La consultation sur les projets de règlements entourant la rente viagère à paiements variables (RVPV) a pris fin le 12 juillet 2025. La RVPV verse à son bénéficiaire un revenu garanti à vie, qui pourra varier en cours de route, selon certains facteurs.
Le gouvernement du Québec avait publié le 28 mai 2025 dans la Gazette officielle du Québec des projets de règlements qui permettront aux régimes de retraite à cotisations déterminées et aux régimes volontaires d’épargne-retraite (RVER) d’ajouter un fonds de RVPV comme choix de décaissement à la retraite.
Retraite-Québec explique sur son site que les projets modifient le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite et le Règlement sur les régimes volontaires d’épargne-retraite. Ces modifications permettront aux promoteurs de régimes à cotisations déterminées et de RVER de créer une option de fonds de RVPV.
Les sommes accumulées dans un compte de retraite immobilisé (CRI) pourront aussi être transférées dans une RVPV. La personne qui a épargné des sommes dans son le régime de son employeur doit les transférer dans un CRI s’il quitte son emploi.
Liée à l’espérance de vie
Un participant de régime qui a choisi une option de fonds de rente viagère à paiements variables pourra y transférer son épargne à l’aube de sa retraite, en tout ou en partie. Les sommes seront immédiatement converties en revenu.
Ce revenu sera établi selon un taux d’intérêt de référence et l’hypothèse de mortalité du fonds de RVPV. Les paiements de la rente seront ajustés annuellement, selon le rendement du fonds et l’hypothèse de mortalité de l’ensemble de ses rentes. L’hypothèse devra être révisée par un actuaire, au moins tous les trois ans.
« Ainsi, les rentes pourront être ajustées pour refléter les rendements nets du fonds, l’expérience de mortalité des participants au fonds RVPV, ainsi que tout changement aux hypothèses relatives à la mortalité », résume la firme d’actuaires-conseils Aon dans un bulletin intitulé Québec – Projets de règlements encadrant les fonds de rentes viagères à paiements variables.
« Les hypothèses de mortalité feront l’objet d’une attention particulière, car toute demande d’enregistrement ou de modification d’un régime de retraite comprenant ou visant à établir un fonds RVPV devra préciser les hypothèses de mortalité utilisées pour l’établissement du montant des rentes. Celles-ci devront être différenciées selon le sexe », précise le bulletin d’Aon.
Option de décaissement bienvenue
Les solutions de décaissement sont peu nombreuses et ne répondent pas adéquatement aux besoins des retraités plus âgés.
– Angelita Graham, présidente de l’Institut canadien des actuaires (ICA)
Dans le mémoire qu’il a soumis à la consultation le 11 juillet, l’Institut canadien des actuaires (ICA) loue l’arrivée d’une nouvelle option de décaissement. « Les solutions de décaissement sont peu nombreuses et ne répondent pas adéquatement aux besoins des retraités plus âgés », écrit Angelita Graham, présidente de l’ICA.
Dans son mémoire, l’ICA estime qu’environ 1 500 milliards de dollars (G$) sont accumulés au Canada dans des régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER) et dans les régimes à cotisations déterminées. Il ajoute que chez les participants de régimes québécois âgés de plus de 55 ans, il s’agit d’au moins 200 G$.
« Ces projets de règlements sont publiés à un moment où l’accès à des options novatrices pour convertir l’épargne en revenu est essentiel pour les quelque deux millions de personnes de plus de 55 ans au Québec », a pour sa part réagi la firme d’actuaires-conseils Normandin Beaudry, dans un communiqué intitulé Projets de règlements pour la mise en place de la rente dynamique au Québec. Rentes dynamiques est synonyme de rentes viagères à paiements variables.
Retirer plus, et plus rapidement
Généralement, la RVPV peut permettre de sortir plus d'argent que si on avait choisi chaque année le retrait minimal prescrit.
– Louis-Bernard Désilets, associé chez Normandin Beaudry
De son côté, l’Institut canadien des actuaires croit que le regroupement des rentes dans un fonds permet de réduire les frais et d’accélérer les retraits. « En plus d’éliminer le risque qu’il survive à son épargne, cette solution permet à l’individu de retirer des revenus de retraite plus rapidement, dans un environnement où la mutualisation des épargnes lui permettra de bénéficier de frais plus compétitifs », explique Mme Graham.
