant de lui soumettre une offre, et le temps moyen de la transaction était de 7 minutes 56 secondes au Québec. En 2014, le processus était amélioré, mais le nombre de questions n’a pas été réduit, ni le temps moyen à compléter le processus. Tous appareils confondus, le taux de conversion était stable, mais les souscriptions obtenues par les utilisateurs de tablettes ont augmenté de 25 %.

En 2015, le processus a été grandement simplifié sur toutes les déclinaisons de l’assureur, incluant la souscription par l’entremise du courtier. La soumission peut désormais être complétée en un temps moyen de trois minutes, avec seulement 12 questions. Le taux de conversion tous appareils confondus a augmenté de 50 %, et de 30 % encore pour les consommateurs qui utilisent leur tablette. En Ontario, où le processus prenait 10 minutes auparavant, le temps moyen est aussi désormais de seulement trois minutes.

Le client doit pouvoir compléter sa demande en utilisant seulement son pouce sur son téléphone tout en mangeant son sandwich dans l’autre main, même debout au milieu d’une foule. C’est le défi qu’elle a lancé à son équipe. L’utilisation du téléphone mobile est un réel accélérateur de croissance, selon elle.

30 mises-à-jour

Début 2015, Intact a aussi lancé la soumission rapide en utilisant le cellulaire, et l’application a été mise à jour plus de 30 fois. L’assureur a été le premier assureur à intégrer la photo dans le processus. L’utilisateur peut envoyer une photo de son permis de conduire, ce qui réduit encore plus le nombre de questions à compléter. « On le fait par l’application directement. Ça a été un grand défi technologique », raconte-t-elle.

Tous ces efforts fournissent des résultats, puisque le nombre de soumissions a grimpé de 280 % depuis le lancement du processus utilisant le téléphone mobile, toujours avec le même budget. « Ne vous trompez pas : les gens n’utilisent pas le téléphone pour nous appeler si ça ne fonctionne pas avec l’application », précise-t-elle.

Pour la mise en place de la soumission rapide, Intact a consacré l’équivalent de 3 % du budget annuel du service de recherche et développement. Imen Zitouni estime qu’il est désormais possible de lancer un produit assez rapidement et à des couts raisonnables. Pour y arriver, il faut favoriser cette culture de l’amélioration continue et écouter les commentaires des clients, peu importe le canal de distribution, ajoute-t-elle.