Lors de la Journée de l’assurance de dommages 2016, le directeur général d’Uber au Québec avait un message pour les assureurs. Il leur a demandé de concevoir des produits qui correspondent aux besoins nouveaux.

« L’économie de partage a toujours existé, mais la technologie a permis de la faire croitre », lance Jean-Nicolas Guillemette, directeur général d’Uber au Québec. Et à partir du moment où le phénomène prend de l’ampleur, il devient difficile de restreindre l’appétit des consommateurs. Il faut s’adapter à cette demande et les assureurs ne feront pas exception, ajoute-t-il.

À son arrivée dans l’entreprise en 2013, Montréal devenait la 50e agglomération urbaine où Uber offrait ses services. Le nombre avait doublé moins d’un an plus tard, et en mars 2016, Uber est présente dans 375 villes situées dans 61 pays.

« Nous faisons 3 millions de courses par jour à travers le monde. Ce n’est plus marginal. » Même à Montréal, la croissance est notable. De 300 000 courses par mois en octobre 2015, Uber est passée à 450 000 courses en janvier 2016, soit une hausse de 50 % de son achalandage en quatre mois.

Lui-même issu d’une famille de courtiers en affaires depuis un siècle en assurance, Jean-Nicolas Guillemette connait bien l’industrie et des besoins de son entreprise. Les polices existantes couvrent déjà les conducteurs qui utilisent la plateforme Uber pour partager leur véhicule. « Elles sont efficaces, sinon vous en auriez entendu parler dans les médias, car nous avons eu des accidents », dit-il.

Intact Corporation financière a convenu d’un partenariat avec Uber pour analyser ses besoins de couverture, mais aussi faire évoluer ses propres produits. L’assureur a annoncé que lorsqu’Uber aura toutes les approbations règlementaires, elle lui offrira une couverture complète, couvrant à la fois ses conducteurs et ses clients.

Mais l’économie de partage ne se limite pas aux véhicules de promenade, rappelle M. Guillemette. Les mêmes besoins de couverture du risque s’appliquent pour AirBnb pour le partage de résidences, ou encore chez ParkAir pour les gens qui veulent louer leur espace de stationnement durant le jour, ou pour le simple partage d’outils entre voisins. D’autres besoins émergents, comme la vente de repas à domicile, ne sont pas couverts non plus.

L’industrie de l’assurance a eu à adapter son offre pour mieux couvrir les travailleurs autonomes qui gagnent leur vie au domicile ou sur la route, dit le directeur général d’Uber au Québec. En 25 ans, le nombre de travailleurs autonomes a quadruplé pour atteindre 600 000 personnes au Québec. À l’époque, si les gens menaient une activité commerciale dans leur résidence, ils peinaient à assurer leurs biens. Les polices ont été adaptées à cette réalité et il se passera la même chose pour les nouvelles activités commerciales issues des technologies numériques, affirme M. Guillemette.

Les polices ont toujours été offertes sous deux types : pour les particuliers ou pour les entreprises, mais il n’y a rien entre les deux. C’est un problème pour Uber, car 75 % de ses conducteurs réalisent ce travail moins de 20 heures par semaine, et 55 % font moins de 10 heures par semaine. Pour un utilisateur à temps partiel de la plateforme, le cout d’une assurance des entreprises est prohibitif.

Police parapluie

Grâce à une police parapluie, l’assureur peut couvrir l’entreprise qui offre le service par l’entremise de tous ces travailleurs autonomes. Sinon, il faudra développer un produit qui couvre les besoins des partenaires chauffeurs, réclame M. Guillemette. S’ils ne le font pas, les assureurs verront diminuer leurs revenus en assurance automobile, car les chiffres le montrent : les jeunes sont de moins en moins intéressés à acquérir une voiture pour leurs propres besoins, ou repoussent l’achat à plus tard.

« La génération qui s’en vient a des attentes différentes. Il faut embarquer dans le changement qui s’annonce », dit-il.

M. Guillemette ajoute que 20 % des partenaires chauffeurs à Montréal sont âgés de plus de 50 ans. « Il y a un équilibre à trouver, il faut quelqu’un qui détienne un bien à partager. Mais la voiture est stationnée à 97 % du temps, et les stationnements à Montréal occupent 15 % de l’espace public. »

Le directeur général d’Uber au Québec souligne l’ouverture d’esprit des assureurs québécois, car il s’attendait à plus de conservatisme de leur part. Le risque est lié au ratio de pertes, et Uber a pu faire valoir les statistiques à cet égard dans les villes américaines où elle exploite son service depuis plus de quatre ans. « L’information est disponible et on peut la partager », dit-il.