Que le ministère des Finances du Québec ait repris de grands pans des positions des régulateurs d’assurance dans son Rapport d’application de la Loi sur la distribution des produits et services financiers a été accueilli avec déception par certains dans l’industrie de l’assurance. Cette déception était d’autant plus vive qu’on n’y retrouve pratiquement pas de mention sur la valeur du rôle-conseil en assurance.
Peu l’ont remarqué, mais pour illustrer la couverture de son Rapport d’application, le gouvernement a choisi l’image d’une femme devant son ordinateur portable tenant une carte de crédit à la main. Est-ce là la vision du gouvernement en matière de vente d’assurance par Internet? Nul ne peut le dire pour le moment, mais des gens de l’industrie s’attendaient à plus.
Marie Elaine Farley, PDG de la Chambre de la sécurité financière, déplore le manque de solutions concrètes pour promouvoir le rôle-conseil dans le Rapport d’application. « Ça procure une valeur ajoutée à la protection du public. Plusieurs études démontrent aussi que le conseil donne une valeur ajoutée au portefeuille des investisseurs », a-t-elle dit en entrevue au Journal de l’assurance.
Quant à la vente d’assurance par Internet, la Chambre maintient que le rôle-conseil y est primordial. « Les produits financiers demandent une bonne compréhension. On s’est positionné dans le même sens à l’égard de la distribution sans représentant. On refera valoir nos arguments », dit-elle.
À la Chambre de l’assurance de dommages, on est parmi ceux qui se questionnent à savoir pourquoi le ministère n’est pas allé plus loin, rappelant que la loi en elle-même est muette sur ce point dans sa forme actuelle. « On y présente la distribution par Internet comme un mode de distribution et non pas comme un moyen de communication. Aussi, on réagit à la distribution par Internet, mais on ne retrouve pas un mot sur la télématique », a dit sa PDG Maya Raic, en entrevue au Journal de l’assurance.
Elle ajoute que le Rapport d’application ne met pas en relief que le monde virtuel est là ou que de nouveaux joueurs pourraient percer le marché. « J’ai été surprise qu’il n’y ait pas un mot sur les tendances à venir dans l’industrie. Ce n’est pas un regard très juste sur l’assurance de dommages. On y voit une certaine méconnaissance de l’industrie », dit-elle.
Au Regroupement des cabinets de courtage d’assurance du Québec (RCCAQ), on maintient la position exprimée en avril, à savoir qu’un représentant certifié doit intervenir dans la transaction. « L’importance du conseil, c’est notre business et c’est dans notre ADN. On le retrouve aussi dans notre code de déontologie pour bien assurer la protection du consommateur », a dit Vincent Gaudreau, président du conseil d’administration du RCCAQ, en entrevue au Journal de l’assurance.
M. Gaudreau ajoute que le RCCAQ n’est pas contre la vente d’assurance par Internet. « Ça ne servirait à rien de s’y opposer, car c’est un nouveau canal de communication qui prendra de l’ampleur. Toutefois, est-ce que ça justifie de couper sur la protection du consommateur en enlevant le représentant certifié du portrait? Nous considérons que notre demande n’est pas exagérée. Notre position se tient. Tout ce qu’on souhaite, c’est que quelqu’un vérifie la transaction », dit-il.
M. Gaudreau confie par ailleurs que son cabinet réalise déjà des transactions en ligne. Un courtier repasse toutefois toutes les soumissions obtenues, car sinon, dans plusieurs cas, le consommateur ne serait pas bien servi, dit-il.
La Corporation des assureurs de dommages directs du Québec (CADD) se dit « tout à fait en accord avec l’Autorité sur cette position, compte tenu du modernisme de l’industrie et des attentes des consommateurs », affirme son président Michel Laurin. Il voit donc d’un bon œil que le gouvernement les reprenne.
*Avec la collaboration de Serge Therrien et de Mathieu Carbasse