Brandir des statistiques inquiétantes sur le cancer ne suffira plus à vendre des polices maladies graves. Pour relancer une croissance qui s’essouffle, les assureurs devront mieux former leurs conseillers sur leurs critères de sélection des risques.Depuis 2004, les réassureurs ont resserré la vis en tarification de l’assurance maladies graves. Les assureurs ont suivi en restreignant leurs critères de sélection pour maintenir la rentabilité des produits. Résultat: les primes ont augmenté et la croissance des ventes a ralenti (voir Journal de l’assurance de mai 2006).

Du même coup, le conseiller a plus de difficulté que jamais à garder le fil des nouvelles normes en sélection des risques de maladies graves.

Standard Life, qui a lancé un tout nouveau programme de formation en mai dernier, admet que jusqu’ici, le soutien qu’il apportait à ses conseillers ne répondait pas adéquatement à leurs besoins. En effet, l’assureur laissait aux personnes responsables des ventes le soin de développer les programmes de vente destinés aux conseillers.

« La sélection des risques d’un produit de maladies graves est différente de celle d’un produit d’assurance vie. Elle implique des critères médicaux et de santé particuliers, et nous nous sommes dit que tout cela n’était peut-être pas communiqué adéquatement au courtier », explique Marie-Chantale Viau, consultante principale gestion et développement de produits, assurance chez Standard Life.

Parmi les points sur lesquels cette formation s’attarde figure la procédure de sélection des risques. Bien la comprendre est essentiel à la vente du produit, estime Mme Viau. En effet, si les courtiers se sentent mal à l’aise avec les questions relatives à la sélection des risques, ils préfèrent les occulter et passer à autre chose.

Ce qui a des répercussions sur l’acceptation du dossier du client en bout de ligne. Or, les courtiers qui bénéficient du nouveau programme rencontrent une personne spécialisée en sélection des risques.

Chez Desjardins Sécurité financière (DSF), la sélection des risques fait aussi partie de la formation offerte aux conseillers. Après le lancement de son produit de maladies graves en 1997, l’assureur a orienté sa formation en maladies graves sur la connaissance du marché, les maladies et la sélection des risques.

« Au niveau des risques, notre équipe de sélection se rend dans les centres (SFL) pour donner une formation », annonce Céline Normand, directrice principale gestion de projets, soutien technologique et formation.

Vendre la tarification

Directeur ventes et formation au sein de l’agent général Groupe Cloutier, Patrick Cloutier relève aussi le besoin en formation des courtiers en ce qui touche la sélection des risques effectuée par les assureurs en maladies graves. Selon lui, épiloguer sur les cas de cancers contractés chaque année est un concept de vente révolu. Il est temps, croit-il, de mettre l’accent sur « la tarification du produit » (N.D.L.R. : Tarification employé ici dans le sens de sélection des risques et non d’établissement des prix.)

Pour le courtier, indique-t-il, la question de la tarification du produit demeure nébuleuse jusqu’à ce qu’il voit un tiers de ses dossiers d’assurance maladies graves rejetés ou imposés d’une surprime. « Aucune compagnie n’a réussi à monter une présentation claire sur la manière dont fonctionne réellement la tarification, même s’il y en a actuellement quelques-unes qui se mettent à donner plus de détails sur le genre de décisions auxquelles on peut s’attendre », souligne-t-il.

Mais la route risque d’être longue avant que tous les assureurs ne retroussent leurs manches et ne s’attaquent de front à fournir une formation adéquate aux courtiers. Deux styles de compagnies se partagent le marché des maladies graves, fait remarquer M. Cloutier : celles qui veulent offrir un bon produit, une bonne formation et bien couvrir le client, et celles qui vendent des produits parce qu’elles se disent que c’est un beau marché.

M. Cloutier salue l’initiative de plusieurs joueurs d’envergure, tels Great-West, Canada-Vie et Financière Manuvie qui dévoilaient, en mai dernier au Journal de l’assurance, vouloir mettre l’accent sur la formation en maladies graves.

« Certaines compagnies ont des cliniques de maladies graves. Les courtiers y sont formés de A à Z sur le produit », note Patrick Cloutier. Comme chaque assureur a ses propres définitions, il devient nécessaire d’offrir une formation poussée à ce sujet, ajoute-t-il.