Pour Michel Bergeron, associé chez EY, les assurtechs sont des entreprises qui réussissent parce qu’elles se concentrent sur les clients et sur le service. Et non pas sur les produits, comme le font les assureurs.
M. Bergeron a tenu ces propos lors du plus récent Congrès de l’assurance et de l’investissement organisé par le Journal de l’assurance. Et il a ajouté que ce succès est corroboré par l’importance que ces entreprises détiennent dans le monde des fintechs. Aux États-Unis, les assurtechs représentent 11 % de toutes les fintechs. Ce taux augmente en Angleterre, où il s’établit à 15 %.
« La mission première des assurtechs est de régler un problème spécifique auquel les clients font face. Elles ne veulent pas prendre d’assaut le réseau de distribution au complet. Elles s’attaquent plutôt à un problème précis et veulent le régler efficacement. Les assurtechs réussissent parce qu’elles sont axées sur les clients, alors que l’industrie de l’assurance est axée sur les produits », a-t-il expliqué. Elles misent ainsi sur la simplicité, l’innovation, et offrent des produits qui sont attrayants pour les clients.
C’est le cas notamment de LearnVest, une fintech américaine qui regroupe dans un portail accessible en tout temps tous les avoirs du client, dans le but de lui donner le contrôle de ses finances personnelles. Les algorithmes de LearnVest permettent d’offrir des conseils personnalisés selon les données des différents comptes que le client a entrés et ses objectifs financiers. De plus, un planificateur financier est disponible en tout temps par courriel pour répondre aux questions des utilisateurs.
Perturbatrices ou facilitatrices ?
Si les assurtechs étaient considérées comme perturbatrices pour l’industrie, ces entreprises se tournent de plus en plus vers le service aux entreprises. En effet, 68 % sont facilitatrices pour les différents acteurs de l’industrie de l’assurance, contre 32 %, affirme M. Bergeron, se basant sur des recherches menées par EY.
« Les assurtechs ont compris qu’elles peuvent aider les assureurs au lieu de s’y opposer. Elles sont disposées à aider les clients, mais aussi aider les entreprises », a ajouté M. Bergeron. Ce changement de cap de leur part est une opportunité pour les assureurs de s’allier avec ces assurtechs, pour que celles-ci les aident dans la distribution.
Cette proportion d’assurtechs facilitatrices doit amener les conseillers à ne pas les voir comme des ennemis. « Certains voient l’avènement des assurtechs comme un combat entre les représentants et les robots-conseillers. L’industrie peut très bien avancer en misant sur un modèle qui combine les humains et la technologie, et un équilibre entre les deux est possible », dit M. Bergeron.
Toutefois, celui-ci mentionne que les assurtechs font face à un défi de taille : elles n’ont pas un accès aussi facile que les assureurs aux clients. « Les assureurs ont déjà une relation de confiance établie avec le client. Les assurtechs, bien qu’elles aient des moyens d’en bâtir avec Internet, n’ont pas cette relation avec les clients et avec les réseaux de distribution. » Par ailleurs, le cadre règlementaire leur pose un défi supplémentaire, tandis que les représentants sont déjà accoutumés à naviguer à travers celui-ci.
S’adapter ou ne pas s’adapter ?
Dans un environnement où l’ascension des assurtechs est imminente, M. Bergeron met en garde les entreprises qui ne voudraient pas s’adapter aux changements. « Blockbuster est une des entreprises qui n’a pas voulu s’adapter, lorsqu’une compagnie qui s’appelle Netflix a cogné à leur porte pour s’associer à eux. Les questions auxquelles les entreprises doivent réfléchir sont “comment vais-je m’adapter ?” et “quelles décisions vais-je prendre pour le faire ?” » Celui-ci poursuit en citant Charles Darwin, qui a dit que les espèces qui survivent ne sont pas les plus fortes ou les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux.
« L’univers des assurtechs est très large, et touche la distribution auprès du client, de même que la possibilité d’augmenter l’efficacité opérationnelle des courtiers en offrant des outils efficients en utilisant, par exemple, les données analytiques », a conclu M. Bergeron.