Dans un contexte où la main-d’œuvre se fait rare, il serait logique de soigner les gens actifs en premier, pour qu’ils retournent le plus rapidement possible sur le marché du travail.Claude Leblanc se dit toutefois conscient que son idée risque d’en rebuter plusieurs.

« C’est déjà le cas si vous souffrez d’une incapacité couverte par la CSST. Les victimes d’accidents de travail passent devant les autres, le gouvernement l’autorise. Pourquoi ne le fait-on pas aussi pour favoriser le retour au travail de tous les gens qui sont malades, peu importe la raison? À un moment donné, il faudra mettre un peu de réalité économique dans le triage des patients. »

Il admet que le politicien qui avancerait une telle idée ne gagnerait pas de concours de popularité. « Mais au Québec, 40 % des gens ne paient pas d’impôts. Ils veulent être au début de la file d’attente, c’est normal. Mais pour les autres, les 60 % qui paient des impôts, s’ils ne travaillent pas parce qu’on tarde à les soigner, ça représente un double fardeau pour les finances publiques », insiste M. Leblanc.

M. Leblanc souligne que les gens sont néanmoins de plus en plus conscients des limites du système public de soins de santé. Durant les premières années suivant l’instauration de l’assurance maladie au Québec, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) faisait suivre des relevés aux patients qui avaient été hospitalisés.

« C’était écrit PAYÉ, mais on savait combien ça venait de couter. La RAMQ a arrêté de le faire. Cela a contribué à enlever la conscience du cout des soins de santé. On ne peut pas conditionner une population à comprendre les couts si on ne leur explique jamais ce qu’il en est. »

Autre aspect plus inquiétant touchant le vieillissement, c’est que fort peu de gens planifient leurs besoins d’épargne-retraite, notamment en fonction du cout du maintien au domicile, par exemple. « Les gens sous-estiment leurs dépenses de santé. Comme les besoins augmentent en vieillissant, on peut facilement imaginer se retrouver à devoir payer plusieurs milliers de dollars par année sans être gravement malade, juste pour le maintien à domicile. Peu de gens ont prévu de telles sommes dans leur contrat d’assurance. »

C’est le genre de sujet que l’on évite soigneusement d’aborder en campagne électorale, ajoute-t-il. « On s’attend à ce que l’État paie tout, tout le temps, parce que ça fait 40 ans que c’est comme ça. Mais est-ce que ce sera toujours le cas? Nous n’en savons rien. »