Les fonds négociés en bourse (FNB) ont la cote. En mai 2022, ils ont résisté à une forte volatilité qui a ébranlé le secteur des fonds communs.
Selon les statistiques de l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC) de mai 2022, le secteur des FNB a attiré des ventes nettes de 2,6 milliards de dollars (G$). En avril de la même année, les FNB ont été portés par des ventes nettes de 961 millions de dollars (M$).
Pendant ce temps, les fonds communs ont plutôt connu des rachats nets de 6,4 G$ en mai 2022, et de 4,9 G$ en avril de la même année, selon les données de l’IFIC.
Les statistiques de l’IFIC révèlent que les investisseurs en FNB n’ont pas hésité à se lancer sur les marchés boursiers : plus de la moitié de leurs ventes nettes de mai 2022 sont allées aux fonds d’actions, soit 1,6 G$.
Le bulletin Canadian ETF Flows de Banque Nationale du Canada, marchés financiers (BNMF) signale que les investisseurs ont pris des risques à l’approche d’un marché baissier. Les ventes nettes de FNB d’actions américaines ont été solides, bien que l’indice S&P 500 ait brièvement plongé en territoire baissier, observe BNMF.
12 fois plus de produits en 12 ans
Lors d’une conférence qui s’est déroulée le 26 mai au Cercle Finance du Québec, des experts ont expliqué ce qui guide leur choix de FNB dans un portefeuille ou dans leur offre aux investisseurs.
Pour illustrer la forte croissance du marché des fonds négociés en bourse, le directeur FNB, Est canadien de BMO, Alain Desbiens, a rappelé le chemin parcouru par les FNB depuis son entrée en service à la banque en 2010. « Il y avait alors quatre fournisseurs. Il y en a maintenant 42 même si une dizaine ont quitté le marché en cours de route. Il y avait à l’époque une centaine de produits et l’offre s’est multipliée par 12. »
En 2010, le marché des FNB représentait un actif de 40 G$, ajoute M. Desbiens. Selon les statistiques de l’IFIC, les FNB représentent un actif de 311 G$ au 31 mai 2022. L’Institut précise avoir rajusté ses données à partir de janvier 2022 pour éviter la double comptabilisation de FNB inscrits à une bourse canadienne qui investissent dans des parts d’autres FNB inscrits à une bourse canadienne.
Les conseillers veulent une position claire
« J’ai remarqué que les besoins, les outils et les solutions sont devenus plus sophistiqués, plus robustes. Il y a eu beaucoup d’évolution », observe M. Desbiens. Il note une grande diversité des FNB dans la catégorie des placements alternatifs, mais insiste sur l’importance de faire des choix. « On ne peut être tout pour tout le monde », dit-il en précisant que BMO a décidé de ne pas lancer de FNB de cryptomonnaies.
Les fonds alternatifs recherchent des rendements faiblement corrélés aux catégories d’actif traditionnelles comme les actions et les obligations. Sur son site, l’Autorité des marchés financiers explique que les gestionnaires de fonds alternatifs ont plus de latitude que ceux des fonds classiques. Ils utilisent des stratégies différentes pour diversifier le portefeuille. Parmi elles, l’utilisation accrue de dérivés et la vente de titres à découvert peuvent accélérer tant les pertes que les gains, selon les conditions du marché.
« Ce que les conseillers et les firmes de gestion recherchent est un positionnement clair dans le marché canadien (des FNB). Nous continuerons de développer beaucoup autour des options (de vente) couvertes et de l’infrastructure. Au sujet des infrastructures, M. Desbiens dit qu’il s’agit de “l’une des rares classes d’actifs à rendement positif depuis le début de l’année, et est très peu exposée au Canada”, note M. Desbiens.
Il a évoqué le lancement récent du fonds négocié en bourse BMO Brookfield Fonds mondial d’infrastructures d’énergie renouvelable série FNB (cote GRNI). Dans son bulletin, BNMF le classe comme un fonds ESG et signale qu’il a attiré des ventes nettes de 159 M$ en mai 2022.
L’Alternatif : pas à n’importe quel prix
M. Desbiens explique ce qui le rebute au moment de choisir des actifs. “Il y a des segments où on ne participe pas parce que c’est trop cher ou il n’y a pas de tracking ni d’efficacité en termes de liquidités, ce qui présuppose plus de gestion active et de discussions avec les teneurs de marché”, explique-t-il.
Conseiller principal en gestion de patrimoine et gestionnaire de portefeuille à Financière Banque Nationale, Guy Lalonde mise sur la fiabilité des rendements et la gestion des risques dans son Portefeuille Sigma Équilibré, créé il y a 15 ans. M. Lalonde a adopté une gestion indicielle pour ces raisons. “On aime la fiabilité du rendement indiciel, par rapport à la gestion active”, dit-il en ajoutant être attiré par des frais très bas et la transparence.
Selon lui, il n’est pas clair dans quelle mesure la gestion alternative comme celles des alternatives liquides (positions de marché qui peuvent être négociées quotidiennement), peut contribuer à la fiabilité ou la prévisibilité du rendement. M. Lalonde dit ne pas observer plus de persistance dans le rendement d’alternatives comme les options couvertes et la vente à découvert.
Difficile à comprendre
Des stratégies alternatives qui conviennent à l’investisseur institutionnel “qui n’a pas besoin de 100 000 $ pour des rénovations” peuvent ne pas convenir à l’investisseur individuel, ajoute M. Lalonde. Revenant sur la latitude des gestionnaires alternatifs, M. Lalonde dit qu’elle permet d’accéder à des produits que le client et même le conseiller ne comprennent pas toujours bien.
Il donne en exemple le FNB BetaPro Pétrole brut haussier quotidien avec effet de levier de Horizons, créé en janvier 2008. “Si le client achète le HOU, il n’est pas nécessairement conscient de la dynamique d’effet de levier, et certainement pas conscient de la structure à terme. Ce qu’il achète peut baisser automatiquement. Il y a des années, cela a décroché complètement et tant les conseillers que leurs clients n’avaient aucune idée pourquoi.”
Il ne lève pas le nez sur les placements alternatifs, mais optera pour des placements privés plutôt que des FNB alternatifs.