Dans son communiqué, Normandin Beaudry salue aussi la mise en commun des risques que favorise la RVPV. « En permettant la mise en commun des risques entre les participants, elle procurera un revenu plus élevé qu’une approche où les risques seraient pris en charge sur une base individuelle », peut-on lire.
Signataire du communiqué, Louis-Bernard Désilets est associé chez Normandin Beaudry. Il écrit aussi que la rente dynamique éliminera les décisions complexes pour le décaissement des sommes accumulées (dans un régime de retraite). « De plus en plus de participants ont des sommes importantes accumulées dans des régimes de capitalisation. Vient alors le problème de décider à la retraite : quel montant que je sors de ce fonds-là ? », a-t-il ajouté, en entrevue avec le Portail de l’assurance.
M. Désilets observe que plusieurs retraités pourront souvent retirer une plus grande proportion de leur fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) que le minimum exigé par l'Agence du revenu du Canada (ARC). Il ajoute que les gens choisissent souvent de retirer de leur FERR le montant minimal prévu à la grille de l'Agence du revenu du Canada (ARC).
Par exemple, le retrait minimum exigé par l’ARC en 2025 d’une personne âgée de 65 ans est de 4 % de la valeur que totalisait son FERR en début d’année. Les sommes d’un FERR peuvent provenir d’un REER, d’un régime de pension agréé collectif, d’un régime de pension agréé, d’un régime à prestations déterminées, d’un autre FERR, ou d'un CELIAPP (le compte d’épargne libre d’impôt destiné à l’achat d’une résidence).
« Les retraits du FERR peuvent être optimisés avec des outils comme les rentes. Généralement, la RVPV peut permettre de sortir plus d'argent que si on avait choisi chaque année le retrait minimal prescrit. Il est intéressant d’avoir un outil de plus dans le coffre pour décaisser des sommes à la retraite », pense Louis-Bernard Désilets.
RVPV : depuis 1967 au Canada
Dans son mémoire, l’ICA dit souhaiter fortement que d’autres provinces imitent le Québec en adoptant une réglementation permettant la mise en place de fonds de RVPV, afin d’en uniformiser l’accès à travers le pays.
Dans son communiqué, Normandin Beaudry affirme que le Québec est la première province à se doter d’un tel cadre réglementaire.
D’autres provinces ont toutefois un régime offrant une RVPV, même sans cadre réglementaire. Selon l’ICA, cette solution existe depuis 1967 en Colombie-Britannique, dans le régime University of British Columbia Faculty Pension Plan. Ce régime « bénéficie d’une clause de droits acquis dans les règles fiscales canadiennes. Plusieurs centaines de retraités actuels de ce régime ont opté pour une RVPV », peut-on lire.
Le Régime de retraite des employés publics de la Saskatchewan a aussi franchi le pas d’offrir un fonds de RVPV, selon un article du Portail de l’assurance publié le 14 mars 2024. L’article explique que dans son budget de 2019, le Gouvernement du Canada s’est engagé à rendre les fonds de RVPV une réalité. Ont alors suivi des amendements législatifs pour permettre leur existence en 2021.
Plusieurs étapes à franchir
L’étape suivante relève des provinces, lesquelles doivent à leur tour développer leur propre législation, et des règlements qui régiront les fonds de rentes viagères à paiements variables, peut-on lire dans l’article du Portail de l’assurance.
Au Québec, le discours du Budget du 12 mars 2024 du ministère des Finances du Québec a donné le coup d’envoi, suivi du Projet de loi n° 80, Loi concernant la mise en œuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 12 mars 2024 et modifiant d’autres dispositions.
Dans un autre communiqué publié en novembre 2024, Normandin Beaudry rappelle que la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et la Loi sur les régimes volontaires d’épargne-retraite ont été modifiées à l’automne 2020 afin d’y introduire le concept de rentes dynamiques. Le Projet de loi n° 80 a quant à lui modifié ces deux lois « pour permettre aux régimes à cotisation déterminée et aux RVER d’offrir cette nouvelle option pour le décaissement », ajoute la firme d’actuaires-conseils.