Le cabinet d’expertise en règlement de sinistres Authentik, basé à Boisbriand dans la région des Laurentides, fait désormais partie du Groupe CRU (Catastrophe Response Unit). Cette société établie à Dallas, au Texas, exploite son principal établissement canadien à Toronto.

La transaction a été annoncée ce mardi 28 octobre. En entrevue avec le Portail de l’assurance, les deux dirigeants d’Authentik, Jonathan Fradet et Suzie Godmer, se veulent rassurants.
« Nos employés ont été rencontrés hier, tout le monde demeure en poste et ils sont contents de participer à ce nouveau défi », indique Mme Godmer, vice-présidente de l’entreprise et partenaire de Jonathan Fradet depuis 2017.
L’entreprise garde sa raison sociale, mais devient une société du Groupe CRU. Il se joint à une entreprise qui a des ambitions à l’échelle nationale.
Le cabinet Authentik a été fondé en 1976 et a longtemps été exploité sous le nom de Gouin, Perreault, Cloutier et Associés. Jonathan Fradet a lui-même joint l’entreprise en 2008, avant d’en devenir partenaire en 2012. Il en est devenu le président en 2017. Authentik emploie des experts dans les régions de Montréal, de Québec et de l’Outaouais et peut exécuter des mandats partout au Québec.

« Le rapprochement de ces deux excellentes entreprises nous permettra de mieux servir nos clientèles respectives », indique David Repinski, chef de la direction du Groupe CRU, en se réjouissant de pouvoir ajouter le cabinet québécois au sein de l’entreprise.
Le Groupe CRU est membre du réseau mondial d’expertise Context International. Par l’entremise de sa division Maltman International, l’entreprise fournit aussi des services spécialisés d’administration déléguée (TPA, pour third-party administrator).
Des valeurs communes
« Nous n’étions pas à vendre, nous n’étions pas rendus là nécessairement. Nous pensons que nous avons encore beaucoup de choses à accomplir », explique Jonathan Fradet.
Les deux dirigeants du Québec se voient d’ailleurs confier le mandat du développement des affaires au Nouveau-Brunswick et dans les autres provinces de la région de l’Atlantique.
Plusieurs des grands joueurs nationaux avaient approché les dirigeants d’Authentik ces dernières années. « Avant même qu’on parle d’argent, on avait une liste de critères à vérifier. La checklist était longue si on voulait entreprendre une discussion », poursuit-il.
Les discussions avec l’acquéreur intéressé ont commencé à la fin du printemps dernier. « On ne voulait pas se faire avaler par un grand cabinet national pour se faire tasser par la suite, on n’était pas là du tout », dit-il.
Plusieurs fois lors de l’entretien, M. Fradet insiste sur l’importance des valeurs partagées par les deux entreprises. « C’est aussi une entreprise familiale, fondée en 2004. Nous avons rencontré le fondateur, Gary Winston, avec son PDG David Repinski. Rapidement, nous avons vu le genre d’entreprise que c’était; nos valeurs étaient alignées. Ça nous a intéressés de les écouter un peu plus », dit-il.
L’acquisition permet à Authentik de poursuivre ses ambitions de croissance, en lui ouvrant des portes et en lui donnant de nouveaux comptes qui sont plus difficiles à obtenir. « Il s’agissait de trouver le bon partenaire et il s’est présenté. Nous joignons nos forces. Leur modèle d’affaires est vraiment dirigé sur la gestion des catastrophes. Nous sommes plus dans la gestion des sinistres sur une base quotidienne, le “day-to-day business”. Cette fusion de nos forces respectives nous permet de créer quelque chose de plus grand », indique M. Fradet.
De son côté, Suzie Godmer souligne que son cabinet a une expertise locale du marché du Québec et peut exécuter des mandats pour tous les assureurs. La transaction permettra à l’entreprise de discuter avec des assureurs nationaux qui veulent établir des partenariats avec des fournisseurs qui peuvent les servir partout au pays.
