Le 7 octobre dernier, Pascale Cauchi (certificat no 106308, BDNI no 1601781) a été déclarée coupable des 15 chefs de la plainte par le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière. La sanction sera déterminée à la suite d’une prochaine audience.

L’intimée est conseillère en sécurité financière, conseillère en assurance et rentes collectives, représentante de courtier en épargne collective et planificatrice financière.

Alors que le comité se préparait à entendre la preuve, le procureur de l’intimée, Pascal A. Pelletier, a plaidé le caractère déraisonnable des délais. L’enquête du syndic a commencé en octobre 2009. La plainte a été déposée en janvier 2015. La première audience n’a eu lieu qu’en septembre 2017.

Me Pelletier a aussi évoqué les préjudices subis par l’intimée découlant de ces délais. Il estimait que l’arrêt des procédures était le seul remède approprié, considérant le fait que la personne à l’origine de l’enquête du syndic n’avait aucun reproche à formuler à l’encontre de l’intimée.

En décembre 2017, le comité de discipline rejette la demande d’arrêt des procédures soumise par l’intimée. Il estime que la plaignante a rapidement soumis l’ensemble de la preuve au procureur de l’intimée. En l’absence de toute admission de la part de l’intimée, il était normal que le nombre de témoins assignés par la plaignante varie au fil du temps, note le comité.

Le premier délai de 18 mois après le dépôt de la plainte découlait en bonne partie des décisions prises par l’intimée, ajoute-t-on. L’agenda chargé du procureur de l’intimée jumelé à l’absence de Mme Cauchi, qui vit à l’étranger environ cinq mois par année, a aussi contribué au délai de trois ans entre le dépôt de la plainte et le début de son instruction.

En janvier 2018, l’instruction a été reportée par la demande d’appel de l’intimée à la Cour du Québec. Le tribunal a alors pris en délibéré la requête de l’intimée qui demandait la permission d’en appeler de la décision de comité rejetant la demande d’arrêt des procédures. La Cour du Québec a rejeté la requête en avril 2018.

Les faits

Il a fallu 12 journées d’audience pour l’instruction de la plainte, à l’automne 2018. Le comité rejette la demande préliminaire de la plaignante, qui s’opposait à la recevabilité du rapport d’expert transmis par Mme Cauchi. Cet expert, Alain Latulippe, a parlé du rôle global du planificateur financier, sans toutefois se prononcer sur les faits au dossier. Le comité a accepté de l’entendre et de recevoir son rapport même si, à première vue, son expertise ne semblait pas pertinente. Le comité a aussi eu à trancher plusieurs objections des procureurs quant à la recevabilité de certaines pièces soumises par les parties.

La plainte comporte 15 chefs. Les chefs nos 1 à 13 découlent de gestes posés entre novembre 2003 et décembre 2007 et l’infraction retenue est en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et de services financiers. On reproche à l’intimée de n’avoir pas respecté les limites de sa certification en faisant souscrire un contrat de licence d’emploi du progiciel Prospector Master, un contrat de franchise Solution Prospector et Mail it Safe, ou un contrat de franchise Prospector World. Quatre des cinq clients de Mme Cauchi mentionnés dans ces chefs ont témoigné devant le comité.

Le nom de Claude Duhamel apparaissait sur les divers contrats du réseau Prospector, même si aucun des clients ne l’a jamais rencontré. Présentés par l’intimée à son bureau, les produits souscrits dans une entreprise informatique étaient considérés comme un investissement procurant des avantages fiscaux.

Dans le cas du chef no 14, pour la même période que celle mentionnée aux 13 premiers chefs, on reproche à l’intimée d’avoir agi comme intermédiaire auprès de ses clients afin de promouvoir la souscription des produits de la société Prospector International Networks. Ces quelque 150 clients ont souscrit les contrats mentionnés pour une valeur de 111 millions de dollars (M$). L’intimée a reçu de la société et/ou de son promoteur, directement ou par l’entremise de son cabinet, une rémunération de 5,59 M$. L’infraction contrevient à l’article 39 du Code de déontologie de la Chambre, qui stipule que, sauf les exceptions prévues, « le représentant ne doit pas recevoir ni faire d’entente pour recevoir une rémunération de la part d’une personne différente de celle qui a retenu ses services ». L’intimée et son procureur ont soutenu que les sommes reçues étaient des honoraires de référencement, mais cet argument n’a pas été retenu par le comité.

Enfin, au chef no 15, durant une période se terminant en mai 2012, l’intimée a fait signer en blanc quelque 22 formulaires à huit de ses clients, et cette négligence est proscrite par l’article 35 du Code de déontologie. Les explications fournies par l’intimée pour justifier sa conduite n’ont pas été retenues par le comité.

Selon le comité, la preuve montre que l’intimée a bel et bien conseillé un produit spécifique à ses clients, en plus de les y faire souscrire, ce que ses certificats ne lui permettaient pas. La planification financière ne confère pas le droit de distribuer ou vendre un produit financier, sauf ceux couverts par les autres certificats. Au moment des faits reprochés, les actions ou parts d’organisme de placement collectif constituaient les produits financiers que le représentant certifié en épargne collective était autorisé à offrir. Le comité estime que les produits de Prospector n’entraient pas dans cette catégorie de produits.

Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions alléguées au soutien de la plainte.

À la fin de l’instruction en décembre 2018, le procureur de l’intimée a de nouveau soumis une requête en arrêt des procédures, sans succès. En considérant l’ampleur du dossier et le nombre de clients ayant souscrit les produits de Prospector entre 2003 et 2008, le comité estime que les délais s’inscrivent à l’intérieur des paramètres d’une telle enquête.