Même s’il n’a pas encore reçu de diagnostic ou de traitements, un individu qui contracte une assurance ne doit rien omettre de son état de santé à son assureur, vient de rappeler la Cour du Québec, division des petites créances.
La décision rendue donne raison à SSQ Assurance, qui avait refusé de dédommager un de ses clients parce qu’il n’avait pas tout révélé sur sa condition respiratoire au moment où il avait adhéré à une police d’assurance invalidité collective.
L’homme avait soumis une proposition d’assurance le 19 novembre 2011. À la question : « Avez-vous déjà été traité, présenté des symptômes ou été diagnostiqué pour un problème au système respiratoire, notamment l’apnée du sommeil ? », il avait répondu non. Il avait également répondu par la négative s’il avait eu connaissance d’un quelconque symptôme pour lequel il n’avait pas encore consulté un médecin, reçu un traitement ou été avisé de subir des tests. Sur la foi des renseignements fournis, l’assureur avait accepté de l’assurer.
Il avait consulté dans le passé
Or, deux semaines avant sa demande à SSQ, il avait consulté son médecin de famille parce qu’il avait recommencé à ronfler. Cette médecin avait noté au dossier que l’apnée du sommeil avait été résolue suite à une consultation auprès d’un ORL. Le 14 décembre, soit après qu’il ait soumis sa proposition d’assurance, elle lui avait recommandé de revoir l’ORL et de passer un test de polysomnographie.
Ce n’est qu’après avoir passé cet examen qu’il a appris, en janvier 2012, qu’il souffrait d’apnée du sommeil sévère.
À une date qui n’est pas mentionnée dans le jugement, l’homme avait réclamé des prestations d’invalidité à son assureur. SSQ les a refusées en invoquant le fait qu’il avait fait de fausses déclarations au moment d’adhérer à la police. Le client l’avait alors poursuivi en Cour des petites créances.
La décision de la Cour
Dans son jugement, rendu en mars dernier, la juge Virgile Buffoni a reconnu qu’au moment de la proposition d’assurance, le demandeur n’avait été ni « traité » ni « diagnostiqué » de l’apnée du sommeil. Par contre, ajoutait le tribunal, le demandeur avait présenté des symptômes de la maladie.
Selon la Cour, la question 6 (b) de la proposition d’assurance ne présente aucune ambigüité. Il incombait au demandeur de répondre adéquatement et exactement à la question, sans égard à sa perception de son véritable état de santé. En outre, ajoute la magistrate, le demandeur ne pouvait ignorer le 19 novembre 2011 lors de sa demande d’adhésion que son médecin lui avait prescrit deux semaines plutôt de passer un test de polysomnographie en raison de ses symptômes. De plus, le 23 janvier 2012, lors de la signature de la Modification à la proposition et déclaration de solvabilité, le demandeur n’a pas déclaré avoir passé la polysomnographie le 19 décembre 2011.
« Le demandeur ne pouvait donc signer la déclaration d’assurabilité puisqu’il y avait eu changement dans son état de santé, insiste la juge Buffoni. Ce changement aurait affecté l’assurabilité du risque de façon importante puisque, selon la preuve, la défenderesse aurait refusé d’accepter le risque. »
Une représentante de SSQ a témoigné qu’en vertu du Guide de la défenderesse pour la sélection des risques qui était en vigueur en 2011, elle aurait refusé d’assurer une apnée du sommeil « sévère » comme en souffrait cet homme, mais l’aurait accepté pour une apnée du sommeil « légère » ou une apnée du sommeil « modérée » moyennant une surprime.
Motifs de rejet
Pour rejeter l’action de l’assuré, la magistrate s’est appuyée sur l’article 2408 du Code civil du Québec qui impose à l’adhérent d’une police d’assurance l’obligation suivante : « Le preneur, de même que l’assuré si l’assureur le demande, est tenu de déclarer toutes les circonstances connues de lui qui sont de nature à influencer de façon importante un assureur dans l’établissement de la prime, l’appréciation du risque ou la décision de l’accepter, mais il n’est pas tenu de déclarer les circonstances que l’assureur connait ou est présumé connaitre en raison de leur notoriété, sauf en réponse aux questions posées ».
En vertu d’un autre article du Code civil, 2410, les fausses déclarations et les réticences du preneur ou de l’assuré à révéler les circonstances entrainent la nullité du contrat, même en ce qui concerne les sinistres non rattachés au risque ainsi dénaturé, rappelle la juge. Même si le diagnostic n’avait pas encore été rendu, le fait que les renseignements fournis par le demandeur étaient inadéquats et inexacts justifiait selon elle la décision de SSQ d’annuler rétroactivement la garantie d’assurance invalidité et de rembourser les primes perçues.