Le matin de la réunion annuelle du cercle des fondateurs de Navacord – à laquelle 65 cadres avaient été convoqués pour aider la société à définir ses priorités pour 2024 –, son président exécutif, T. Marshall Sadd, a accordé une entrevue au Journal de l’assurance pour parler du record fracassé l’année dernière. Le chiffre d’affaires de la société a grossi de plus de 100 millions de dollars (M$) en 2022, après la conclusion de 19 acquisitions cette année-là. Au total, Navacord a mis la main sur plus de 80 entreprises depuis sa création, en octobre 2014.
La société en était à la moitié de son exercice financier quand M. Sadd s’est entretenu avec le Portail de l’assurance. Selon le dirigeant, ce chiffre a maintenant dépassé les 120 M$, en raison de l’acquisition récemment annoncée de RWAM Insurance Administrators Inc. et de Programmed Insurance Brokers Inc., qui appartiennent actuellement à Home Hardware Trust.
En tout, la société compte maintenant environ 2 600 employés, dont 35 à son siège social. L’équipe responsable de l’expansion de l’entreprise qui s’occupe des acquisitions est composée de quatre personnes, plus quatre avocats, ainsi que de M. Sadd lui-même et du président et chef de la direction, Shawn Desantis.
Plus de 700 M$
Le chiffre d’affaires annuel avoisine actuellement les 700 M$. M. Sadd confie que la société vise le milliard de dollars, mais qu’elle aura « besoin des meilleurs talents de l’industrie pour atteindre cette cible ». Les gens veulent plus que des salaires et des primes de nos jours, ajoute-t-il. « Ils veulent participer à la croissance de l’entreprise. » Le fait d’avoir des acteurs clés parmi ses actionnaires fait aussi partie des stratégies de relève de la société.
Navacord déclare avoir plus de trois milliards de dollars (G$) en primes annuelles, un montant qui, selon M. Sadd, est en quelque sorte une cible mouvante. « Ça augmente toujours, mais on parle d’un peu plus de trois milliards de dollars en ce moment, c’est certain. »
Environ 2 G$ sont des primes d’assurance de dommages, tandis que l’autre milliard est généré par les volets avantages sociaux et retraite. « Nous prévoyons d’atteindre 5 G$ d’ici quatre ou cinq ans », affirme M. Sadd.
Navacord a été formée il y a neuf ans par un partenariat entre Lloyd Sadd Insurance Brokers Ltd et Jones DesLauriers Insurance. Les deux fondateurs l’ont créée parce qu’ils sentaient le besoin de faire partie de quelque chose de plus grand pour être en mesure de soutenir la concurrence.
À l’époque, les cabinets régionaux se faisaient en quelque sorte dépasser par les courtiers internationaux et multinationaux. Ils savaient qu’ils devaient investir dans la modernisation de leurs activités (la numérisation était imminente). Prendre de l’ampleur était plus important que jamais – y compris auprès des compagnies d’assurance –, et investir dans l’attraction et le perfectionnement des employés était de plus en plus difficile pour un courtier régional.
« Les talents préféraient les acteurs nationaux aux courtiers locaux ou régionaux, se remémore M. Sadd. Nous avons fait équipe en 2014 parce que nous voulions créer une nouvelle force canadienne. Quand nous avons examiné le marché à l’époque, nous avons vu qu’il n’y avait en fait que des acteurs américains : HUB et Gallagher, Marsh et Aon. Il n’y avait pas vraiment de grande force canadienne ou d’autres choix. Les compagnies d’assurance étaient également dans la distribution. Ce n’était pas vraiment intéressant pour les courtiers ayant une mentalité d’entrepreneuriat et axés sur la croissance. » Ceux qui voulaient pouvoir croître et être des actionnaires n’avaient pas beaucoup d’options, ajoute-t-il. « Nous avons donc créé le modèle Navacord. »
C’est un modèle qui permet de diriger son entreprise de façon autonome (décentralisée) en première ligne, tandis que Navacord s’occupe en coulisses (de façon centralisée) de la technologie, de la stratégie des ressources humaines, de l’attraction et du perfectionnement des employés, du marketing, des communications et des finances.
