L’échéancier approche pour la fin de la transition vers les médicaments biosimilaires dans le régime public au Québec. Celle-ci avait été entreprise le 7 juillet 2021. Le ministère de la Santé avait fixé au 12 avril 2022 la date où ce passage doit être complété. Pour l’heure, ce calendrier est maintenu malgré la pandémie de COVID-19. 

D’ici le 13 avril 2022, tous les patients québécois présentement traités avec un médicament biologique de référence devront changer pour le biosimilaire correspondant lorsque celui-ci est inscrit sur la Liste des médicaments assurés par le régime général d’assurance médicaments. Les médecins québécois ont commencé à les prescrire après l’annonce du virage à l’été 2021. Depuis, beaucoup les ont déjà introduits dans leur médication, mais il est prévu que le processus de changement s’échelonne sur une période de dix mois afin de tenir compte des effets de la COVID-19. 

Trois exceptions sont prévues : les femmes enceintes devront effectuer cette transition dans les 12 mois qui va suivre leur accouchement ; les enfants dans les 12 mois suivant leur 18e anniversaire de naissance ; les patients qui ont vécu deux échecs thérapeutiques ou plus avec un médicament biologique utilisé pour la même maladie chronique. 

Des économies prévues de 100 millions 

Les médicaments biosimilaires sont utilisés en Europe depuis plus de dix ans. À ce jour, treize pays, dont la France, l’Allemagne, la Finlande, la Norvège, l’Irlande, le Royaume-Uni, le Danemark, les Pays-Bas et la Belgique, les ont adoptés. L’Union européenne (UE) a approuvé plus de 72 biosimilaires. 

Au Canada, l’utilisation des biosimilaires est approuvée depuis 2009. Ils sont utilisés pour le traitement de maladies chroniques telles que l’arthrite inflammatoire, le cancer, les maladies inflammatoires de l’intestin (maladie de Chron), le diabète et le psoriasis. Malgré la hausse du nombre de biosimilaires disponibles sur le marché, le Canada et les États-Unis restent à la traîne par rapport au marché européen en termes de nombre d’approbations et de disponibilité, constate le Conseil canadien d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB).

L’infliximab, le médicament biologique le plus vendu au monde, et l’un des premiers à être disponible au Canada, ne représentait que 20 % de la part des biosimilaires au pays en 2020, ce qui est bien inférieur à la médiane de 73 % de l’OCDE, précise le CEPMB. L’adalimumab, le deuxième plus vendu, ne comptait aucune vente au Canada en 2020 alors que son utilisation médiane est de 58 % dans le CEPMB et de 28 % dans l’OCDE. 

Au Canada, indique un rapport du ministère de la Santé, les ventes de biosimilaires n’ont atteint que 146 millions de dollars en 2018, soit 1,9 % du marché́ des médicaments biologiques. Le Québec ne fait pas mieux que le reste du pays. « Malgré la fin des brevets de plusieurs médicaments biologiques de référence depuis quelques années, le Québec, comme le reste du Canada, affiche des taux d’utilisation faibles de médicaments biosimilaires : 1 % en 2019 - 2020 », ajoute le ministère. 

Le train s’est toutefois mis en marche. La Colombie-Britannique (mai 2019), l’Alberta (novembre 2020) et le Nouveau-Brunswick (avril 2021) ont déjà̀ mis en avant des politiques de transition vers les médicaments biosimilaires. Le Québec a suivi à l’été 2021. Le Forum canadien des biosimilaires déplore toutefois qu’ils demeurent encore peu utilisés au Canada malgré leurs bienfaits démontrés aux plans clinique et financier. L’un des grands freins est que la substitution n’est toujours pas obligatoire.

Des assureurs ont néanmoins pris le virage. Green Shield Canada (GSC), mentionne le CEPMB, a lancé en 2018 un programme pilote qui ciblait les patients sous Remicade et Enbrel et réduisait le remboursement au prix du biosimilaire. La Sun Life a lancé son Programme de médicaments de référence (PMR) pour certaines classes thérapeutiques de médicaments afin de promouvoir l’utilisation de médicaments biosimilaires. La Pacific Blue Cross (PBC) s’est alignée sur l’Initiative sur les biosimilaires du Régime d’assurance-médicaments de la Colombie-Britannique visant à faire passer les patients sous médicaments d’origine coûteux à leurs versions biosimilaires. 

La transition québécoise 

Environ 55 000 patients québécois couverts par le Régime public d’assurance-médicaments (RPAM) sont visés par cette transition sur les 2,5 millions de personnes assurées par le régime public, précise-t-on à Québec. Le gouvernement entrevoit des économies annuelles de 100 millions de dollars grâce à ce virage. Au plan canadien, le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés a estimé que les régimes d’assurance-médicaments du Canada pourraient faire épargner au total de 332 millions à 1,81 milliard de dollars la troisième année suivant l’entrée d’un médicament biosimilaire dans une gamme de produits. 

Les prescripteurs québécois ont reçu la liste des patients visés par la transition vers les médicaments biosimilaires à l’été 2021 et devaient recevoir une liste à jour à la fin janvier 2022. Un porte-parole du ministère de la Santé a indiqué au Journal de l’assurance qu’une campagne de communication destinée au grand public sera effectuée dans les prochaines semaines afin de sensibiliser les gens à la date butoir du 12 avril pour les assurés du régime public. 

Trois associations de médecins spécialistes, l’Association des gastro-entérologues, l’Association des médecins spécialistes dermatologues et l’Association des médecins rhumatologues, ainsi que des associations de patients, ont été mises à profit pour s’assurer du succès de l’opération dans la province.