Ottawa a fermé la porte à l’administration Trump et à des États américains qui veulent permettre à ses citoyens de se procurer des médicaments au Canada afin d’amener une concurrence étrangère dans leur marché et réduire les prix en sol américain.

Les Américains ont fait un immense pas dans cette direction il y a quelques jours avec l’annonce faite par le secrétaire à la Santé des États-Unis, Alex Azar. Le gouvernement Trump, a indiqué l’AFP, veut autoriser les pharmaceutiques qui le voudraient à importer la version étrangère, mais identique, de leurs propres médicaments autorisés aux États-Unis, qui seraient vendus sous un code distinct et à un prix plus bas.

Projet de règlementation

Le 18 décembre dernier, la FDA a publié un avis de projet de règlementation qui, s’il est finalisé, autoriserait les États, éventuellement en collaboration avec les grossistes ou les pharmacies, à élaborer des programmes qui permettraient l’importation de certains médicaments d’ordonnance du Canada. Des gouverneurs du Maine, du Vermont et du New Hampshire, trois États du nord qui ont des frontières avec le Québec, du Colorado et de la Floride, soutiennent activement cette démarche qualifiée « d’historique ».

« Aucun président de l’histoire n’avait auparavant demandé à l’Agence américaine du médicament (FDA) d’ouvrir la porte à l’importation sure de médicaments en provenance du Canada, s’est réjoui le secrétaire à la Santé des États-Unis, Alex Azar. Ces mesures permettraient éventuellement de vendre ces médicaments à des prix inférieurs à ceux qui sont actuellement offerts aux consommateurs américains, ce qui donnerait aux fabricants une nouvelle marge de manœuvre pour réduire les prix. »

Cette réforme ne pourrait toutefois se faire qu’à l’issue d’une période de consultations de plusieurs mois.

Si au sud de la frontière, cette initiative est bien accueillie par la classe politique et les patients, elle suscite beaucoup d’inquiétudes au Canada. Beaucoup craignent que l’importation par les États-Unis de médicaments destinés au marché canadien n’entraine des pénuries au pays. Un chercheur américain du Texas, le Dr Marvin Shepherd, a calculé qu’il suffirait de 118 jours pour que les réserves canadiennes de médicaments sur ordonnance soient épuisées si les Américains s’alimentaient ici.

C’est toutefois un scénario dans lequel le président de l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ), Bertrand Bolduc, croyait peu. Lors d’une entrevue au Portail de l’assurance à l’été 2019, il avait soulevé toutes les embuches qui feraient obstacle à l’importation de médicaments du Canada aux États-Unis. Les pharmaciens québécois qui se risqueraient à le faire devraient en répondre devant leur Ordre et leurs fournisseurs, notamment.

Fin de non-recevoir du Canada

L’annonce du secrétaire américain à la Santé, qui est survenue quelques jours après que Justin Trudeau ait encore gouté à la médecine et aux insultes du président Donald Trump, a été reçue froidement à Ottawa.

« Ces mesures n’auront pas d’impact sur les prix ou l’accès des Américains, a réagi le porte-parole de la ministre de la Santé, Patty Hajdu, cité par l’Agence France Presse. Notre priorité ferme est l’accès des Canadiens aux médicaments dont ils ont besoin. »

Dans une déclaration à Global News, le porte-parole de Santé Canada, Alexander Cohen, a ajouté que les autorités canadiennes continueront à être en communication avec la Maison-Blanche sur cette question et que le message reste ferme.

Il ne vient pas toutefois des plus hautes autorités politiques du pays et l’Association des pharmaciens du Canada a invité Ottawa à exprimer encore plus clairement son opposition à l’importation des médicaments du Canada par les États-Unis.