Des partenariats
Quand Navacord fait l’acquisition d’une entreprise (elle appelle généralement ces transactions des « partenariats », mais pas toujours), elle achète tout. Les vendeurs investissent dans Navacord pour devenir des actionnaires partenaires. En outre, Navacord a un programme de « contributeurs clés » qui permet aux dirigeants des entreprises de recevoir des actions s’ils atteignent les cibles fixées.
Elle offre également un programme semblable aux conseillers en gestion du risque, qui peuvent obtenir des actions en fonction des efforts qu’ils déploient pour générer des revenus.
Quant à la raison pour laquelle Navacord n’emploie habituellement pas le terme « acquisitions », M. Sadd dit que c’est tout simplement parce que ce n’est pas dans la culture de l’entreprise. « Si quelqu’un veut vendre son entreprise et s’en aller en Floride, ce n’est pas pour nous. Mais si vous voulez vous joindre à une plus grosse organisation pour toutes les raisons logiques de le faire (envergure, infrastructure pour le perfectionnement des talents, capitaux, produits exclusifs, installations, etc.) et si vous voulez continuer à croître, alors nous voulons vous avoir comme partenaire », explique-t-il. « Nous ne dirigeons pas des cabinets de courtage. Nous soutenons nos courtiers partenaires dans leur croissance. »
Lorsque Navacord approche une entreprise qu’elle aimerait acquérir, elle commence par demander à son propriétaire où il aimerait se trouver deux jours après la conclusion de l’acquisition. S’il souhaite faire croître son entreprise, la conversation peut se poursuivre, et on peut alors parler d’évaluation et de capitaux propres.
Parmi les transactions déjà réalisées, quelques entreprises ont été « intégrées » à une plus grande marque. Mais dans la plupart des cas, l’entreprise conserve sa propre entité et sa propre marque, car Navacord cible généralement les entreprises qui bénéficient d’une grande notoriété dans leurs collectivités et leurs secteurs d’activité.
Les retombées
Que rapportent les entreprises après avoir été acquises? M. Sadd affirme qu’une croissance exponentielle n’est pas sans précédent. « Nous visons généralement de 10 % à 15 % d’une année sur l’autre, pour ce qui est des “ventes de magasins comparables”, comme on les appelle, ou de la croissance interne. Plus que ça, c’est exceptionnel. Nous l’avons déjà vécu », dit-il.
« Ça crée des occasions de gravir les échelons. Ça permet aux gens de devenir actionnaires. Ça nous donne l’occasion d’investir dans l’attraction de nouveaux talents. Tous ces avantages-là viennent avec la croissance. Il y a toujours plus d’occasions. »
Le dirigeant convient que ce ne sont pas toutes les propositions d’acquisition qui sont fructueuses. « Nous ne sommes pas nécessairement le plus offrant parce que nous cherchons des gens qui veulent continuer à travailler dans l’entreprise », dit-il. Au sujet des cibles d’acquisition possibles, M. Sadd affirme qu’il y a moins de courtiers qu’avant au chiffre d’affaires de plus de 20 M$. Mais il y a encore beaucoup de petits indépendants.
Il affirme que la société continue d’envisager des acquisitions dans des secteurs stratégiques (avantages sociaux, retraite et gestion de patrimoine), dans certaines régions (Atlantique, Québec et Manitoba), et peut-être aussi dans des branches spécialisées. Toutefois, la croissance interne est maintenant la priorité.
« Nous avons 4 % du marché des assurances de dommages en ce moment, et nous avons un plan très clair pour atteindre 8 %, dit-il. Il y aura beaucoup de croissance interne; nous gagnerons des parts de marché tout simplement un client à la fois. »