Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a condamné Richard Powers (certificat no 127 772), le 8 septembre dernier, à cinq années de radiation temporaire et à des amendes totalisant 15 000 $.

L’intimé a reconnu sa culpabilité aux quatre chefs d’accusation. L’audience tenue le 12 avril dernier a permis aux parties de présenter leurs recommandations sur la sanction.

L’intimé, qui détenait des certificats dans les disciplines de l’assurance de personnes et les régimes d’assurance collective, était attaché au cabinet Les Assurances Richard Powers, dont il était dirigeant et actionnaire majoritaire. Une partie des actions qu’il détenait appartenait à sa compagnie de gestion, Gestion Richard Powers. Âgé de 65 ans, il travaille dans le domaine de l’assurance depuis 1979.

Il n’a plus de certificat depuis le 24 mars 2021 et il n’est désormais plus actionnaire majoritaire du cabinet, dont la propriété a été transmise à son fils, Anthony Powers.

Les infractions

Pour les deux premiers chefs d’accusation, les infractions retenues contreviennent à l’article 18 du Code de déontologie de la Chambre. Pour le chef 1, on lui reproche de s’être placé en situation de conflit d’intérêts en prêtant à son client une somme d’au moins 10 000 $ par le biais de Gestion Richard Powers. L’infraction a eu lieu de février 2005 à octobre 2017. L’intimé est condamné à trois années de radiation temporaire et à une amende de 10 000 $.

Il s’est encore placé en situation de conflit d’intérêts dans le cadre du transfert de deux polices au Groupe Laropo en mars 2010 (chef 2). Ce geste est puni par une période de deux années de radiation temporaire.

Les peines de radiation seront purgées de façon consécutive, pour une durée totale de cinq années. La sanction sera exécutoire advenant le cas où l’intimé demande la remise en vigueur de son certificat.

Pour les chefs 3 et 4, les infractions retenues sont proscrites par l’article 35 du Code de déontologie. Dans le cadre du transfert de polices mentionné au chef 2, sur le formulaire de modification, l’intimé a inscrit « homme clé » comme lien entre le nouveau propriétaire de la police et l’assuré, ce qui était inexact à la connaissance de l’intimé (chef 3). Cette infraction est punie par une amende de 2 500 $.

En novembre 2014, l’intimé a complété une demande de changement de police désignant l’un des autres actionnaires de la société 9065-7222 Québec inc. comme nouveau propriétaire de la police. Les bénéficiaires de la police étaient Gestion Powers et cette même société à parts égales. Au formulaire de changement de titre de cette police, l’intimé a indiqué « affaire » comme lien entre les bénéficiaires et l’assurée, alors qu’il savait que cette information était inexacte (chef 4). L’intimé est puni par une autre amende de 2 500 $.

Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions alléguées au soutien de la plainte. L’intimé est condamné au paiement des déboursés et des frais de publication de l’avis disciplinaire. Cette publication ne sera faite que si l’intimé demande à revenir à la profession.

Sanctions recommandées

Le syndic recommandait au comité d’imposer des peines de radiation de cinq ans pour les chefs 1 et 2, un an de radiation pour les chefs 3 et 4, et une amende de 25 000 $ pour le chef 1. La durée totale de la radiation demandée était de 10 ans.

Le procureur de l’intimé demandait des amendes ou des réprimandes pour chacun des chefs. Il réclamait aussi une dispense de publication de l’avis prévu à l’article 156 du Code des professions. L’intimé alléguait que la publication de l’avis pouvait se répercuter sur le cabinet désormais détenu par son fils. Comme cet avis ne sera publié que si l’intimé reprend la pratique, sa crainte est « purement hypothétique » et le comité rejette sa demande.

Avantage pécuniaire

Dans le cas du prêt mentionné au chef 1, le client connaissait des difficultés financières. L’intimé a prêté 10 000 $ en plus d’assumer les primes des deux polices de ce client. En contrepartie, Gestion Powers est devenu propriétaire et bénéficiaire à 100 % de ces deux polices. Le client pouvait récupérer la propriété de ces polices en remboursant le prêt et les avances de primes, avec les intérêts. Le client est décédé en septembre 2017 et Gestion Powers a empoché une somme totale de près de 559 000 $.

Le comité indique qu’il ne peut ignorer l’avantage pécuniaire important dont l’intimé a tiré profit. Les héritiers du client n’ont rien eu, même si l’assuré avait payé des primes pendant 8 ans pour l’une des polices et pendant 12 ans pour l’autre.

Autre conflit d’intérêts

Les polices mentionnées au chef 2 ont été souscrites en février 2000 par la compagnie G.T.I. sur la vie de l’un de ses employés, E.A. Cet employé a été congédié en 2004. Parallèlement, l’intimé avait investi 120 000 $ dans G.T.I. par l’entremise d’un prêt à la société de gestion S.N.M.L., elle-même actionnaire de G.T.I. À la suite d’une débâcle financière, cette compagnie est devenue insolvable. Avec l’accord du dirigeant de G.T.I., les polices détenues sur la vie de l’employé ont été transférées à la société de gestion G.L. à titre de propriétaire et bénéficiaire. L’intimé est président et administrateur de G.L. et Gestion Powers est aussi l’un des trois actionnaires. Peu de temps après ce transfert, G.T.I. a été dissoute.

Le comité note qu’aucune somme n’a été versée à qui que ce soit en vertu de ces polices, mais l’intimé est toujours bénéficiaire de l’une de ces polices à hauteur de 500 000 $.

Au chef 3, la mention « homme clé » sur cette police était inexacte au moment du transfert, survenu plusieurs années après le congédiement de l’assuré, lequel n’avait aucun lien avec les firmes concernées. Au chef 4, la mention « affaire » comme lien entre les bénéficiaires et l’assuré était inexacte pour la même raison.

« Il est évident qu’en inscrivant ces renseignements erronés, M. Powers agissait de façon préméditée pour éviter tout questionnement au sujet de l’intérêt assurable sur la vie d’E.A. », écrit le comité.