L’Institut Swiss Re vient de publier ses perspectives annuelles de l’industrie de l’assurance, World’s Insurance sigma report. Les chercheurs constatent que la résilience de l’économie mondiale annonce de beaux jours pour les assureurs de dommages et les assureurs de personnes. 

« L’industrie de l’assurance a atteint un nouvel équilibre après les défis des récentes années. L’économie mondiale a repris à la hausse, ce qui devrait susciter davantage de demande d’assurance. L’assurance vie en particulier est un secteur à regarder, car les taux d’intérêt plus élevés stimulent les revenus de placement et la demande de rentes, offrant à davantage de personnes un revenu de retraite sûr », indique Jérôme Haegeli, économiste en chef du groupe Swiss Re. 

En 2024, les chercheurs de l’Institut estiment que la croissance globale du volume de primes de l’ensemble des assureurs sera de 3,2 %, portant le marché à 7 600 milliards de dollars américains (tous les chiffres sont en devises US), en combinant les volets dommages et assurance de personnes. 

En 2025, la croissance des primes sera limitée à 2,6 %, prévoient-ils. La croissance a été de 2,8 % en 2023, rapporte l’Institut. 

En combinant l’ensemble des primes dans les deux segments que sont l’assurance de personnes et l’assurance de dommages, les dix marchés les plus importants pour les assureurs étaient les suivants en 2023, selon les estimations de l’Institut :

Les 20 pays les plus importants pour les assureurs représentaient 91 % du volume de primes, tous secteurs confondus, en 2023, sur un marché totalisant 7 200 G$. 

Au plan macroéconomique 

L’Institut prévoit que l’été 2024 sera le point de bascule pour le taux directeur des banques centrales des pays les plus économiquement avancés. L’écart entre les taux obligataires à court et à long terme se creuse et des ajustements sont nécessaires pour les gestionnaires de la politique monétaire, indique-t-on. 

La vigueur persistante de la devise américaine, le prix de l’énergie et des aliments sont autant de facteurs qui créent une grande pression sur les économies émergentes. Les chercheurs ne prévoient cependant pas l’éclatement d’une crise de l’endettement dans les pays les plus vulnérables à ces facteurs. 

« Enfin, la prime à terme — c’est-à-dire la compensation supplémentaire requise par les investisseurs pour supporter le risque de durée — est susceptible de se reconstituer à mesure que la politique monétaire reviendra à une orientation neutre. »

« Les inquiétudes quant à la viabilité budgétaire à long terme ont ressurgi ces dernières années. Les pressions structurelles préexistantes sur les finances publiques liées à l’augmentation des dépenses sociales dans un contexte de vieillissement démographique ont été accentuées par les dépenses massives pendant la pandémie. Il existe désormais un besoin croissant d’investissements importants du secteur public dans la construction d’infrastructures vertes et économiquement durables et dans la résilience de la chaîne d’approvisionnement », écrit l’Institut. 

Les auteurs constatent aussi que depuis les 30 dernières années, la croissance moyenne annuelle du produit intérieur brut (PIB) réel mondial a été de 2,7 %, tandis que les pertes associées aux catastrophes naturelles ont grimpé de 5,9 % par année.

En conséquence, si la tendance se maintient comme le prévoit l’Institut, il est probable que le fossé entre les dommages assurés et les pertes non assurées se creuse encore davantage. 

Assurance de dommages 

Chez les assureurs de dommages, le rapport de l’Institut souligne que les hausses de primes sont devenues nécessaires ces dernières années en raison de l’inflation élevée des coûts de réclamation.

En 2023, les primes ont grimpé de 3,9 % pour l’ensemble des assureurs de dommages, comparativement à 0,8 % en 2022. Le marché mondial était d’environ 4 300 G$ à la fin de 2023. 

En 2024, le volume de primes connaîtra une croissance de 3,3 % pour atteindre 4 600 G$. La croissance sera plus modeste en 2025, à 2,6 %, ce qui portera le marché à 4 800 milliards (G$) de primes en 2025. 

Dans les lignes personnelles, la hausse des taux sera de 5 % en 2024 avant d’être plus modérée pour atteindre 3 % en 2025, selon les analystes de l’Institut.

Dans le volet de l’assurance aux entreprises, les taux continuent de grimper, à 2 % en 2024 et en 2025, mais à un rythme moins soutenu en raison de la concurrence plus élevée dans certains marchés. Cependant, une catastrophe majeure pourrait modifier cette tendance. 

Le taux de rendement sur le capital investi des assureurs de dommages est en moyenne de 10 % à ce moment-ci dans les huit principaux marchés du monde, comparativement à 6 % en 2023. L’Institut prévoit que le taux se maintiendra à plus de 10 % encore en 2025. 

« L’assurance commerciale représente près de la moitié du total du marché de l’assurance des biens et de la responsabilité, souligne Kera McDonald, chef de la souscription de Swiss Re Corporate Solutions. Nous nous attendons à ce que les assureurs multirisques commerciaux maintiennent leur rentabilité en 2024, l’évolution des tarifs ayant permis à des lignes d’affaires comme l’immobilier de rester à un prix soutenable. L’industrie a connu des augmentations de tarifs à un chiffre pour les affaires immobilières rédigées cette année. Du côté de la responsabilité, on observe une tendance générale au ralentissement du marché sur la plupart des lignes d’affaires importantes ». 

De 2020 à 2023, l’Institut souligne que le coût des primes d’assurance de dommages a grimpé plus vite que le revenu disponible dans les six marchés les plus importants. Le caractère moins abordable de l’assurance de dommages n’est pas une bonne nouvelle pour l’ensemble de l’industrie, car ces dépenses supplémentaires nuisent à la capacité d’épargne des consommateurs. 

Assurance de personnes 

« Le secteur de l’assurance vie sur les marchés avancés a été dans le marasme en raison de l’environnement de taux d’intérêt très bas qui a prévalu depuis la crise financière mondiale (2008-2009) jusqu’après 2021. Aujourd’hui, le secteur est de nouveau en mode croissance », constatent les auteurs du rapport sigma. 

En assurance de personnes, le rapport indique que la croissance des primes atteindra 2,9 % à la fin de 2024, ce qui mettra le volume total à 3 000 G$ en primes. La croissance prévue en 2025 sera de 2,7 %.

La croissance des primes n’avait été que de 1,3 % en 2023. En 2022, l’industrie a même connu une baisse de 3,8 %. 

« Un segment important pour la croissance de l’assurance vie est le recours aux rentes pour augmenter l’épargne-retraite. Aux États-Unis, par exemple, les ventes de produits à taux fixe de ces rentes ont bondi de 63 % en 2022 et de 36 % en 2023. À plus long terme, les marchés avancés devraient contribuer à la moitié de tous les investissements supplémentaires en matière de primes au cours des 10 prochaines années, portées par la forte croissance des rentes », prévoit Swiss Re. 

On prévoit ainsi une croissance annuelle moyenne des primes de 2,5 % d’ici 2034, ce qui portera le marché à 4 700 milliards de primes.