L’Organisme canadien de réglementation des investissements (OCRI) et l’Autorité des marchés financiers affirment que l’une des plaintes les plus fréquentes qu’ils reçoivent de la part des investisseurs et des sociétés membres concerne la lenteur des transferts de comptes. Des processus désuets, des normes incohérentes et une communication fragmentée entre les firmes entraînent des retards qui nuisent à la planification financière et ont des conséquences négatives pour les investisseurs. 

« La modernisation des transferts de comptes nécessitera une approche multidimensionnelle axée sur l’automatisation des systèmes, la normalisation des procédures de transfert et l’harmonisation de la réglementation », indique l’OCRI en publiant son livre blanc et les règles proposées sur la question. L’Autorité a publié un document de consultation similaire le 10 juillet dernier. 

Intitulé Accroître la rapidité et l’efficacité des transferts de comptes au Canada : phase 1 — Définition du problème et établissement des bases du changement, le document de consultation marque la première phase d’un processus en deux étapes envisagé par le régulateur. Il examine les causes profondes des problèmes de transfert de comptes et propose des solutions, incluant des modifications réglementaires et des recommandations opérationnelles. 

Malgré les progrès technologiques, les processus manuels et les systèmes fragmentés continuent d’entraver l’efficacité des transferts, constatent les deux organismes de régulation. La solution technologique proposée permettrait d’éliminer certaines pratiques désuètes comme l’envoi de télécopies, les signatures physiques et les chèques. 

« Sont également publiées aujourd’hui des modifications proposées aux règles qui, si elles sont adoptées, obligeront tous les courtiers membres de l’OCRI à utiliser des systèmes automatisés pour les transferts admissibles et à privilégier les communications électroniques lorsqu’elles sont disponibles. Les règles préciseront aussi les délais à respecter : deux jours de compensation pour informer le client d’un obstacle au transfert, et dix jours ouvrables pour conclure le transfert », précise l’OCRI.

L’organisme dit avoir envisagé une approche fondée sur des principes, mais a jugé qu’une règle prescriptive était plus appropriée. 

Vers une solution technologique commune 

Le livre blanc décrit également les travaux déjà entamés, et ceux à venir, pour mettre en place une solution technologique à l’échelle de l’industrie. L’OCRI invite d’ailleurs les entreprises intéressées à soumettre des propositions en ce sens. La deuxième phase du projet, attendue en 2026, fera le point sur les progrès réalisés et présentera des stratégies de mise en œuvre. 

« Ce livre blanc se concentre sur les aspects opérationnels des transferts de comptes, notamment les systèmes et les processus qui les soutiennent. Il ne traite pas des enjeux liés à la conduite des sociétés ou des conseillers dans les cas de mobilité entre firmes », précise le document. 

Certains produits financiers posent aussi problème. Par exemple, certains doivent être réenregistrés, les comptes enregistrés ou spécialisés exigent une paperasse supplémentaire, et les produits exclusifs ne peuvent souvent pas être transférés en nature. Le manque de valorisations fréquentes ou disponibles complique aussi les délais. Le transfert d’un certificat de placement garanti en cours de terme peut prendre de six à huit semaines. 

Les fonds distincts figurent parmi les produits problématiques, l’OCRI notant qu’ils ne sont pas tous transférables d’une société à l’autre (la firme réceptrice doit avoir une entente de distribution avec l’assureur). « De plus, le réenregistrement auprès de la compagnie d’assurance occasionne des délais et alourdit le processus pour les firmes et les clients. De nombreux transferts de fonds distincts sont encore traités manuellement, ce qui entraîne des erreurs, des incohérences et des retards. » 

De manière similaire, le réenregistrement des fonds d’investissement auprès des sociétés de fonds, combiné à des calendriers de valorisation irréguliers, cause fréquemment des délais. Le rapport se penche également sur les produits exclusifs, les produits dispensés, les certificats physiques, les titres radiés, les comptes gérés, les régimes immobilisés et le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP). 

Un besoin pressant de modernisation 

Les deux organismes de régulation notent qu’il est difficile de quantifier l’ampleur du problème — les volumes et les délais de transfert — en raison de l’absence de système centralisé, de référentiel commun ou de métriques normalisées. De nombreux transferts se font encore manuellement et sont suivis par courriel, ce qui rend la collecte de données fiables presque impossible. 

Les recommandations incluent l’automatisation des processus, l’uniformisation des règles et des standards opérationnels, la responsabilisation (il n’existe actuellement aucun délai obligatoire pour effectuer un transfert), ainsi que la collaboration dans le développement d’outils centralisés. 

« Le processus de transfert de comptes au Canada doit être modernisé de toute urgence », conclut l’OCRI. 

Les commentaires sur le livre blanc et les modifications réglementaires proposées doivent être soumis par écrit à l’OCRI, aux Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ou à l’Autorité des marchés financiers d’ici le 8 octobre 2025. 

L’Autorité confirme qu’elle coordonnera ses efforts avec l’OCRI afin d’éviter les dédoublements potentiels dans l’encadrement applicable.