Selon McKinsey & Company, la majorité des assureurs de dommages en Amérique du Nord et en Europe investissent dans leurs outils numériques et analytiques pour améliorer leur souscription.

Ce sont d’ailleurs ceux qui seront les plus avancées en la matière qui jouiront des meilleurs résultats de souscription et présenteront la meilleure performance financière, estime le think tank dans un rapport intitulé How data and analytics are redefining excellence in P&C underwriting. Il s’agit aussi de l’un des deux traits distinctifs des assureurs rehaussant leur compétitivité, l’autre étant la sophistication de la tarification, estiment ses analystes Kia Javanmardian, Sirus Ramezani, Ashish Srivastava et Cameron Talischi.

« Les assureurs de dommages les plus performants creusent l’écart avec leurs concurrents en créant des outils avancés de souscription de données et d’analyses qui peuvent offrir une valeur substantielle. Par exemple, même les principaux assureurs peuvent voir les ratios de sinistralité s’améliorer de trois à cinq points. Les tarifs de leurs primes en nouvelles affaires peuvent aussi augmenter de 10 % à 15 %. Idem pour leur taux de rétention dans les segments rentables, qui peut bondir de 5 % à 10 %. Tout cela grâce à la souscription numérisée ! »

Les analystes de McKinsey prévoient que les manufacturiers de produits d’assurance de dommages utiliseront de plus en plus la puissance des données et de l’analyse pour évaluer de manière proactive leurs perspectives et identifier les occasions de marché avant la concurrence. Ils le feront de la même manière que les fonds spéculatifs prédisent l’évolution des marchés des capitaux, disent-ils.

Comment le font-ils ?

McKinsey ponctue son rapport de plusieurs exemples. L’un d’eux a trait aux assureurs qui utilisent des données et des analyses avancées pour réinventer l’évaluation des risques, améliorer l’expérience client, l’efficacité et la prise de décision tout au long du processus de souscription, affirment ses analystes.

« Les mêmes idées peuvent souvent être utilisées dans la prévention des pertes. Des assureurs exploitent régulièrement des volumes autrefois inimaginables de données provenant de divers domaines, notamment en environnement, en localisation, ainsi que des données gouvernementales. Ils sont devenus agiles pour obtenir, tester, maintenir, utiliser et réutiliser les données dans leurs modèles », disent-ils.

Ce développement passe aussi par des révisions continuelles de leurs modèles de risques, affirme McKinsey. « Le tout diffère selon les segments. Des assureurs s’appuient sur des données spécifiques à ceux-ci et sur leur connaissance des risques sous-jacents et en générer les meilleurs impacts », peut-on lire dans le rapport.

En assurance des particuliers, cette meilleure souscription des risques passe par la segmentation des modèles de risques et sur des critères de souscription bien analysés au fil du temps. En assurance des PME, c’est par l’offre d’une offre de souscription numérique que courtiers et assureurs en dégagent des bénéfices, fait valoir McKinsey.

« Dans les deux cas, seuls les risques complexes sont transmis aux souscripteurs pour examen. Même pour ces risques, les indicateurs chirurgicaux ciblent un examen supplémentaire par un tarificateur, augmentant ainsi l’efficacité du processus de souscription et réduisant les délais de décision », indique McKinsey.

Qu’en est-il pour l’assurance des moyennes et grandes entreprises ? Comment intégrer le numérique et l’analytique dans des risques présentant une bien plus grande complexité ?

L’évaluation du risque continue de dépendre de l’expérience et du jugement du souscripteur, reconnaît McKinsey. Toutefois, le recours au numérique et à l’analytique peut lui donner des indices pour faciliter le renouvellement d’un risque ou encore préqualifier ou trier de nouveaux clients potentiels.

Les défis

Intégrer le numérique et l’analytique dans ses processus de souscription pour se doter d’équipes agiles et multifonctionnelles n’est pas sans défi pour un assureur de dommages, prévient McKinsey. « La plupart des assureurs limitent leurs efforts à la création de modèles de cas d’utilisation spécifiques, puis à la révision de ces modèles tous les deux ou trois ans. Ceux qui embrassent vraiment cette approche l’abordent de plusieurs angles, et incluent l’équipe commerciale, les chefs de produits, le marketing, les agents et souscripteurs, les scientifiques, les ingénieurs de données, ainsi que l’équipe de TI, souvent composée des architectes de solutions et de ceux de l’expérience utilisateur (UX) », précise le think tank dans son rapport.

En résultent alors des modèles de souscription générant plus de valeur, qui ont aussi des cycles décisionnels plus courts et menant à des améliorations plus rapides. « Adopter cette approche plus dynamique demande toutefois un certain travail, prévient McKinsey. Il faut changer son état d’esprit comme leader et revoir les processus de base, en augmentant l’engagement des employés. »

Le hic, c’est que bien des assureurs de dommages sous-estiment le travail à faire, avertissent les analystes de McKinsey. Bien souvent, elles entament ce périple numérique sans avoir les habiletés pour le mener à bien.

Les assureurs de dommages qui ont réussi ce virage avec succès l’ont fait en acquérant, en développant et en retenant les talents nécessaires à cette transformation. Autre défi : perfectionner et convertir les souscripteurs à ce nouvel environnement. McKinsey le juge d’ailleurs aussi important que d’attirer de nouveaux talents.

« Il est nécessaire d’apporter des changements fondamentaux aux rôles de première ligne. Les employés ont souvent du mal à modifier leurs comportements au travail par eux-mêmes. Les assureurs doivent donc réaliser des investissements visant à renforcer à la fois leurs capacités et leur confiance », conseille McKinsey.

Perpétuer l’amélioration continue

Puis, au final, les assureurs se doivent de créer une boucle de rétroaction en temps réel pour assurer l’amélioration continue de leurs processus de souscription. « Des assureurs ont remplacé la surveillance périodique et générale du marché en matière de souscription par une surveillance en temps réel des microsegments du marché. À leurs indicateurs internes, ils ont ajouté une vigie des concurrents pour les aider à déterminer quand et où procéder à des ajustements de souscription », donne McKinsey en exemple.

Ces assureurs effectuent aussi des analyses des tendances des sinistres pour identifier les caractéristiques des produits qui s’avèrent plus ou moins rentables que prévu et qui peuvent justifier des ajustements. « La clé du succès est de détecter l’impact des actions sur les modèles, les marchés et les taux en quelques semaines, et non en quelques mois », indique McKinsey dans son rapport.