Steve Laberge

Green Shield Canada (Green Shield) a annoncé qu’en acquérant BCH Consultants (BCH) le 13 février, il bonifie son offre pancanadienne en santé mentale. Lors d’une entrevue exclusive accordée au Portail de l’assurance en compagnie de la directrice générale de BCH, Joanie Gauthier, Steve Laberge a confié que l’acquisition permet d’offrir au Québec « un réseau clinique mature et établi, pour répondre à la demande en termes de besoins en santé mentale ». Au terme de la transaction, Mme Gauthier est également devenue vice-présidente des services cliniques de Green Shield. 

L’offre au Québec en français est l’un des éléments majeurs de la transaction, ajoute M. Laberge, qui occupe depuis peu le poste de vice-président principal, affaires commerciales et leader Québec de Green Shield. M. Laberge occupait auparavant le poste de vice-président des solutions stratégiques de HBM+, division de technologie de Green Shield. À ce poste, il travaillait déjà à accélérer la pénétration de l’assureur et fournisseur de soins au Québec. Le poste est ouvert et M. Laberge prévoit y trouver un remplaçant dès le 1er avril 2023. 

Steve Laberge vante le réseau des 700 cliniciens de BCH. Ce réseau s’étend « aux quatre coins de la province », ajoute Joanie Gauthier, qui est aussi sexologue et psychothérapeute. Green Shield ne voulait pas avoir à développer un réseau de cette taille « une demande à la fois », explique M. Laberge. « Nous voulions le faire tout d’un coup pour accélérer notre entrée au Québec », dit-il. « Le leadership local et solide de Joanie était pour nous tout aussi important que le réseau » ajoute le leader du Québec de Green Shield. 

Les PAE au cœur de l’offre 

Joanie Gauthier

Joanie Gauthier a fondé son entreprise il y a 30 ans. Son offre de programmes d’aide aux employés (PAE) et de soutien organisationnel, ainsi que de services en ressources humaines, reflète les besoins qui l’ont vu naître à Rouyn-Noranda, dans la région de l’Abitibi-Témiscamingue. En PAE, BCH dessert entre autres 800 employés de Glencore Canada, qui exploite notamment la Fonderie Horne à Rouyn-Noranda. En plus des entreprises minières, BCH offre ses services à des organisations de divers secteurs. 

BCH Consultants offre aussi des services en anglais et des services de traduction, mais ce n’est pas le cœur de ses affaires, précise Mme Gauthier. « Nous avons des divisions hors Québec de nos grandes entreprises minières pour lesquelles nous sommes disponibles, mais notre concentration est au Québec », dit-elle. Sur son site, BCH dit compter plus de 100 000 bénéficiaires de ses programmes d’aide aux employés.

Augmenter la confidentialité 

La firme fondée par Joanie Gauthier a développé une offre de consultation en personne, par téléphone ou par visioconférence. La transaction avec Green Shield lui permet de gagner l’espace numérique, et rehausser son offre en région éloignée. Concentrée auprès des pôles métropolitains du Québec et en Abitibi-Témiscamingue, BCH Consultants assure par exemple une présence à Gaspé, sur la Côte-Nord et dans le nord du Québec auprès des Premières Nations, confie sa directrice générale. 

Mme Gauthier dit que l’offre à distance est cruciale dans les régions éloignées, où BCH Consultants ne déploie que peu de cliniciens. Elle prend l’exemple de Ville-Marie, municipalité aux abords du lac Témiscamingue qui compte environ 2 500 habitants. « Le professionnel est souvent connu. Les gens s’empêchent d’aller le consulter, parce que c’est le beau-frère ou la belle-sœur. L’anonymat est plus difficile en région. Le fait d’ouvrir les services en visioconférence et bientôt en numérique avec la plateforme Inkblot facilite l’accès », explique Mme Gauthier. Green Shield Canada a acquis la plateforme numérique Inkblot Technologies en 2021.

Fusionner les forces 

Inkblot est un programme d’aide aux employés principalement numérique, souligne pour sa part Steve Laberge. « Inkblot assure un volet de thérapie virtuelle, un peu comme la télémédecine. Joanie avait un modèle beaucoup plus en mode présentiel et téléphonique. Elle accède à une plateforme pour tirer parti des offres virtuelles et Inkblot obtient en échange un réseau en présentiel et de centrale téléphonique. Ensemble, les deux seront en mesure de répondre aux besoins de n’importe quel partenaire au Québec », explique M. Laberge.

