La solvabilité des régimes de retraite à prestation déterminée ne cesse de s’améliorer. Le troisième trimestre de 2021 n’a pas fait exception. Or, des consultants en avantages sociaux préviennent que la volatilité et l’incertitude économique pourraient bientôt perturber ce tableau. 

L’indice Mercer sur la santé financière des régimes de retraite suit le degré de solvabilité médian des régimes de retraite à prestations déterminées de sa base de données. Il englobe à la fois le secteur privé et le secteur public. Selon cet indice, la solvabilité des régimes de retraite s’est établie à 101 % au 30 septembre 2021, alors qu’il était de 100 % au 30 juin 2021. Elle était de 96 % au 31 décembre 2020, et de 93 % au 30 septembre 2020. 

Les rendements des placements des régimes de retraite sont restés plutôt stables au troisième trimestre, observe Mercer. Dans un communiqué qui relate ses observations de son indice, le consultant constate que les rendements des actions ont été généralement positifs. 

Rendements obligataires négatifs 

Selon Aon, le ratio de capitalisation global des régimes de retraite canadiens associés à l’indice composé S&P/TSX est passé de 95,6 % au 30 juin 2021 à 96,8 % au 30 septembre 2021. Son outil permet de suivre les risques liés aux régimes de retraite à prestations déterminées offerts par des sociétés de l’indice composé S&P/TSX. 

Dans son communiqué, Aon souligne que le rendement des obligations à long terme du gouvernement du Canada a augmenté de 14 points de base (100 points de base équivalent à 1 %) par rapport au premier trimestre de 2021. Les écarts de crédit n’ont pas bougé, ce qui a fait augmenter les taux d’intérêt qu’utilisent les promoteurs de régimes pour évaluer leurs engagements envers les retraités. Ils sont passés de 2,92 % à 3,06 % entre les deux trimestres de comparaison. Aon a effectué ses calculs avec son outil de suivi Pension Risk Tracker. 

Mercer fait valoir de son côté que la hausse des taux obligataires a entraîné des rendements négatifs pour les placements à revenu fixe.

Dans son survol de l’économie de la semaine se terminant le vendredi 8 octobre 2021, Sébastien McMahon, économiste en chef par intérim d’iA Groupe financier, rapporte que l’indice du marché des obligations de longue durée FTSE TMX Long a été à la baisse de -0,96 %. Depuis le début de l’année, le rendement de cet indice s’est établi à -9,22 % selon la revue économique d’iA. Dans son commentaire, il dit que les marchés se dirigent vers une rare année négative pour les rendements obligataires.

Le passif diminue 

La hausse des taux obligataires a aussi fait diminuer le passif de solvabilité des régimes, selon l’indice de Mercer. « Par conséquent, la situation financière de la plupart des régimes de retraite s’est légèrement améliorée au cours du trimestre. » Mercer estime que 53 % des régimes ont un excédent d’actif selon l’approche de solvabilité (le ratio de l’actif par rapport aux engagements du régime). 

Dans la base de données des régimes de retraite de Mercer, on estime qu’un peu plus de la moitié (53 %) des régimes présentent un excédent d’actif selon l’approche de solvabilité, que 31 % des régimes montrent un degré de solvabilité entre 90 % et 100 %, que 11 % des régimes obtiennent un degré de solvabilité entre 80 % et 90 % et que 5 % des régimes obtiennent un degré de solvabilité inférieur à 80 %. 

« La situation financière des régimes de retraite continue de progresser en 2021. Si aucun événement imprévu ne se produit d’ici la fin de 2021, elle devrait s’être grandement améliorée par rapport au début de l’année », a déclaré F.  Hubert  Tremblay, conseiller principal du domaine avoirs de Mercer. 

Volatilité et incertitude 

« Le troisième trimestre de 2021 a vu un retour de la volatilité », a déclaré Nathan LaPierre, associé principal des solutions pour le patrimoine d’Aon.

Selon lui, les promoteurs de régimes doivent se méfier de l’incertitude persistante et chercher des moyens de réduire les risques et de conserver une partie des gains. « Avec le repli des marchés boursiers en septembre, les actions n’ont que légèrement progressé sur le trimestre. Associés à une hausse des taux d’intérêt qui a fait baisser le passif, les ratios de capitalisation ont poursuivi leur trajectoire ascendante », ajoute-t-il.

Mercer croit que les progrès de la vaccination et la relance économique invitent à l’optimisme quant à la vigueur des marchés boursiers et la situation financière des régimes.

Le consultant décèle toutefois des risques à l’horizon. « Des obstacles potentiels subsistent, notamment la stagnation des taux de vaccination, le risque de nouvelles souches de la COVID-19 résistantes aux vaccins, l’inflation, les niveaux des taux d’intérêt futurs et les réactions des marchés aux politiques monétaires des banques centrales, au moment où nous nous sortons de la pandémie », selon Mercer. 

Risques politiques en jeu 

Mercer croit que la combinaison de ces risques avec les risques politiques actuels pourrait faire vivre des parcours périlleux aux positions financières des régimes de retraite. Il pointe du doigt les risques de tensions géopolitiques, d’impasse politique en particulier aux États-Unis, ainsi que d’ingérence politique sur les marchés financiers et auprès des entreprises privées.

« À mesure que les niveaux de capitalisation de leurs régimes de retraite s’améliorent, les promoteurs de régimes devraient réévaluer l’exposition au risque de leurs régimes et décider s’il est temps de cristalliser une partie de ces gains, compte tenu de l’amélioration de leur situation. Comme nous avons été en mesure de le constater en mars 2020, les marchés peuvent changer rapidement.  Il est essentiel de disposer d’un plan et d’une stratégie appropriés pour s’assurer qu’un régime tire parti des gains générés par les marchés et soit protégé contre les baisses qui surviennent sur les marchés », a souligné M. Tremblay.  

En raison des rendements des placements à revenu fixe à des creux historiques, Mercer croit que les régimes doivent continuer d’investir dans des actifs de croissance. Quant à la volatilité qu’entraînent des placements axés sur la croissance, il estime qu’un régime peut la gérer avec une plus grande diversification des placements. Mercer suggère des avenues tels les titres des marchés publics, selon les catégories d’actif et les zones géographiques. Parmi ses autres recommandations, le régime pourra augmenter sa pondération dans les titres des marchés privés, utiliser stratégiquement des marges et inclure des caractéristiques de partage des risques dans les dispositions des régimes.