« Notre mandat est de développer l’est du Canada. On travaillera avec les collègues dans l’ouest du pays et de l’Ontario afin de servir d’autres marchés qui ne nous étaient pas accessibles », précise-t-elle en parlant notamment des syndicats d’assureurs établis à Londres.
Le recrutement
Jonathan Fradet donne l’exemple des sinistres importants, notamment les feux de forêt dans les provinces de l’Ouest canadien, comme étant une occasion pour les experts en sinistre du Québec de diversifier et développer leurs connaissances. « Nos gens auront l’occasion de se déplacer ailleurs au pays en cas de besoin, quand les affaires sont plus au ralenti ici. En matière de formation et de développement, c’est très intéressant », dit-il.
Les conditions de travail dans cette profession sont difficiles, avec des horaires atypiques et des périodes très achalandées. « Si je veux avoir du personnel prêt à intervenir en cas de catastrophe, il faut que je puisse leur garantir du travail durant toute l’année, et c’est là que les mandats plus petits, qui nous occupent au quotidien, sont importants », souligne M. Fradet.
Le principal défi de l’expertise en règlement de sinistre est le recrutement et la formation du personnel. « Il faut faire connaître la profession si on veut former une relève. Autrefois, les assureurs formaient les experts en sinistre et, après un certain temps, les vétérans créaient leur propre cabinet indépendant. Ce modèle-là n'existe plus », raconte le dirigeant d’Authentik.
Désormais, plusieurs enquêteurs ou experts peuvent intervenir dans un même dossier de réclamation sans en avoir une vue d’ensemble, chacun ayant son expertise dans une tâche particulière.
« Chez Authentik, la majeure partie de notre équipe de 25 personnes, ce sont des experts en sinistre âgés de 25 à 35 ans, avec 6 à 8 ans d’expérience. Nous avons investi beaucoup dans la formation, le mentorat, parce que nous avons compris que pour assurer la pérennité de l’entreprise, il faut former nos experts. Et parce que cela devient de plus en plus difficile d’en recruter chez la concurrence », affirme-t-il.
Les compétences
Selon Suzie Godmer, le Groupe CRU a des ambitions nationales, mais pas nécessairement pour devenir la plus grande firme au pays. « La qualité de nos experts prime sur la quantité. On mise sur la formation et le mentorat. On veut devenir la référence en matière de service aux clients et aux assurés », dit-elle.
Les perspectives de croissance dans les provinces de l’Atlantique sont intéressantes, selon Jonathan Fradet. « Le territoire est grand et le bassin de population est plus petit. Même pour les mandats plus petits, ce n’est pas toujours facile de trouver des experts. La demande est là, même en dehors des sinistres catastrophiques », dit-il.
« On va développer le marché à notre manière. On prend le temps de trouver les bonnes personnes, puis on les forme. Ce qui prime, c’est la qualité de la personne, car les compétences techniques, ça peut s’acquérir. Les gens qui ont des compétences interpersonnelles, c’est plus difficile à trouver. Si on en trouve, on s’occupe de bien les former », poursuit-il.
En instaurant un esprit de collégialité et en maintenant une culture d’entreprise familiale, on peut faire grandir l’équipe, selon lui. Cet esprit de collaboration est le même au sein du groupe dont le cabinet fait désormais partie. Au fil des derniers mois durant ses échanges avec la haute direction du Groupe CRU, le président d’Authentik n’a pas senti fléchir son enthousiasme du départ.
« L’impression que j’ai eue au départ est toujours là, indique Jonathan Fradet. L’avenir nous le dira, mais comme nous partageons les mêmes intérêts et les mêmes valeurs. C’est à nous maintenant de continuer à faire notre travail, et on est certain d’avoir du succès. »
« On a discuté avec nos meilleurs clients, et la réaction est très positive », conclut Suzie Godmer.