Avec le lancement d’une troisième chaire de recherche et le financement stabilisé qui lui a été accordé, l’Institut AdapT est désormais bien outillé pour remplir sa mission : développer des solutions concrètes et innovantes pour renforcer la résilience des infrastructures et de l’environnement bâti.
L’Institut AdapT regroupe des chercheurs et scientifiques de 29 universités québécoises, canadiennes et internationales. Il s’agit d’une collaboration multidisciplinaire en ingénierie, en gestion, en santé et en sciences humaines et sociales.
En octobre 2024, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et l’École de technologie supérieure (ÉTS) ont annoncé la création de la Chaire de recherche Adapt-UMQ sur l’adaptation des infrastructures municipales aux changements climatiques, qui est soutenue par un financement des Fonds de recherche du Québec (FRQ). Les noms des titulaires de la Chaire ont été confirmés le 3 juin dernier.
Il s’agit de Francis Marleau Donais, professeur au Département de génie de la construction de l’ÉTS, et de Juste Rajaonson, professeur agrégé au Département d’études urbaines et touristiques de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
Les travaux de la Chaire AdapT-UMQ se concentrent sur deux axes, soit la planification et le financement d’infrastructures résilientes et le soutien aux économies locales par la modernisation des infrastructures et l’intégration d’innovations sociales dans leur gestion.
Éric Bosco, directeur général de l’Institut AdapT, et Annie Lavasseur, professeure en génie de la construction à l’ÉTS et directrice scientifique de l’Institut, ont accordé un entretien au Portail de l’assurance.
Mme Levasseur est elle-même titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la mesure de l’impact des activités humaines sur les changements climatiques.
Enfin, l’autre chaire de recherche de l’Institut, financée par les FRQ, porte sur la gestion résiliente, le stockage et le traitement des eaux de ruissellement urbain et rural. Ses titulaires sont Mathieu Lapointe et Jean-Luc Martel.
Le financement de Québec
Il y a trois ans, le gouvernement fédéral avait annoncé un grand programme de subvention pour financer la recherche universitaire, explique Mme Levasseur. On finançait des projets multidisciplinaires et impliquant plusieurs établissements. L’ÉTS, où sont formés des chercheurs dans le domaine du génie de la construction, a décidé de soumettre son projet autour de l’adaptation au changement climatique de l’environnement bâti.
Éric Bosco a accepté l’offre de se joindre à l’Institut AdapT lorsqu’il a obtenu l’assurance que le projet verrait le jour, avec ou sans la subvention fédérale (il n’y en a pas eu). L’organisme a été lancé en 2023.
Par la suite, des projets menés par les professeurs associés à l’Institut ont reçu des subventions de la part des FRQ. En 2024, le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Exportation (MEIE) du gouvernement du Québec a confirmé l’octroi d’une subvention de 450 000 $ par année pour une période de sept ans. Ces fonds permettent à l’Institut « de structurer l’équipe qui sert de catalyseur au développement de ces projets collaboratifs », ajoute Mme Levasseur.
Une carte interactive sur l’adaptation au climat
Par l’entremise de sa Chaire de recherche, la professeure Levasseur encadre les travaux reliés à un projet de carte interactive présentant l’exposition et la vulnérabilité aux changements climatiques et des solutions d’adaptation pour la population québécoise. On veut ainsi agréger toutes les données scientifiques sur la carte, notamment celles reliées au climat.
« On pourra y voir l’évolution de différents aléas climatiques dans le futur selon des scénarios climatiques. Puis en même temps, on rattache à cela des exemples de solutions d’adaptation qui peuvent être mises en œuvre, soit par des propriétaires ou par les collectivités », précise-t-elle.
Concernant les travaux de la Chaire AdapT-UMQ, Éric Bosco souligne que la plupart des municipalités ont vécu, ces dernières années, un événement où la sécurité publique de la collectivité était menacée par un événement climatique.
Selon lui, les municipalités sont désormais plus ouvertes à contribuer à améliorer la résilience de leurs infrastructures au climat, malgré les problèmes de financement auxquels elles sont confrontées. « Leurs citoyens leur parlent de ça sans arrêt », dit-il.
Bien sûr, la tendance à la densification en milieu urbain met une pression supplémentaire sur les infrastructures, mais cela demeure préférable à l’étalement urbain, indique Éric Bosco. « En faisant ça, on n’est pas en train de créer de nouvelles rues et de nouvelles infrastructures qu’il faudra entretenir par la suite, c’est quand même un peu mieux d’un point de vue environnemental. »
Les municipalités de plus petite taille n’ont pas toujours accès à l’expertise requise pour améliorer leurs infrastructures. « Elles viennent vers nous et on peut les diriger vers les bons consultants, car assez souvent, pour le problème qu’elles veulent régler, une solution existe déjà », ajoute M. Bosco.
Au sein de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), le changement de mentalité est en train de se faire, poursuit-il. Au lieu de bâtir sur un ancien terrain de golf, on le transforme en parc. On tente de combattre les îlots de chaleur en préservant la canopée en milieu urbain. On construit des parcs éponges pour recevoir les pluies torrentielles et limiter les inondations.
Le rôle de l’Institut est justement de sensibiliser la population et de rendre accessible l’information qui existe déjà en matière d’adaptation au climat, dit-il.
L’ÉTS a un projet de création d’un nouveau programme de baccalauréat en génie de l’environnement qu’elle espère démarrer en septembre 2026.
L'avenir de la construction
Les codes du bâtiment et des règles sur la construction doivent aussi évoluer plus rapidement. « Les codes sont très prescriptifs, mentionne Annie Levasseur. Ils ne sont pas bien intégrés à l’évolution des changements climatiques. » Grâce à la Stratégie nationale d’adaptation, on a commencé à intégrer ces connaissances dans le Code national du bâtiment et pour la conception des infrastructures. Les codes provinciaux devront suivre la tendance, selon elle.
« Dans les différents ordres professionnels, comme les architectes et les ingénieurs, la sensibilisation passe par la formation continue, le développement des meilleures pratiques. Éventuellement, il faudra que tout cela se transcrive dans des normes », ajoute Mme Levasseur.
Même si l’Institut AdapT n’a pas encore réussi à trouver des partenaires parmi les compagnies d’assurance pour collaborer à ses recherches, le projet de carte interactive soulève beaucoup d’intérêt parmi elles, selon Éric Bosco. Il dit espérer des développements à cet égard à partir de l’automne 2025.