Le 19 septembre dernier, le World Resources Institute publiait City-scale, city relevant climate hazard indicators under 1,5 °C, 2,0 °C, and 3,0 °C of global warming, une note technique tirée d’une analyse des projections de l’effet des événements météorologiques extrêmes associés au réchauffement climatique dans les 996 agglomérations urbaines qui comptaient plus de 500 000 habitants en 2015.

On évalue ainsi la récurrence et l’amplitude de 14 types d’aléas climatiques en fonction des divers scénarios de réchauffement du climat, à 1,5 °C, soit la limite fixée par l’Accord de Paris sur le climat, et aussi à 2 °C et à 3 °C, comparativement à la température moyenne de la période 1880-1900.

Pour chaque ville, les auteurs ont également estimé les probabilités que les valeurs de l’ampleur des risques dépassent des valeurs particulières en matière de seuils extrêmes. Les aléas ont été choisis pour prendre en compte la prise de décision en matière d’adaptation au climat dans les domaines de la santé publique, de l’entretien des infrastructures et de la productivité économique.

Ces projections incluent huit agglomérations canadiennes : Vancouver, Calgary, Edmonton, Winnipeg, Toronto, Ottawa, Montréal et Québec. On a comparé les résultats de la modélisation avec les périls couvrant la période historique de référence, 1995-2014, où le réchauffement moyen atteignait 0,81 °C en 2005. La température de l’air est mesurée à une hauteur de deux mètres.

Dix de ces aléas sont reliés à la température et quatre autres aléas concernent le volume de précipitations. Les auteurs précisent que les projections ne tiennent pas compte de l’exposition au risque de chaque agglomération en fonction des caractéristiques démographiques, socio-économiques ou géographiques ou de la capacité de chacune d’elles à s’adapter aux extrêmes climatiques.

On projette ainsi la température la plus chaude, le nombre de jours dans l’année où le mercure dépasse les 35 °C ou 40 °C, ou encore quand la chaleur dépasse les seuils critiques. On établit aussi des prévisions sur le nombre de jours où la température maximale dépasse le 95e percentile de la température enregistrée dans une ville entre 1980 et 2019, ou encore les journées où il y a besoin de rafraîchir un immeuble par la climatisation.

L’impact des canicules, tant leur nombre que leur durée, est aussi évalué, de même que le nombre de jours où la température est optimale pour l’éclosion de la malaria ou la transmission des arbovirus par des moustiques ou des tiques. Le réchauffement plus important favorisera la transmission des arbovirus.

Pour les précipitations, on évalue la journée où il tombe le plus de pluie en une seule journée, le nombre de jours sans aucune précipitation, donc de sécheresse, le nombre de jours où les quantités de précipitations dépassent le 90e percentile enregistré entre 1980 et 2019, et enfin les journées où le risque de glissement de terrain est élevé.

Pour chacun de ces 14 aléas, les auteurs déterminent un indice de la valeur attendue (expected hazard value) et la probabilité que la valeur de cet aléa dépasse un seuil critique déterminé dans n’importe laquelle des années de la période de 10 ans.

Chaque scénario de réchauffement comporte une projection faite en fonction de neuf modèles prévisionnistes distincts, et trois ont été retenus pour chacune des agglomérations.

Des tendances

Des tendances mondiales apparaissent à l’analyse des projections, selon les auteurs du World Resources Institute. Ainsi, concernant la durée des canicules, la moyenne non pondérée de toutes les villes est de 14,2 jours pour la période 1995-2014. Cette moyenne passe à 16,3 jours de chaleur accablante dans le scénario 1,5 °C et à 24,5 jours pour le scénario 3 °C.

Le résidant moyen de ces 996 agglomérations subira une hausse de 53 % du nombre de jours de canicule si le réchauffement passe de 1,5 °C à 3 °C. Le nombre d’épisodes de canicules augmente aussi en fonction de l’accélération du réchauffement.

La probabilité des aléas demeure variable selon le revenu moyen de la population dans le pays concerné. La moyenne non pondérée du nombre d’épisodes de canicule augmente de 29 % si l’on passe du scénario ciblé au pire scénario.

Si l’on se passe du scénario 1,5 °C au scénario 3 °C, les agglomérations situées dans les pays où le revenu moyen est bas connaîtront une hausse de 45 % des épisodes de canicule, tandis que les citadins des pays où le revenu moyen est élevé subiront une hausse de 14 % de ce même aléa.

À travers l’ensemble des agglomérations et en se basant sur les estimations de population de 2020, au scénario ciblé de 1,5 °C, les chercheurs estiment que 547 millions de citadins seront exposés à 30 jours ou plus de température dépassant les 35 °C. Si le pire scénario se concrétise, ce nombre grimpe à 701 millions de personnes.

