Cet été, Manuvie s’est fixé un objectif ambitieux : libérer d’ici 2022 l’équivalent de 5 milliards de dollars (G$) de ses blocs d’affaires patrimoniaux (legacy business). Un premier jalon de cette quête a été annoncé le 1er novembre dernier.
Manuvie a ainsi fait savoir qu’elle avait réassuré pratiquement tous ses anciens produits de rentes individuelles et collectives aux États-Unis, ainsi que les risques liés à la mortalité et aux déchéances sur une partie de ses anciens contrats d’assurance vie universelle canadiens.
Le détail des portefeuilles réassurés
• Rentes collectives américaines ; 8 G$ d’obligations réassurées auprès de Jackson National Life Insurance Company ;
• Rentes individuelles américaines : 4 G$ d’obligations réassurées auprès de RGA Reinsurance Company ;
• Risques de mortalité et de déchéance d’anciennes polices d’assurance universelle canadiennes : 1 G$ d’obligations réassurées auprès de RGA Compagnie de réassurance vie du Canada.
Résultat de l’opération : Manuvie libèrera 1 G$ de capitaux d’ici un an. Une tranche de 35 millions de dollars (M$) de capital a été libérée au troisième trimestre de 2018. Une autre tranche de 585 M$ de capital devrait être libérée au quatrième trimestre de 2018. Puis, une autre tranche de 470 M$ devrait l’être au cours des 12 prochains mois, tenant compte de l’optimisation des portefeuilles d’actifs américains survenue après les transformations.
L’objectif de Manuvie
Il reste donc 4 G$ à libérer d’ici 2022. Si on se fie à ce que l’assureur a dévoilé lors de sa journée de l’investisseur en juin, Manuvie poursuivra ce type de transactions, mais fera aussi fructifier ces portefeuilles dormants. Les 5 G$ que souhaite gagner Manuvie représentent 20 % des capitaux protégeant ses affaires patrimoniales, avait révélé son PDG Roy Gori, lors de la Journée de l’investisseur de l’assureur.
Naveed Irshad, chef de portefeuille d’affaires patrimoniales de Manuvie en Amérique du Nord, dirige l’opération. Cet été, il a dévoilé quelles questions guidaient l’assureur dans sa réflexion pour chaque segment de blocs patrimoniaux qu’il possède :
• Est-ce que ce bloc répond à nos objectifs à long terme ?
• Y écrit-on de nouvelles affaires ?
• Quel est l’impact financier de ce bloc sur nos bénéfices, nos réserves de capitaux et notre rendement de l’avoir des actionnaires ?
• Atteint-il nos cibles de rendement dans l’environnement actuel ?
• Quel est son profil de risque ? Cadre-t-il avec notre appétit de risques ?
• Quels risques présente ce bloc en matière d’équité, de taux d’intérêt et d’assurance ? »
Quatre blocs distincts
Le bloc d’affaires patrimonial de Manuvie se divise en quatre blocs :
• Produits de soins de longue durée aux États-Unis ;
• Rentes variables aux États-Unis et au Canada ;
• Produits d’assurance vie dont la vente est suspendue au Canada et aux États-Unis ;
• Rentes fixes au Canada et aux États-Unis.
« Il ne faut pas voir ces portefeuilles comme étant de mauvais actifs, dit M. Irshad. On y retrouve plusieurs profils de produits. Certains génèrent des rendements à court terme, d’autres à long terme. Certains ont des taux de rendement plus satisfaisants que d’autres. De plus, comme nous opérons désormais sous le régime des nouvelles normes comptables (IFRS), il nous faut faire de meilleures hypothèses. En assurance, on les révise en profondeur aux trois ans. »
Options inorganiques à privilégier
Pour atteindre cette cible de 5 G$, Manuvie affirme qu’elle préfèrera avoir recours à des options inorganiques. Cela comprend la vente de certains blocs patrimoniaux ou encore d’en céder les risques en réassurance, comme Manuvie vient de le faire pour certains d’entre eux.
« Nous évaluons nos options en fonction de divers paramètres. Le but principal est d’amener de la valeur à nos actionnaires, a commenté Naveed Irshad, au début de l’été. On voit aussi beaucoup d’intérêt pour certains de nos blocs patrimoniaux. Il y a eu plusieurs transactions impliquant des rentes fixes, en risque de longévité et même des rentes variables notamment. Nous avons d’ailleurs réassuré cet été les risques de mortalité liés à un portefeuille de polices d’assurance vie universelle au Canada, qui totalisait un volume de 240 M$, ce qui nous a permis de libérer 11 M$ de capitaux à maintenir. »
C’est un montant modeste, reconnait M. Irshad. Manuvie juge qu’il y a un intérêt à prendre cette voie. Ça ne veut pas dire que toutes les transactions que nous ferons en ce sens nous seront favorables à ce point. Nous sommes toutefois dans un processus où nous discutons avec beaucoup de joueurs.
Manuvie fera aussi une gestion organique de certains blocs patrimoniaux, dit M. Irshad. Parmi les solutions retenues, particulièrement pour les affaires de soins de longue durée, on retrouve notamment une hausse des taux, des initiatives de réduction de risques ou encore de gestion des réclamations.
« Notre plan est ambitieux, convient M. Irshad. Nous avons la bonne équipe en place pour le mener. On évalue tout et on travaille à poser les bons gestes pour générer de la valeur. »
Portrait de la situation demain
Manuvie présentera un état de sa situation financière demain mercredi, alors que la compagnie divulguera ses résultats du troisième trimestre de 2018. L’an dernier, Manuvie avait présenté un bénéfice net de 1,1 G$ au troisième trimestre de 2017. Au second trimestre de 2018, son bénéfice net était de 1,262 G$.