La plateforme numérique Emma a créé un nouvel engin de tarification accélérée qui lui permet d’élargir à 750 000 $ le montant d’assurance vie qu’elle offre en ligne sans examen ni prélèvement. La nouvelle limite s’applique à des personnes à assurer dont le dossier de santé n’est pas parfait, mais dont la santé est bonne.
En mode traditionnel de tarification avec examens et prélèvements, l’entreprise de technologie de l’assurance (ou « assurtech ») est en mesure d’assurer jusqu’à 5 millions de dollars (M$) de couverture.
« Nous avions déjà la possibilité d’une décision instantanée jusqu’à 1,5 M$, à condition d’être en excellente santé. Un petit accroc de santé et la demande passait en tarification manuelle », révèle Félix Deschâtelets, président-directeur général (PDG) et cofondateur d’Emma, en entrevue avec le Portail de l’assurance. Ce sont ces cas d’accroc qui peuvent maintenant bénéficier de la tarification accélérée jusqu’à un montant d’assurance de 750 000 $.
Courtier numérique dont les conseillers interagissent principalement avec les clients par l’entremise de son site internet, Emma a pu bâtir l’engin grâce à une collaboration avec Humania Assurance. L’assureur est aussi souscripteur des produits maison d’Emma.
Bien qu’ils soient vendus majoritairement au Québec, les produits d’Emma sont aussi offerts en dehors de la province. À l’occasion, « il arrive que 50 % de nos ventes proviennent de l'Ontario », précise M. Deschâtelets, ce qui ne se produisait pas il y a quelques années à peine. Actuellement, Emma réalise en moyenne de 30 à 40 % de ses ventes hors-Québec.
Collaboration étroite
L’assurtech a développé son engin de tarification accélérée à partir de questions aux tarificateurs d’Humania, ainsi que d’une analyse du guide de tarification de l’assureur et des décisions qu’il a rendues dans le passé. « Un parent de 35 ans en bonne santé peut maintenant obtenir une protection de 750 000 $ en moins de 10 minutes », affirme M. Deschâtelets.
Emma distribue de l’assurance temporaire de diverses durées, allant de 10 ans, à 35 ans, voire de 100 ans (T100), en passant par un avenant d'invalidité, un avenant cancer, et des avenants d'assurance vie pour parents ou enfants.
Humania assume le risque des décisions de l’engin de tarification accélérée d’Emma. La technologie derrière appartient à l’assurtech.
Avoir des données pour aller plus loin
L’assurtech a calibré son outil en cernant les profils de personne à assurer qui nécessitent le plus souvent « des évaluations manuelles qui ralentissent le processus de sélection des risques », explique M. Deschâtelets. « Nous avions un algorithme de base, mais voulions aller un cran plus loin et cela prend des données quand on veut innover. »
Quelques milliers de polices plus tard traitées par ce système ont permis à Emma de se faire une tête. L’entreprise a accumulé des données sur l'intervention manuelle des tarificateurs, le délai de traitement et le type de conditions médicales qui exigeaient des questions supplémentaires. « Nous étions capables d’identifier les cas qui coûtent extrêmement cher à l'assureur, au réassureur et finalement aux clients parce que ces coûts lui sont refilés », relate le PDG.
Emma a ainsi pu identifier des cas pour lesquels des sous-questions ont permis d’accélérer le processus de vérification. L’assurtech a ainsi réalisé qu’elle pouvait aller jusqu’à des montants d’assurance de 750 000 $, pour l’ensemble de ses produits. M. Deschâtelets dit avoir cerner « certains accrocs de santé et cas de comorbidités pour lesquels l’engin de tarification accélérera la prise de décision », sans vouloir divulguer sa recette davantage.
Pour leur part, les tarificateurs des compagnies d’assurance peuvent se délester de certaines vérifications d’usage. « Cela fait économiser beaucoup d’argent à l’assureur. Nous pourrons continuer à offrir des primes (prix de l’assurance) compétitives », note-t-il.
Le PDG soutient qu’Emma se retrouve régulièrement au top 3 des tarifs les moins élevés du marché des temporaires, et premier en assurance temporaire 100 ans (T100) chez les 25 à 35 ans, particulièrement chez les femmes non fumeuses de cette même tranche d’âge.
Jusqu’à 80 ans
Emma estime se distinguer en offrant la tarification accélérée à des demandes d’assurés jusqu’à l’âge de 80 ans, affirme Félix Deschâtelets.
Selon la base de données d’AssuranceINTEL, le centre d’information sur les produits d’assurance de personnes des Éditions du Journal de l’assurance, l’âge limite en tarification accélérée pour un montant d’un million de dollars ne dépasse pas 60 ans. Au-delà de cet âge, les montants pris en charge par la tarification accélérée décroissent, et sont inférieurs à ceux offerts par Emma.
Par exemple, Canada Vie et Sun Life offre la tarification accélérée au-delà de 60 ans pour un montant maximum de 100 000 $ en assurance vie entière avec participation. Leur limite est respectivement de 69 ans et de 70 ans. Un montant de 750 000 $ peut être souscrit en tarification accélérée avec la temporaire 10 ans de BMO Assurance, mais uniquement de 51 ans à 60 ans.
Expérience client et IA
Félix Deschâtelets souligne que le nouvel engin développé avec l’aide d’Humania Assurance lui permet d’offrir « des processus beaucoup plus légers en termes d'expérience pour le client ». M. Deschâtelets croit pouvoir alléger encore l’expérience client grâce à l’intelligence artificielle (IA). « Nous débutons des projets avec l'intelligence artificielle. Nous serons capables d'indiquer dès le départ au tarificateur quel genre de décision il devrait prendre, ou sur quel aspect il devrait investir des efforts pour accélérer la prise de décision et standardiser l’expérience pour les clients », ajoute-t-il.
Dans certains cas, l'IA permet d’obtenir des taux de certitude au-dessus de 95 %, voire de 100 %, d’après lui. « Nous serons en mesure de décider automatiquement par l’intelligence artificielle », pense M. Deschâtelets.
Entre autres, Emma tend à croire les gens sur parole dans les réponses qu’ils fournissent dans leur demande d’assurance. « La pression de devoir protéger les êtres chers et de s’assurer qu’ils aient l'argent pour traverser leur deuil fait que les gens sont d'autant plus honnêtes », observe son PDG. Il rapporte par exemple que l’industrie a vu lors des dix dernières années un taux élevé d’exactitude des réponses à la question sur l’usage de drogues.