La note comprend aussi des explications sur les limites des modèles prévisionnistes, notamment sur l’impossibilité de considérer les îlots de chaleur qui sont communs dans de nombreuses villes où les sols sont imperméabilisés et la végétation se fait rare. Les auteurs ne considèrent pas non plus l’urbanisation grandissante et l’expansion probable de ces agglomérations. L’exposition aux aléas est estimée selon la population actuelle, et non pas sur la croissance possible dans le futur.

Ils rappellent également qu’à l’intérieur d’une même agglomération, selon la taille des immeubles, le pourcentage de couvert végétal et la présence d’un plan d’eau, il peut y avoir de grandes variations climatiques. Les auteurs soulignent aussi que les variations sont probablement sous-estimées, particulièrement en ce qui concerne les précipitations.

« Cependant, même avec une disponibilité limitée des données, nous constatons qu’un monde à 3,0 °C de plus que le niveau de référence préindustriel serait probablement bien pire pour bien plus de citadins qu’un monde où la température n’a grimpé que de 1,5 °C. »

En interprétant les données, les utilisateurs devront se montrer prudents concernant la répartition spatiale des indicateurs. Près de l’équateur, l’équivalent de 0,25 degré de différence dans la latitude ou la longitude équivaut à 28 kilomètres. En conséquence, le même secteur peut inclure des portions très urbanisées et la campagne environnante. En conséquence, il est probable que la moyenne projetée soit inférieure à celle qui sera réellement ressentie dans les centres-ville.

La qualité de l’air

Dans son bulletin Global Atmosphere Watch publié le 4 septembre dernier, l’Organisation mondiale de la météorologie (OMM) indiquait que « le cercle vicieux du changement climatique, des feux de forêt et de la pollution atmosphérique a des répercussions de plus en plus graves sur la santé humaine, les écosystèmes et l’agriculture ». La pollution de l’air ambiant est à l’origine de plus de 4,5 millions de décès prématurés par année.

Selon l’OMM, la pollution de l’air ambiant est à l’origine de plus de 4,5 millions de décès prématurés par an. Le bulletin analyse la relation complexe entre la qualité de l’air et le climat. Il est basé sur les huit premiers mois de l’année 2024 qui ont été marqués par la continuité dans les tendances observées en 2023. Des chaleurs intenses et des sécheresses persistantes augmentent le risque de feux de forêt et de pollution de l’air.

« Les substances chimiques responsables de la pollution atmosphérique sont en général émises en même temps que les gaz à effet de serre. Ainsi, le réchauffement de la planète et la dégradation de la qualité de l’air vont inévitablement de pair », indique l’OMM.

« Les polluants atmosphériques viennent se déposer à la surface de la Terre. La mauvaise qualité de l’air nuit alors à la santé des écosystèmes. Les dépôts d’azote, de soufre et d’ozone réduisent les services fournis par les écosystèmes naturels en faveur de l’eau pure, de la biodiversité et du stockage du carbone. »

Le bulletin répertorie les concentrations mondiales de particules fines, notamment les PM 2,5 (soit des particules dont le diamètre ne dépasse pas 2,5 micromètres). Celles-ci sont particulièrement dommageables pour la santé si elles sont inhalées pendant une longue période. Ces particules sont émises lors de la combustion de matières fossiles, par des feux de forêt ou des poussières du désert soufflées par le vent.

En 2023, les feux de forêt en Amérique du Nord, particulièrement ceux survenus au Canada, ont provoqué des émissions exceptionnellement élevées si on compare les émissions des mêmes particules à la période 2003-2023.

Pour la production agricole, ces mêmes émissions réduisent la productivité des cultures dans les pays où le rendement élevé est requis si l’on veut nourrir leur population. L’OMM note que cette situation est particulièrement délicate dans l’Afrique centrale, l’Asie du Sud-Est, la Chine, l’Inde et le Pakistan. Dans les zones les plus polluées de la Chine et de l’Inde, on observe ainsi une réduction de 15 % du rendement des cultures.

Les particules dans l’air nuisent à la quantité de lumière que les plantes peuvent absorber. « L’agriculture elle-même contribue largement aux émissions de particules et de leurs précurseurs lors du brûlage des chaumes, de l’application d’engrais et de pesticides, du labourage, de la récolte ainsi que du stockage et de l’utilisation du fumier », explique l’OMM.

Les substances chimiques responsables de la pollution atmosphérique sont en général émises en même temps que les gaz à effet de serre. Ainsi, le réchauffement de la planète et la dégradation de la qualité de l’air vont inévitablement de pair.

Les polluants atmosphériques viennent se déposer à la surface de la Terre. La mauvaise qualité de l’air nuit alors à la santé des écosystèmes. Les dépôts d’azote, de soufre et d’ozone réduisent les services fournis par les écosystèmes naturels en faveur de l’eau pure, de la biodiversité et du stockage du carbone.

Cet article est un Complément au magazine de l'édition de novembre 2024 du Journal de l'assurance.