En étant parmi les premiers à lancer une couverture pour les drones, Intact Assurance croit être en mesure de se positionner à l’avant-plan dans ce segment. L’assureur dit aussi se positionner pour assurer tous les besoins d’une PME.

C’est au début de 2015 qu’Intact a amorcé sa réflexion pour lancer une assurance pour les drones, a indiqué Alain Lessard, vice-président, assurance des entreprises, d’Intact Corporation financière, en entrevue au Journal de l’assurance. « Nous avions quelques demandes. Nous avons aussi rencontré des courtiers à cet effet. »

Avant, il n’y avait pas de solutions simples pour assurer des avions, fait remarquer M. Lessard. Le drone tombe dans cette catégorie, ajoute-t-il.

« Il fallait aller dans le marché spécialisé, pour des drones qui valaient des centaines de milliers de dollars et qui pesaient des tonnes. Les marchés spécialisés n’étaient pas positionnés non plus pour les plus petits drones. On s’est donc demandé s’il y avait une opportunité pour nous. »

L’assureur avait des demandes au Québec, mais aussi dans l’Ouest canadien, où les drones commençaient à être utilisé pour surveiller des chantiers et des pipelines. Intact n’était toutefois pas en mesure de répondre aux besoins de ses clients entrepreneurs. « Ça reste un petit marché, mais avec une promesse d’évolution importante. Il nous fallait donc aller chercher une expertise », dit-il.

Rare expertise

Cette expertise était toutefois rare. Il souligne d’ailleurs que les articles publiés sur ce sujet par le Journal de l’assurance au début de 2015 ont permis d’alimenter la discussion chez Intact. « Nous avons formé un groupe de travail multidisciplinaire pour aller chercher cette expertise, où nous avons réuni des gens de souscription, de réclamations et d’actuariat », relate M. Lessard.

Ces gens ont alors fait de la recherche, contacté des réassureurs, discuté avec des pairs américains, en plus d’étudier toute la littérature disponible à ce sujet à travers le monde. « Ça a pris entre six et huit mois, mais nous étions prêts avant la fin de 2015. Ça ne faisait toutefois pas de sens de lancer un produit le 31 décembre, alors nous avons attendu que janvier avance pour le faire. »

Une des contraintes qu’Intact a rencontrées est qu’il existe des drones de diverses tailles. La règlementation les encadre de façon différente. S’il pèse moins de 2,5 kilogrammes, il n’est pas assujetti aux règlements de Transports Canada. Or, s’il fait plus de 25 kilogrammes, il est régulé comme un avion, avec les contraintes qui viennent avec. Entre les deux, les règles demeuraient floues.

« Compte tenu des besoins de nos clients, nous avons ciblé les drones de moins de 25 kilogrammes, soit ceux qui servent à faire de la photographie aérienne notamment. On gardait en tête qu’ils pourront servir pour transporter des biens dans le futur », dit M. Lessard.

Il n’existait toutefois aucune autre statistique dans le monde pour chiffrer le risque que pose un drone. Intact a donc dû appuyer ses hypothèses actuarielles sur des dires d’experts.

Établir une sévérité et une fréquence

« Il fallait établir une sévérité et une fréquence. Quelles pouvaient-elles être, tant pour la responsabilité civile que pour les dommages matériels? Pour les dommages matériels, ce ne fut pas trop un problème, car on connait la valeur du drone. Pour les dommages corporels, on s’est demandé ce qui pouvait arriver à un drone. Par exemple, il peut frapper une maison. À telle vitesse, on a pu faire des proxys pour établir la sévérité. On a de l’expertise là-dessus. Il fallait toutefois établir le risque lié à des poursuites. On a donc terminé avec plusieurs proxys sur la sévérité », relate M. Lessard.

Établir la fréquence a été une autre paire de manches. « C’est ce qui nous a donné le plus de difficultés. On a lu tout ce qui se pouvait sur le sujet. Nous avons contacté des clubs d’avions téléguidés pour voir le type d’écrasements que leurs engins avaient. Combiné à la littérature, nous avons établi ce que nous pensions qui était le meilleur estimé possible de la fréquence de sinistres. On lance le produit et on pourra s’ajuster au fur et à mesure. On a fait la meilleure tarification que l’on pouvait à partir de dires d’experts. On ne croit toutefois pas que tous nos clients en assurance des entreprises auront besoin d’une couverture pour les drones », dit-il.

C’est à partir d’un avenant qu’Intact offre sa couverture pour les drones. « Il n’y a pas besoin de souscrire une police séparée. L’avenant peut s’ajouter avec le courtier. Ça enlève l’exclusion liée à l’aviation. Ça ne nécessite plus le besoin de recourir au marché spécialisé. Notre produit ne vise pas à assurer des compagnies de drones. On vise les gens qui utilisent des drones dans leurs activités régulières. Les courtiers immobiliers font maintenant appel à des photographes professionnels. Certains utilisent des drones pour obtenir de meilleures prises de vue. Ça représente une petite opération dans l’ensemble des activités de ce photographe », dit M. Lessard.

Des exemples qui se multiplieront

Il donne aussi l’exemple de fermiers qui font des cultures maraichères. « Ils doivent faire attention à ce que leurs champs ne soient pas infestés de parasites. Si le problème n’est pas pris à temps, ils peuvent perdre 10 % à 15 % de leurs récoltes. Marcher leurs terres peut toutefois être une opération de deux semaines. Alors ils embauchent 15 personnes pour le faire. Avec un drone, ça réduit ce cout », dit-il.

Intact prend le pari que ce type d’exemples se multiplie dans le futur, notamment pour en transport. « On accumule de l’info. Nous avons réfléchi à voir ce que pouvait être notre positionnement. Il faut aussi positionner le tout à l’échelle d’Intact. Ce n’est pas un risque qui est très grand pour notre entreprise. Ça ne nous mettra pas en faillite », dit M. Lessard.

Un client qui ne traite pas avec Intact et qui voudrait la couverture des drones devra tout d’abord s’adresser à son courtier. M. Lessard spécifie d’ailleurs que tous les courtiers seront habilités à offrir le produit. Toutefois, lorsqu’Intact offrira une soumission, ce sera pour tout le portefeuille du client.

« Dans notre stratégie de croissance en assurance des entreprises, nous sommes rendus au point où nous voulons offrir une multitude de lignes, notamment le transport, l’agricole, etc. On veut aussi être en mesure de couvrir l’ensemble des besoins de l’entrepreneur. On veut se donner la possibilité de le couvrir entièrement. Avec la couverture pour les drones, nous avons voulu créer un produit simple, ciblé sur la clientèle que nous avons, soit les PME. Ça se marie très bien et le produit complète bien ce que nous avons. Il nous faut répondre aux besoins de nos clients dans un marché changeant. Il y a beaucoup d’évolution dans la société et la technologie prend plus de place. Il faut être au courant des changements qui occurrent. S’il faut ajuster nos couvertures, comme ce fut le cas pour les drones, nous le ferons. »