De grands changements sont en cours partout dans le secteur de l’assurance de personnes. C’est le cas notamment de nouvelles lignes directrices qui visent à aider les clients, en particulier les plus vulnérables, à obtenir le traitement équitable qu’ils méritent à juste titre, ont dit des conférenciers lors d’un récent colloque d’Advocis.
« L’équité, c’est la capacité de donner son consentement et de résoudre tout problème par la suite sans que ce soit trop difficile ni trop cher », explique Laura Tamblyn Watts, présidente et cheffe de la direction de CanAge. « Vous, le conseiller, ne pouvez pas trancher… Sauf si la personne peut comprendre l’information et les conséquences. Et si les choses tournent mal, vous devez être capable de les corriger. »
Rémunération
Le Conseil canadien des responsables de la réglementation d’assurance (CCRRA) et les Organismes canadiens de réglementation en assurance (OCRA) ont publié pour consultation un projet de directive qui expose les attentes envers les assureurs et les intermédiaires qui versent une rémunération.
L’objectif : que les clients soient traités équitablement grâce à une analyse des besoins, de même qu’avec respect et dignité, surtout lorsqu’ils sont particulièrement vulnérables. Dans la mesure où les conseillers sont rémunérés en contrepartie de leurs services, le projet de directive contribuera à assurer une gestion adéquate des risques découlant de cette rémunération.
Huston Loke, vice-président directeur, surveillance des pratiques de l’industrie à l’Autorité ontarienne de réglementation des services financiers (ARSF), affirme que le but des assurances est de tenir ses promesses, que le titulaire soit un particulier ou une entreprise. Pour ce faire, dit-il, les conseillers et le personnel de soutien aux ventes doivent tous suivre une formation.
Toutefois, les conseillers ne sont pas les seuls à devoir veiller au traitement équitable des clients : les entreprises aussi ont un rôle à jouer.
Changements mis en œuvre par Canada Vie
Ali Ghiassi, vice-président, affaires de l’industrie et relations gouvernementales, Canada Vie, fait remarquer que les clients ne devraient pas être pénalisés à cause du canal choisi pour effectuer leurs achats.
C’est pourquoi Canada Vie a renégocié et révisé les contrats avec ses conseillers en 2020. Elle a établi des principes et des pratiques sur l’embauche et la formation, la supervision en continu, le traitement des plaintes et la résiliation de contrats, explique M. Ghiassi.
En outre, Canada Vie a mis sur pied un comité qui veille à ce que les mécanismes incitatifs et la rémunération soient adéquats, tant pour les employés que pour les clients.
Sur la voie du changement
Les lignes directrices du CCRRA « ouvrent la voie au changement, donc je suis optimiste », se réjouit Tamblyn Watts. Les consommateurs aiment pouvoir trouver de l’information rapidement, dit-elle. Ils ne veulent plus du jargon prétentieux et bureaucratique.
« L’environnement est plus complexe qu’avant. Ce qui veut dire que nous, les conseillers en assurance, avons un rôle essentiel à jouer. »
Certains produits sont de plus en plus complexes, si bien qu’il faut communiquer beaucoup plus clairement avec les clients, dit-elle. Certains iront en ligne pour trouver l’information dont ils ont besoin, mais il reste que le secteur en général doit faire mieux en matière de communication.
Mme Watts est d’avis que les entreprises et les conseillers doivent normaliser les termes, fournir des définitions claires, et inclure l’information nécessaire sur le coût total. Il vaut mieux s’en tenir à une seule page, puis à des documents d’information supplémentaires. « Le but, c’est de rendre l’information plus compréhensible, pas d’ajouter des mots. »
Contrôles appropriés
L’élément crucial du projet de directive, selon Ali Ghiassi, est que les assureurs doivent « introduire des contrôles appropriés ». « Nous sommes assez sûrs que nos contrôles réduisent les risques et favorisent la transparence dans la relation client-conseiller. [Mais] je ne suis pas certain que toutes les entreprises sont rendues au même endroit que nous. »
M. Ghiassi affirme que Canada Vie a déjà un programme d’évaluation des conseillers afin d’éviter les résultats inéquitables pour les clients. Elle offre aussi d’autres cours pour les agents généraux.
Le nombre de personnes âgées, qui ne cesse de croître au Canada, est une question qui revêt de plus en plus d’importance. Selon Statistique Canada, avec une croissance de 12 % par rapport à 2016, les personnes de 85 et plus sont l’un des groupes d’âge qui grandissent le plus rapidement au pays. À l’heure actuelle, 2,3 % de la population a 85 ans ou plus.
Le nombre de conseillers vieillissants augmente lui aussi, d’où la nécessité de bien planifier la relève du secteur, souligne Tamblyn Watts. Elle prévoit qu’on adoptera une approche reposant sur le travail d’équipe à l’avenir pour servir les clients.
Groupes de la population à haut risque
Le secteur s’intéresse aux groupes de la population qui présentent un risque élevé, en particulier les personnes âgées et celles atteintes de démence. Huston Loke s’attend à plusieurs enjeux dans un avenir proche. « J’espère que nous nous pencherons sur la question plus tard. »
M. Loke dit que l’objectif des lignes directrices du CCRRA n’est pas de diviser, mais plutôt d’harmoniser les mécanismes incitatifs avec la valeur du produit pour le consommateur. La rémunération devrait être liée au service, mais, plus important encore, le produit doit convenir aux besoins du client.
Le colloque portait aussi sur l’importance et la croissance de la technologie et de l’innovation dans les secteurs des assurances et des technologies.
Glen Padassery, vice-président directeur, politiques et directeur général de la protection des consommateurs, ARSF, affirme que l’autorité de réglementation essaie de ne plus être fermée à l’innovation.
Toutefois, il faudra peut-être du temps pour changer d’attitude, poursuit-il en faisant remarquer que l’innovation est un processus, et non une fin.
Échouer pour mieux grandir
« Nous, en tant qu’autorité de réglementation, et vous, les secteurs avec qui nous travaillons, allons probablement échouer. Nous allons essayer, puis échouer, puis apprendre, et enfin grandir. Il n’y a pas d’innovation sans collaboration. C’est donc une excellente occasion de commencer à discuter pour déterminer ce que nous pouvons faire ensemble afin de favoriser l’innovation. »
Quand l’ARSF a succédé à la Commission des services financiers de l’Ontario, l’un de ses objectifs était de soutenir l’innovation et de favoriser le climat des affaires. M. Padassery dit que son bureau doit s’assurer que les occasions d’affaires novatrices sont appuyées et que les cadres législatifs ne sont pas un frein à l’innovation. C’est pourquoi il a créé un cadre pour l’innovation en 2021, lançant du même coup son premier projet d’essai et d’apprentissage. « Nous essayons d’avoir une approche flexible. »
Préférence pour les interactions humaines
Plusieurs petites entreprises veulent se lancer dans les technologies financières. Or, M. Padassery indique que d’après un sondage mené par son bureau, environ 4 000 résidents de l’Ontario préfèrent les interactions humaines au numérique.
Il souligne toutefois que ce n’est pas à son bureau de définir ce que sont les technologies financières. « Si vous créez quelque chose, ce serait bien de le mettre sur le marché. Nous travaillerons avec vous pour essayer de faire de ce projet une réalité. »