Le fraudeur Stéphane Gagnon a été condamné à une peine d’emprisonnement de cinq ans, dont 3,3 ans ont déjà été purgés alors qu’il attendait la fin des procédures judiciaires, révèle le jugement de la Cour supérieure de justice de l’Ontario daté du 23 juillet dernier. L’homme devra également verser près de 7,5 millions de dollars (M$) dans un délai de huit ans, sans quoi il pourrait purger une peine supplémentaire de 7,5 ans pour défaut de paiement.

La Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) a fait parvenir le jugement au Portail de l’assurance. Au moment d’écrire ces lignes, il n’est pas encore accessible publiquement. 

Anciennement domicilié à Ottawa, Stéphane Gagnon a été reconnu coupable d’un chef de fraude de plus de 5 000 $ et d’un chef d’utilisation de faux documents. Il a admis qu’entre le 1er août 2015 et le 31 mai 2021, il avait reçu plus de 20 M$ de victimes un peu partout à travers le Canada. 

Plus de 300 investisseurs croyaient pouvoir accéder aux fonds dans leurs comptes de retraite immobilisés (CRI) s’ils investissaient dans la société numérotée de Stéphane Gagnon. Ce dernier « a également admis avoir utilisé de fausses lettres d’avocat afin de tenter de maintenir sa relation d’affaires avec l’une des sociétés de fiducie dans laquelle l’argent des victimes avait été déposé », a indiqué la CVMO dans son communiqué publié le 23 juillet au sujet de la condamnation.

« M. Gagnon représentait aux investisseurs qu’ils pouvaient accéder à leurs CRI de deux façons : d’abord, en empruntant 60 % des fonds sous forme de prêt à un taux d’intérêt variant entre 6 et 8 %, tandis que les 40 % restants généreraient un rendement de 10 %; ou encore, en accédant aux fonds par tranches équivalentes à leur participation dans la société numérotée, moins des frais et une retenue d’impôt », indique le jugement de la Cour supérieure de justice de l’Ontario. 

Bien que Stéphane Gagnon ait remboursé plus de 12,3 M$ aux investisseurs, la Cour souligne qu’il est possible de conclure (« d’établir par inférence ») que ces remboursements faisaient partie de la manœuvre frauduleuse visant à en prolonger la durée. Le Code criminel prévoit une peine minimale de deux ans d’emprisonnement dans les cas où la fraude dépasse un million de dollars.

La soumission conjointe des avocats – soit une peine de cinq ans, moins la détention provisoire (temps déjà purgé) – a été acceptée lors du prononcé de la sentence, bien qu’elle se situe au bas de l’échelle des peines imposées dans des causes similaires.

La Cour « reconnaît que, même si M. Gagnon n’a pas plaidé coupable, il a permis à l’État d’économiser du temps et des ressources en ne contestant pas la preuve de la Couronne », peut-on lire dans la décision. 

La Couronne a plaidé pour que Stéphane Gagnon soit contraint de fournir un échantillon de son ADN aux autorités. La Cour a refusé cette requête, estimant que l’ADN n’était pas pertinent dans l’enquête.

« M. Gagnon en est à une première infraction, bien que je reconnaisse qu’une récidive soit possible dans ce cas — M. Gagnon n’a pas exprimé de remords dans la mesure où il n’a pas plaidé coupable —, mais rien n’indique qu’il soit susceptible de se livrer à un type de crime pour lequel l’ADN serait utile aux autorités. En l'occurrence, l’atteinte à la vie privée du délinquant, bien que minime, l’emporte sur toute utilité future pour les forces de l’ordre, qui serait encore plus négligeable », mentionne la Cour sur cette question. 

Dans son communiqué, la CVMO souligne qu’il s’agit d’un résultat important pour les investisseurs qui ont été lésés. « Nous sommes satisfaits du jugement rendu par la Cour supérieure et remercions toutes les personnes ayant contribué à cette affaire », y affirme Bonnie Lysyk, vice-présidente exécutive à l’application de la loi.