Il n’y a pas que les courtiers en assurance de dommages qui sont appelés à vivre des transformations profondes à la suite du dépôt du projet de loi 150. Les représentants certifiés en assurance collective sont aussi visés.
Une disposition du projet de loi 150 pourrait rendre obsolète l’obligation de détenir un permis pour distribuer de l’assurance collective au Québec, a appris le Journal de l’assurance.
Dans un bulletin distribué à sa clientèle en novembre, et dont le Journal de l’assurance a obtenu copie, Lavery Avocats indique que le projet de loi 150 ferait en sorte que ferait en sorte que « l’adhésion à un contrat d’assurance collective ne serait plus un acte réservé au représentant en assurances de personnes » et que par ce fait même, « les contrats d’assurance collective pourraient dorénavant être offerts directement », indiquent les avocats Evelyne Verrier et Jean-Phillippe Joyal, dans ce bulletin.
L’article 238 du projet de loi 150 change tout
C’est ce qu’ils retiennent de l’article 238 du projet de loi 150, qui vient modifier l’article 3 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (LDPSF).
L’article 238 du projet de loi 150 se lit ainsi :
L’article 3 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers
(chapitre D-9.2) est modifié :
1 ° par la suppression, dans le deuxième alinéa, de « et est habilité à faire adhérer toute personne à un contrat collectif d’assurance ou de rentes » ;
2 ° par la suppression, dans le troisième alinéa, du paragraphe 1 °.
L’article 3 de la LDPSF largement amputé
Quant à l’article 3 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers, il spécifie actuellement que le représentant en assurance de personnes « agit comme conseiller en assurance individuelle de personnes et est habilité à faire adhérer toute personne à un contrat collectif d’assurance ou de rentes ». Le projet de loi 150 éliminerait la partie sur l’adhésion à un contrat collectif d’assurance et de rentes.
La porte grande ouverte aux non certifiés
Le projet de loi 150 fait ainsi en sorte qu’un assureur en collectif pourra former et demander à une personne physique, non certifiée, de distribuer son produit. Ce même projet de loi fait toutefois en sorte que la responsabilité de cette distribution incomberait aux assureurs, ce qui en inquiète plusieurs, selon ce qu’a indiqué Mme Verrier au Journal de l’assurance.
« C’est une réforme majeure de l’offre et de la distribution sans représentant. L’assureur sera responsable des actes de la personne physique qui distribue le produit pour lui. Ça soulève des inquiétudes », dit-elle.
Il vient ainsi renforcer l’article 65 du projet de loi 141, qui se lit ainsi : « L’assureur autorisé est responsable des actes visant la souscription d’un contrat d’assurance ou l’adhésion à celui-ci posés par les distributeurs ou des personnes physiques à qui ces derniers confient la tâche de traiter avec des preneurs ou des adhérents. »
En plus, l’article 135 du projet de loi 150 (voir son libellé plus bas), jumelé à certaines dispositions du projet de loi 141, va même jusqu’à éliminer le concept de vente sans représentant en assurance collective, qu’elle soit en assurance vie ou en assurance de dommages, explique Lavery dans son bulletin. Le concept de vente sans représentant serait alors réservé à l’assurance individuelle. Le projet de loi 141 faisait déjà passer à la trappe le guide de distribution sans représentant.
Aucune responsabilité pour le preneur ; l’assureur en hérite
D’un autre côté, elle dit entendre que des organismes de protection de consommateurs jugent la mesure insuffisante, puisque le preneur n’aura plus de responsabilités. « L’assureur absorbera 100 % de la responsabilité dans ce cas précis, car le preneur n’aura pas à le faire. Certains auraient souhaité une application plus large dans le cas d’une offre directe au public », dit Mme Verrier.
Elle souligne toutefois que cette disposition cible les institutions financières décrites dans l’article 1.5 de la Loi sur les assurances. Il se lit ainsi : « Une fédération et les sociétés mutuelles d’assurance qui en sont membres, le fonds de garantie dont ces dernières sont membres ainsi que toute autre personne morale ou société contrôlée par l’une ou plusieurs de ces sociétés mutuelles d’assurance ou cette fédération constituent un groupe. »
« Auparavant, l’assureur pouvait dire qu’il avait remis toute la documentation au distributeur. C’était du cas par cas. Ce ne sera plus le cas advenant l’adoption du projet de loi 150. L’assureur pourrait être responsable d’une faute du distributeur, même s’il l’a bien formé et que le produit a été bien distribué », dit Mme Verrier.
L’associée de Lavery croit qu’il faudra clarifier quel sera le cadre de cette distribution si le projet de loi 150 va de l’avant. « Si un consommateur a une plainte à l’égard d’un distributeur, est-ce qu’il s’adressera directement à l’assureur ? Probablement qu’il enverra sa plainte à toutes les parties impliquées. C’est toutefois l’assureur qui devra débroussailler tout cela », dit Mme Verrier.
Le libellé actuel de l’article 3 de la LDPSF (les passages soulignés appelés à disparaitre)
Le représentant en assurance de personnes est la personne physique qui offre directement au public, à un cabinet, à un représentant autonome ou à une société autonome des produits d’assurance individuelle de personnes ou des rentes individuelles d’un ou de plusieurs assureurs.
Il agit comme conseiller en assurance individuelle de personnes et est habilité à faire adhérer toute personne à un contrat collectif d’assurance ou de rentes.
Ne sont pas des représentants en assurance de personnes :
1 ° celui qui, pour le compte d’un employeur, d’un syndicat, d’un ordre professionnel ou d’une association ou d’un syndicat professionnel constitué en vertu de la Loi sur les syndicats professionnels (chapitre S‐40), fait adhérer au contrat d’assurance collective de personnes ou de rentes collectives un employé de cet employeur ou un membre de ce syndicat, de cet ordre professionnel ou de cette association ou de ce syndicat professionnel ;
2 ° le membre d’une société de secours mutuels, ne garantissant pas le versement d’une prestation dans le cas de la réalisation d’un risque, qui place des polices pour celle-ci.
L’article 235 du projet de loi 150
235. La Loi sur les assurances (chapitre A-32) est modifiée par l’insertion, après l’article 222.2, des suivants :
« 222,3. Un assureur qui conclut un contrat d’assurance collective doit remettre au preneur, en plus des attestations d’assurance visées à l’article 2401 du Code civil, un document destiné aux adhérents afin que ces derniers soient informés en temps utile des renseignements qui leur sont nécessaires à une prise de décision éclairée et à l’exécution du contrat.
Ces renseignements comprennent notamment :
1 ° l’étendue de la garantie considérée et quelles en sont les exclusions ;
2 ° les délais, conformes au Code civil, à l’intérieur desquels un sinistre doit être déclaré ainsi que ceux à l’intérieur desquels l’assureur est tenu de payer les sommes assurées ou l’indemnité prévue ;
3 ° l’information nécessaire à la formulation d’une plainte à l’assureur visée à l’article 285.29.
“222,4. L’assureur qui conclut un contrat d’assurance collective avec un preneur qui, selon le cas, lui est affilié ou fait partie de son groupe est tenu de veiller à ce qu’il remette le document prévu au premier alinéa de l’article 222.3 aux adhérents.
Un tel assureur est responsable des actes visant l’adhésion au contrat d’assurance collective posés par ce preneur ou pour le compte de celui-ci. Pour l’application du présent article, ‘groupe’ a le sens que lui donnent l’article 1.5 de la présente loi et l’article 3 de la Loi sur les coopératives de services financiers (chapitre C-67.3). ».
*Note de la rédaction: la version originale de cet article a été modifiée.