Ce qui inclut selon ses dires les entrepreneurs nationaux qui veulent desservir leurs employés en français, au Québec et hors Québec. Steve Laberge ajoute que la transaction permet aussi à BCH Consultants d’accéder à l’offre de services numériques en thérapie cognitivo-comportementale (TCC). « Nous voulons éventuellement fusionner tous ces services dans une offre complète », révèle le vice-président de Green Shield. 

Joanie Gauthier estime en outre que passer sous le chapeau de Green Shield lui permet d’accéder à de plus grandes entreprises. Le fait d’être limitée au Québec jouait contre son entreprise au moment de répondre à des appels d’offres d’entreprises pancanadiennes, explique-t-elle. 

Le PAE demeure peu utilisé  

Plusieurs voix se sont élevées au fil des ans pour souligner que peu d’employés utilisent le programme d’aide aux employés (PAE) que leur offre leur employeur. La proportion des employés qui utilisent leur PAE a peu progressé, concède Joanie Gauthier qui observe dans ses activités un taux moyen d’utilisation de 8 % à 10 %. Elle dit s’être distinguée depuis 30 ans en raison de son modèle d’affaires axé sur la facturation à l’utilisation.

« C’était dans notre intérêt dès le départ de faire suffisamment de promotion à l’intérieur d’une entreprise pour que les gens viennent à nous », dit-elle. Dans les entreprises qui traitent avec BCH Consultants depuis longtemps, le taux d’utilisation peut atteindre de 12 % à 14 %, souligne sa directrice générale.

Mme Gauthier signale que dans le modèle traditionnel, les fournisseurs de programmes d’aide aux employés facturent des frais à leur client selon la taille de l’entreprise (nombre d’employés), sans égard au taux d’utilisation qu’obtiennent leurs programmes.

Hausse du nombre d’appels pour détresse 

Au sommet de la pandémie, nous avons observé une augmentation de 38 % du nombre d’appels chez nos clients. Les gens étaient encore plus en détresse. — Joanie Gauthier 

Grâce à son offre de services en ressources humaines, Mme Gauthier se dit en mesure de rester proche des organisations qu’elle dessert et de leur offrir de la formation connexe à l’implantation d’un programme d’aide. « Surtout durant la pandémie, nous avons donné beaucoup de formation sur la détection de la détresse en milieu de travail auprès de superviseurs et de chef d’équipe, pour qu’ils deviennent ambassadeurs du programme d’aide et s’en servent pour y recommander des employés qui n’auraient autrement pas consulté de thérapeute », illustre Mme Gauthier. 

Cette proximité tient BCH Consultants occupé, témoigne sa directrice générale. « Au sommet de la pandémie, nous avons observé une augmentation de 38 % du nombre d’appels chez nos clients. Les gens étaient encore plus en détresse. Je me spécialise auprès des gens d’affaires et des gestionnaires. On les voit tomber comme des mouches, parce qu’après avoir soutenu leur organisation à bout de bras, l’adrénaline se termine et c’est là que l’hypothèque émotionnelle se manifeste », relate Mme Gauthier. 

Des gens connaîtront alors l’épuisement professionnel et son cortège de problèmes personnels et familiaux : échec, séparation, détresse des enfants… « La bonne nouvelle, c’est que la situation collective que nous avons vécue a démocratisé la consultation. Avant la pandémie, je devais vendre le programme d’aide aux employés comme un bonus, une plus-value pour retenir les gens. Maintenant, c’est devenu un incontournable », lance Joanie Gauthier. 

Les utilisateurs de programmes d’aide de BCH se répartissent à peu près également entre femmes et hommes, mais les hommes tendent à attendre plus longtemps avant de consulter un professionnel, révèle Joanie Gauthier. « Les hommes vont attendre plus longtemps avant de consulter et arrivent en consultation plus hypothéqués que les femmes. La tendance change et nous travaillons fort là-dessus », insiste la directrice de BCH.