Le rapport final du Conseil consultatif sur la mise en œuvre du régime national d’assurance médicaments fait parler depuis sa présentation, le 12 juin dernier. Après les réactions mitigées de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP), de Biosimilaires Canada ou encore de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP), c’est au tour de Mercer de livrer son analyse critique.
Dans un livre blanc intitulé Assurance médicaments pour tous : encore une occasion manquée ?, la firme de consultation affirme que le projet de régime tel que présenté dans le rapport final est « irréaliste » et « insoutenable ». Elle donne des pistes de solutions pour pallier les différents problèmes qu’elle relève.
Menaces pour les employeurs
« Certains éléments du rapport final sont salutaires, en particulier la volonté de développer une stratégie nationale sur les maladies rares, mais nous estimons que d’autres éléments présentent des risques », dit Mercer.
La firme qualifie le projet de régime universel, public et à payeur unique d’« incroyablement généreux » et craint que celui-ci « ne soit pas viable à long terme ». Trois éléments en particulier nourrissent l’inquiétude de Mercer, dont deux sont des menaces pour les employeurs et leurs employés :
- Inégalités de couverture des employés : un souci pour les employeurs
La ministre de la Santé du Québec, Danielle McCann, a d’ores et déjà demandé un droit retrait du Québec avec pleine compensation « dans le respect des compétences des provinces ». Le projet actuel laisse en effet la possibilité aux provinces d’intégrer ou non le Régime national d’assurance médicaments. « C’est préoccupant. Cela ajouterait une énième couche de complexité interprovinciale, ce qui peut potentiellement entraver la mobilité de la main-d’œuvre », dit Mercer. Selon la firme, les employeurs pourraient en effet avoir du mal à faire venir ou à retenir des employés dans une province n’offrant pas le Régime national. « La complexité serait particulièrement aigüe pour les promoteurs de régimes ayant des membres dans plusieurs provinces — ce qui est le cas de nombreux employeurs du pays —, car les employés pourraient désormais être couverts par des régimes d’assurance médicaments qui diffèrent les uns des autres. »
- Trop peu de temps pour repenser les compensations salariales
Les avantages liés à la santé offerts par les employeurs à leurs employés représentent « une partie importante de la rémunération totale », note Mercer. De ce fait, la mise en place du régime national d’assurance médicaments aurait des « conséquences importantes non seulement sur la gestion de la main-d’œuvre, mais également sur les conventions collectives conclues dans tout le pays ». Pour Mercer, une implémentation du Régime dès 2022 « risque de créer le chaos dans les relations de travail » car les employeurs n’auront pas eu assez de temps pour redéfinir les compensations qu’ils offrent à leurs employés.
- Des franchises « vraiment basses » qui ne responsabilisent pas
Le Régime prévoit que les Canadiens paieront 2 $ pour les médicaments classiques et 5 $ pour les plus couteux, avec un plafond annuel de 100 $ par personne ou ménage. Ce barème est « trop généreux pour être viable », dit Mercer. La firme recommande que le copaiement soit complété par d’autres mesures de partage des couts pour « inciter les Canadiens à acheter consciencieusement » et ainsi éviter le gâchis. Mercer propose l’implémentation d’une franchise basée sur le revenu ou l’application d’un pourcentage de toutes les demandes de règlement de médicaments.
Mercer recommande au Conseil consultatif d’apporter des « changements significatifs » à son plan de match. Sans quoi, « le Régime national d’assurance médicaments échouera, représentant une nouvelle occasion manquée de finalement garantir une assurance médicaments pour tous les Canadiens ».