Une victime d’un accident automobile dont les indemnités ne sont plus versées, parce qu’elle n’a pu convaincre le Tribunal administratif du Québec (TAQ) concernant son incapacité à travailler, a vu son recours échouer devant les tribunaux supérieurs. 

Le 30 janvier 2023, un panel de juges administratifs du TAQ avait rendu un long jugement concernant cinq recours dans un dossier opposant la requérante, dont les initiales sont N. M., et la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

Devant les tribunaux supérieurs, N. M. tentait de faire infirmer un seul des recours tranchés par le TAQ, soit celui concernant l’interruption de l’indemnité de remplacement de revenu (IRR). 

Dans un jugement rendu le 9 janvier 2025, le juge Luc Morin, du district de Montréal de la Cour supérieure du Québec, détermine que le tribunal « n’est tout simplement pas outillé pour remettre en question le raisonnement du TAQ et les conclusions de la décision ». Le 10 avril dernier, la Cour d’appel du Québec a rejeté la requête pour permission d’en appeler soumise par N. M. 

Deux accidents 

La demanderesse a subi deux accidents de la route, un premier en 1992 et un second en 2004, en plus de subir une rechute en 2017. « Ces accidents lui ont occasionné moult douleurs, désagréments et ont manifestement causé des impacts importants sur sa qualité de vie, tant au niveau physique qu’au niveau psychologique ». 

Le 26 juin 2019, la SAAQ a décidé d’interrompre le versement de l’indemnité de remplacement de revenu dont bénéficiait la demanderesse en lien avec le premier accident de la route et l’intervention chirurgicale au dos en 2017 qui y était reliée.

Le TAQ avait cependant infirmé la décision de la SAAQ de mettre fin au remboursement des traitements psychologiques suivis par la demanderesse. Le tribunal était d’avis que « la poursuite de ces traitements pourrait s’avérer utile en vue de départager la source potentielle des enjeux psychologiques auxquels est confrontée la demanderesse ». 

En Cour supérieure, la SAAQ allègue que la demanderesse confond le contrôle d’opportunité et le contrôle de légalité. L’assureur public estime que le pourvoi se veut un appel déguisé qui invite le tribunal à se livrer à une analyse de la preuve soumise à l’attention du TAQ. 

À cet égard, le tribunal donne raison à la SAAQ. « Le TAQ interprète une loi dont il a une connaissance approfondie et dont l’application relève clairement de son champ d’expertise », indiquait la Cour d’appel dans une autre décision rendue en 2021 dans un dossier impliquant la SAAQ. 

Le traitement 

Selon la demanderesse, il n’est pas logique de la part du TAQ de conclure à la fois que la SAAQ s’est trompée en mettant fin au remboursement de ses traitements psychologiques, tout en déterminant que l’assurée possède la capacité psychologique d’exécuter les tâches liées à son emploi désigné. 

En s’appuyant sur la preuve de plusieurs rapports et témoignages des docteurs ayant suivi la demanderesse, le TAQ a conclu que « la condition psychologique de la demanderesse, bien que non consolidée, n’était pas de nature à affecter sa capacité de travailler et d’effectuer les tâches liées à son emploi désigné ». 

Comme le précisait le TAQ aux paragraphes 147 et 148, le juge Morin rappelle que la fin du versement de l’IRR est indépendante de la consolidation d’une condition médicale. Autrement dit, « une personne peut encore suivre des traitements, et malgré tout, être capable de travailler ».

La Cour supérieure précise qu’elle ne dispose pas de preuve que la condition psychologique de N. M. l’empêchait de travailler.

Selon le juge Morin, le TAQ a tenu compte, a soupesé et a retenu les éléments factuels requis « pour soutenir son syllogisme juridique voulant que la demanderesse n’ait plus droit à l’IRR ». 

La Loi sur l’assurance automobile prévoit que toute victime d’un accident de la route cesse d’avoir droit à l’IRR en l’absence d’une incapacité à exercer l’emploi désigné. Il revient alors à l’assurée de prouver qu’elle a droit à son indemnité en raison de son incapacité à travailler.

Le TAQ a conclu que N. M. n’avait pas établi cette preuve. La Cour supérieure lui donne raison et maintient la même conclusion. 

En Cour d’appel 

Le 10 avril dernier, le juge Patrick Healy, de la Cour d’appel du Québec, a entendu une nouvelle requête pour permission d’en appeler soumise par la requérante N. M. La question soumise par la demanderesse concerne le fardeau de preuve qui s’applique lorsqu’il est question de la capacité d’emploi. 

Le juge Healy rappelle que la permission d’en appeler sur un pourvoi en contrôle judiciaire est accordée avec parcimonie. Il n’y a pas là une question de principe et il n’y a pas non plus de lacunes dans l’analyse de la preuve.

La Cour supérieure a déjà examiné soigneusement la décision du TAQ et a déterminé que cette instance a déjà mené une étude exhaustive de la preuve, avant de conclure que ce jugement était raisonnable et qu’elle ne pouvait le renverser.

« Il n’y a pas de raison de refaire ce même exercice devant cette cour. La décision de la Cour supérieure n’est aucunement déraisonnable », ajoute le juge Healy, qui rejette ainsi la requête pour permission d’appeler.