Le marché de l’assurance responsabilité civile vit des moments difficiles au Québec.
L’enjeu de la couverture des administrateurs et dirigeants retient de plus en plus l’attention, le Journal de l’assurance en ayant même fait sa une dans son édition de décembre 2020. La crise que vit ce segment a maintenant des effets sur le marché de l’assurance de la responsabilité professionnelle, révèle Catherine Lanctôt, vice-présidente principale et directrice régionale, groupe services financiers et service clients – spécialités, Aon.
En entrevue au Portail de l’assurance, Mme Lanctôt a rappelé que l’assurance de la responsabilité professionnelle (aussi appelée « erreurs et omissions ») se divise en trois grands segments : le créneau général, la construction, et les médias et technologies. La contagion que vit le marché de l’assurance A et D se situe surtout dans le segment de la construction de la responsabilité professionnelle, dit-elle.
« Pour tout le marché général de l’assurance erreurs et omissions, la concurrence entre assureurs demeure vive, même s’il n’y a pas beaucoup d’entrants », affirme Mme Lanctôt.
En construction, le problème est qu’un entrepreneur travaille avec plusieurs intervenants, ce qui peut venir gruger sa limite de garantie. « Les assureurs veulent moins embarquer dans le segment de l’assurance erreurs et omissions en construction, même en faux pooling », dit-elle.
Côté médias et technologies, ce sont plutôt les cyberrisques qui ont des répercussions sur l’assurance de la responsabilité professionnelle. « La ligne est très mince. On se retrouve avec une police à deux têtes dans certains cas, voire trois têtes, car des assureurs incluent aussi l’assurance des administrateurs et dirigeants », explique Mme Lanctôt.
Vu cette tendance à regrouper les risques, les assureurs revoient leur tarification, dit la vice-présidente d’Aon. C’est ce qui leur permet aussi de mieux gérer les limites de garantie offertes, dit-elle. Ces limites varient selon le segment d’affaires, mais aussi selon la sensibilité des données à protéger, précise-t-elle.
Les effets de la pandémie
Quant aux effets de la pandémie de COVID-19 sur le marché de l’assurance de la responsabilité professionnelle, l’incidence varie en fonction des couvertures. Mme Lanctôt remarque toutefois que les assureurs n’ont pas fait d’exclusions particulières liées au coronavirus pour l’assurance A et D. La donne est différente en responsabilité professionnelle.
« Ça va dans tous les sens dans ce segment. Les assureurs regardent ce qui peut être transmissible en fonction de ce que l’entreprise offre comme services », dit la vice-présidente d’Aon.
Elle donne en exemple les résidences privées pour personnes âgées. C’est un segment plus susceptible de générer des réclamations en responsabilité professionnelle en cas d’allégations de négligence.
« Un résident pourrait poursuivre la résidence s’il juge qu’elle n’a pas garanti sa sécurité comme il est stipulé dans son contrat de location. Ça pourrait être lié à la maladie découlant de la COVID-19, même si ce sont des choses généralement exclues. Toutefois, c’est différent pour les décisions qui ont été prises lors d’une éclosion et qui pourraient être contestées, comme une zone rouge séparée par un simple rideau de plastique », explique-t-elle.
Quant à l’assurance A et D, certaines catégories précises de PME demeurent plus difficiles à assurer à cause de la pandémie. C’est notamment le cas des centres d’entrainement ou encore des commerces de détail qui ont pignon sur rue, dit Mme Lanctôt.
Une autre catégorie particulière vivait déjà des problèmes avant la pandémie, soit celui des entreprises pharmaceutiques. « Il ne reste qu’un assureur prêt à assurer ces clients au Québec. Ce monopole fait en sorte que les primes sont exorbitantes. Ça influe sur le bilan de ces entreprises », dit la vice-présidente d’Aon.