Au printemps 2019, la boulangerie Vachon de Ste-Marie-de-Beauce avait été lourdement endommagée par la crue de la rivière Chaudière. La production de ses célèbres petits gâteaux avait été interrompue durant plusieurs semaines.

Elle a pris les moyens pour ne pas revivre ce sinistre majeur en 2020.

Elle est devenue la première usine au Québec à se protéger par des sacs de digues anti-inondations Citadel vendus par l’entreprise montréalaise Distribution GFS Canada.

À quelques semaines de la fonte des neiges, une partie de la façade de Vachon est déjà retranchée derrière quelques dizaines de ces gros sacs de 3 pieds cubes qui contiennent une tonne métrique de sable. Chacun de ces gros ballots pèse 2 000 livres et pour assurer une meilleure protection des installations, deux rangées de profondeur ont été installées à la base et deux autres en hauteur.

« Il n’y a pas une crue des eaux qui est capable de déplacer une telle masse », affirme le président de Distribution GFS Canada et Digues Citadel, Jean-François Cloutier.

Un brevet d’origine allemande

Les sacs de digues anti-inondations que vend Distribution GFS Canada sont issus d’un brevet d’origine allemande. L’entreprise québécoise les a distribués sous licence au Canada pendant sept ans, mais après la fermeture du fabriquant européen, Distribution GFS a fait améliorer le produit et sa production. Elle les fait maintenant fabriquer ici au Québec, dans la Beauce par surcroît, une région où de nombreuses municipalités et entreprises ont été fortement affectées par les inondations en 2019.

Le sac est fabriqué en polypoprylène par Tremac, une PME de St-Joseph qui conçoit des emballages pour le milieu agricole. La structure de bois qui sert à solidifier et à stabiliser le compartiment est faite par Bois Innovex, de St-Georges, qui assemble le produit final.

Lors de leur installation, les sacs sont réunis en groupe de cinq formant un segment de 15 pieds pourvus d’une structure autoportante. Le remplissage de sable se fait directement chez le client au moyen d’une mini-pelle mécanique, mais plus facilement encore avec un convoyeur. Remplir 600 sacs exige à peine deux heures de travail.

Assemblés en largeur, en hauteur ou les deux, les sacs réunis forment une digue des plus robustes. Quand ils sont érigés en structure pyramide pour contenir l’eau, ils peuvent atteindre neuf pieds de hauteur. S’ils font rempart contre les inondations, ils ne sont pas parfaitement étanches à la base. Selon la surface sur laquelle ils sont installés, sol dur, mou, asphalte, un peu de liquide peut ruisseler, mais c’est minime comparé une infiltration au sous-sol d’une énorme quantité d’eau.

Vendus en lots de 1 772 pieds linéaires

Inutile toutefois de vous rendre dans une quincaillerie Canac ou Patrick Morin pour en trouver. Les sacs de digues Citadel sont uniquement vendus par lots de 1 772 pieds linéaires, ce qui représente 600 sacs de sable. Le cout de la commande sans le convoyeur est de 59 400$ et 62 400$ avec le convoyeur.

En raison de leur prix élevé, ils sont surtout destinés aux MRC et aux municipalités qui veulent protéger des installations ou des zones inondables à risques. L’usine Vachon à Ste-Marie-de-Beauce a été la première entreprise privée en s’en procurer. À Pierrefonds, dans l’ouest de l’île de Montréal, un complexe de 100 condominiums en a achetés pour relever le terrain et fabriquer une digue qui a ensuite été recouverte de gazon.

Ils peuvent donc être installés de façon permanente à certains endroits, mais règle générale, indique Jean-François Cloutier, les sacs de digues anti-inondations commandés par les municipalités sont à usage unique. Ils ne sont pas démontés, entreposés et réutilisés le printemps suivant.

L’eau des crues est contaminée par des eaux d’égouts, des fosses septiques et autres matières, ce qui les rend impropres au même usage une deuxième fois. Tout le sac et son contenu peut être broyé pour être recyclé et des villes s’en servent comme fond de sol lors de la rénovation de rues ou de routes.

Distribution GFS Canada ne tient pas d’inventaire. Elle ferme son carnet à l’automne et livre ses sacs en janvier, février ou mars.  Elle fait fabriquer l’équivalent de huit conteneurs supplémentaires pour ses clients qui ont mal évalué la quantité dont ils ont besoin. Sinon, elle ne dispose d’aucun surplus pour livrer en urgence à une municipalité ou une entreprise qui voudrait s’en procurer quand les risques d’une inondation majeure se profilent.

Pas pour les résidences seules

Cette technologie n’est toutefois pas encore adaptée pour des habitations seules. Il est impossible pour l’instant de se procurer 100 sacs ou 200 sacs.

Des propriétaires aisés pourraient en acheter en groupe pour protéger une série de résidences, mais à 600 sacs par livraison et à un coût de 60 000$, ce n’est pas encore une technologie de protection individuelle de maisons. Mais pour de grandes surfaces, ses sacs de digues font maintenant partie des solutions à considérer pour défendre des installations des grandes inondations printanières.