Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) a mis la dernière touche au test de suffisance de capital des assureurs vie. Le nouveau test exige une plus grande correspondance entre risque et capital.

Lorsqu’il sera en vigueur le 1er janvier 2018, le Test de suffisance du capital des sociétés d’assurance vie (TSAV) tirera un trait sur plus de 25 ans d’histoire. L’actuel test du Montant minimal permanent requis pour le capital et l’excédent (MMPRCE) existe depuis 1992.

« Le TSAV constitue une évolution importante des exigences du BSIF en matière de capital réglementaire. Il instaure un cadre de capital axé sur les risques qui continuera de protéger les souscripteurs tout en permettant aux assureurs de faire face à la concurrence et de prendre des risques raisonnables », a dit le surintendant Jeremy Rudin.

Fruit d’une consultation qui s’est déroulée d’avril à mai 2016, ce nouveau test de solvabilité vise les assureurs de personnes à charte fédérale. Au terme de la consultation, il s’est enrichi de 22 changements techniques par rapport au MMPRCE. Ainsi, le TSAV prend désormais en compte de nombreuses pratiques d’affaires et techniques de gestion des risques adoptées depuis un quart de siècle. Le TSAV reflète aussi l’évolution des attentes du BSIF en matière de solvabilité.

Récemment, le régulateur avait constaté que le MMPRCE ne mesurait pas explicitement certains risques qui pèsent à l’heure actuelle sur les compagnies d’assurance vie. Il souligne entre autres que le TSAV traduira mieux la capacité qu’a l’assureur, en période de crise, d’absorber les pertes à même son capital disponible, et de protéger les souscripteurs.

« La nouvelle ligne directrice tient compte des leçons que nous avons tirées de la crise financière, de l’évolution récente des normes d’information financière, des normes actuarielles, des pratiques économiques et financières et des percées internationales des cadres de solvabilité », a énuméré le BSIF.

Il dit aussi avoir élaboré la nouvelle ligne directrice selon les résultats tirés de ses études d’impact quantitatives (EIQ). Cette série d’études réalisées dans les dernières années visait à tester régulièrement le cousin de solvabilité des assureurs, au cas où une autre crise de grande envergure devait surgir.

Meilleure correspondance entre théorie et pratique

Le régulateur a tenu à quantifier les risques en tenant compte du monde extérieur. « Le BSIF a mis au point la ligne directrice sur le TSAV pour améliorer la correspondance entre les mesures du capital et du risque et la réalité économique de l’assurance vie, tout en tenant compte de l’évolution sur la scène internationale des pratiques d’élaboration des dispositifs de solvabilité », peut-on lire dans un avis publié en septembre. Le BSIF ajoute s’être concerté avec l’Autorité des marchés financiers et la société canadienne de protection des assurés Assuris, dans le développement du nouveau test.

Le Bureau du surintendant révèle que la ligne directrice corrige d’importants problèmes liés au test actuel. Dans le futur test, certaines composantes du capital disponible sont de plus grande qualité que sous le régime du MMPRCE, selon le BSIF. « Les effets sujets à dépréciation en période de crise ont été réévalués et leur traitement de capital a été ajusté en conséquence. En outre, le coussin de solvabilité de base est plus sensible et couvre des éléments plus subtils des risques opérationnels, de crédit, de marché et d’assurance. »

Le BSIF a aussi révisé la définition du capital disponible. Les déductions et les redressements sont appliqués au même niveau que celui où les pertes surviennent. Sujets à dépréciation en période de crise, les écarts d’acquisition et les actifs incorporels ont été réévalués, ainsi que les actifs d’impôt différés.

Le TSAV fait aussi appel à des techniques plus poussées et fondées sur les risques pour mesurer les risques opérationnels, de crédit, de marché et d’assurance. « Tous les risques sont mesurés ou estimés dans toute la mesure possible à un niveau de confiance uniforme », dit le BSIF. Il a prévu des mesures sensibles au risque, qui permettent de déterminer les crédits de capital à attribuer aux produits avec partage des risques et les crédits pour diversification des risques.

Mêmes cibles, comportement différent

Le montant de capital requis de la part des assureurs ne devrait pas beaucoup changer par rapport aux exigences du MMPRCE, estime le BSIF. Le ratio minimal actuel du MMPRCE est de 150 %. Il demeurera ainsi avec le nouveau test. Les ratios minimaux en ce qui touche le noyau et le capital du TSAV ont été établis à 90 % et 60 % respectivement, soit 150 % au total.

Les ratios cibles du noyau et du capital du TSAV ont été fixés à 100 % et 70 %, respectivement. Le noyau représente le montant de capital de catégorie 1 disponible pour couvrir le coussin de solvabilité.

Même si l’exigence minimale demeure au même niveau, le BSIF prévient que dans l’ensemble, les ratios du TSAV se comporteront de façon très différente de ceux du MMPRCE. « Il sera donc difficile de comparer simplement ces deux ratios », écrit le régulateur. Il ajoute que le nouveau cadre pourrait exiger de certaines institutions qu’elles évaluent l’ensemble de leurs plans en fonction de leurs secteurs d’activités, des risques auxquels elles choisissent de s’exposer et de leur gestion de ces risques.

« La ligne directrice sur le TSAV fournit un cadre qui améliore la qualité globale du capital disponible. Elle offre une meilleure sensibilité au risque, une meilleure mesure de certains risques et une correspondance plus étroite entre les mesures du risque et le contexte économique des sociétés d’assurance vie », a résumé la surintendante auxiliaire du secteur de la réglementation, Carolyn Rogers.


Le BSIF demeure préoccupé par les bas taux d’intérêt

Dans une lettre adressée aux actuaires désignés des compagnies d’assurance vie en septembre, le Bureau du surintendant des institutions financières a fait savoir que la faiblesse soutenue des taux d’intérêt demeure une source de préoccupation.

« Nous exigeons la production des scénarios de 0,5 %, 1,5 %, 2 %, 2,5 % et 3 % pour toutes les hypothèses futures de réinvestissement », peut-on lire dans la lettre signée par Chris Townsend, directeur principal, division de l’actuariat, secteur de la surveillance des sociétés d’assurance.

Le BSIF a aussi des exigences quant à l’information supplémentaire sur le contrôle interne du passif des contrats d’assurance et les changements apportés aux méthodes et hypothèses. Par souci d’uniformité, le terme « actif de réassurance » a été remplacé par « sommes à recouvrer auprès des réassureurs ». Les modifications touchent le mémoire à l’intention de l’actuaire désigné, que le BSIF met à jour chaque année, conformément à la Loi sur les sociétés d’assurance.