Peu d'assureurs disposent d'une stratégie pour mesurer les impacts des changements cli­matiques sur leurs affaires. Pire, ils ne semblent pas pressés d'en avoir une. C'est la conclusion à laquelle en vient Ceres, une coalition d'investis­seurs, de groupes environnementaux et d'orga­nismes publics, qui a recensé les 88 plus impor­tants assureurs américains sur la question.L'organisme a découvert que seuls onze d'entre eux avaient une politique pour faire face aux me­naces posées par les changements climatiques. Et encore, seulement trois assureurs ont une straté­gie explicite pour les intégrer dans la gestion de leurs investissements en tenant compte d'enjeux sociaux, environnementaux et de gouvernance. Il s'agit d'AXA, Chartis et Swiss Re.

« Les résultats de notre étude sont à la fois éclairants et désillusionnants, affirme Mindy Lub­ber, présidente de Ceres. Il y a un large consen­sus dans l'industrie selon lequel le changement de climat aura des effets sur les événements météorologiques extrêmes. Or, peu d'assureurs ont un plan cohérent pour gérer ce risque et les occasions qui en découleront. »

Ceres fait remarquer que les assureurs ayant les plus grands moyens investissent des sommes considérables pour comprendre les risques posés par les changements climatiques et développer des stratégies pour y faire face. Toutefois, les joueurs de petite taille, qui représentent une grande part de l'industrie américaine, font peu. Autre inquiétude des régulateurs selon Ceres, les compagnies les plus vulnérables sont souvent celles qui sont dans des segments de marché proches des consommateurs.

Selon Ceres, les impacts des changements cli­matiques n'auront pas uniquement trait aux catas­trophes naturelles. Les assureurs de personnes seront aussi touchés. Ils seront plus exposés à certains phénomènes, tels des sécheresses prolongées. Ils pourraient aussi être victimes de la prolifération de certaines maladies propagées par des insectes. Les poursuites en responsabilité pourraient aussi s'accumuler en 2011. D'ailleurs, Ceres en a recensé 120 en 2010 dans son son­dage.

L'étude de Ceres montre aussi que les assureurs se sont plus attardés aux impacts des change­ments climatiques dans les régions côtières, vu les ouragans. Or, plusieurs désastres ayant couté des milliards de dollars sont survenus depuis le début de 2011 aux États-Unis, avant même qu'un seul ouragan touche terre. Les inondations, tor­nades et vagues de chaleur ont déjà causé pour 35 milliards de dollars américains en dommages depuis le début de l'année.

Selon Ceres, les impacts des changements climatiques vont bien au-delà de la viabilité finan­cière de l'industrie. Si les assureurs ne font rien, c'est la disponibilité et l'accessibilité des produits d'assurance qui seront en jeu. La performance de l'industrie, qui possède des investissements de 23 trillions de dollars américains, pourrait être compromise.

« Ces développements montrent que le modèle d'affaires des assureurs doit changer, dit Shar­lene Leurig, directrice principale du programme d'assurance de Ceres, qui a écrit l'étude. Mon rapport dépeint une industrie qui, à part quelques grands assureurs, ne prend que des moyens mar­ginaux pour adresser un enjeu qui met en péril sa santé financière, ainsi que la disponibilité et l'ac­cessibilité de l'assurance aux consommateurs. »