Alan Canada, la filiale canadienne de l’assurtech française Alan, a récemment débarqué dans le secteur de l’assurance collective au Canada en obtenant les permis d’assureur en Ontario et en Alberta.

Alan Canada figure parmi les assureurs en accident, maladie et vie réglementés par le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF). Des permis lui ont été émis par l’Autorité ontarienne de réglementation des services financiers (ARSF) et l’Alberta Superintendent of Insurance.

À la demande du Portail de l’assurance, l’ARSF a précisé avoir émis le permis d’Alan Canada le 6 janvier 2025. 

Dans la liste des entités qu’il réglemente, le BSIF affiche le nom de Mark Goad, chef de la direction d’Alan Canada. Au moment d’écrire ces lignes, nous n’avions pas été en mesure de nous entretenir avec M. Goad. Alan Canada affirme sur son site web, accessible en anglais seulement, qu’elle prévoit de s’établir en Colombie-Britannique au milieu de l’été, et au Québec avant la fin de 2025. 

Dans un échange de courriel avec le Portail de l’assurance, M. Goad laisse entendre que ses demandes de permis suivent leur cours et qu’il aurait des annonces à faire cet été en ce qui concerne le Québec.

Sans intermédiaire 

Sur son site, Alan Canada promet à ses clients canadiens de réduire les frais d’administration de leurs régimes privés, pour les faire passer de 30 % à 15 % de la prime d’assurance collective.

Alan Canada compte y parvenir en distribuant ses produits sans recourir aux conseillers en assurance collective et en éliminant les appels téléphoniques, ainsi que la paperasserie. « Pas de PDF à imprimer, signer, numériser, ni à envoyer par télécopieur », peut-on lire. 

Alan dit cibler les sociétés de technologie en démarrage et les petites entreprises. « Notre premier produit au Canada : une assurance santé collective entièrement numérique », écrit l’assurtech sur son site. Alan offre pour le moment Alan Bear, un programme qui couvre selon lui l’essentiel, à partir de 100 $ par personne, par mois. Alan ajoute qu’une personne peut s’inscrire en quatre questions, et être « presque assurée ». 

Alan Bear couvre 80 % du coût des médicaments prescrits, selon un plafond annuel de 3 000 $, 80 % du coût des soins dentaires, sujet à un plafond annuel de 1 500 $ et 80 % du coût des services paramédicaux, selon un plafond annuel de 500 $ par catégorie de fournisseur de soins. Alan Canada prévoit lancer bientôt deux autres programmes, l’un moins généreux à partir de 86 $ par mois, et l’autre plus généreux à partir de 149 $. 

Alan n’est pas la seule assurtech dans le décor de l’assurance collective au Canada. Fondé en 2023, le cabinet d’assurance collective numérique Viver Health offre une solution qui permet à un employeur d’obtenir une soumission d’assurance collective en trois questions. À la différence d’Alan, Viver Health s’adresse aux conseillers en assurance collective pour promouvoir son offre. Co-operators Vie est l’assureur derrière ses produits. 

Pas rentable avant 2026 

La rentabilité n’est pas au rendez-vous pour Alan. L’assurtech a produit un revenu annuel récurrent de 523 millions d’euros, soit 818 millions de dollars canadiens (M$), au premier trimestre de 2025, en hausse de 44 % par rapport au premier trimestre de 2024. Au terme de cette période de comparaison, Alan a toutefois essuyé une perte nette de 12,7 millions d’euros (19,9 M$).

Alan mise sur un partenariat avec la banque d’investissement Belfius Banque & Assurances. Belfius dit être un bancassureur détenu par l'État fédéral belge, et compter plus de 10 000 employés et 450 agences à travers la Belgique. Il explique que selon le partenariat, Belfius offrira les services d’Alan aux entreprises et à ses clients institutionnels. 

Dans la foulée de ce qu’il qualifie d’accord commercial, Belfius a dit participer à la nouvelle levée de fonds de 173 millions d’euros (271 M$) d’Alan. Il ajoute que cette levée lui permet de devenir un actionnaire d’Alan et porte la valorisation d’Alan à 4 milliards d’euros (6,26 milliards de dollars canadiens). Le communiqué mentionne que des actionnaires, tels que le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (RREO), ont renouvelé leur confiance envers la levée de fonds et que d’autres se sont ajoutés.

Dans un blogue à ce propos, Alan écrit que l’investissement lui permet entre autres d’accélérer sa croissance et d’intensifier son développement international. Il ajoute que son objectif est d’atteindre la rentabilité du groupe en 2026. Alan dit aussi dans ce blogue que la gouvernance de l'entreprise demeure contrôlée par les deux fondateurs, premiers actionnaires, qui détiennent avec les salariés plus de 40% du capital et la majorité des droits de vote. 

Controverse en France 

L'entreprise a été fondée en France en 2016 par deux ingénieurs, Jean-Charles Samuelian et Charles Gorintin. Alan dit avoir plus de 600 employés et exercer ses activités en France, en Espagne, en Belgique et au Canada. Alan ajoute desservir plus de 710 000 membres et 33 000 entreprises.

Alan, qualifié de « néo-assureur » par les médias français, a créé une onde de choc en remportant plusieurs appels d’offres successifs dans le secteur public en France, soulevant la grogne de syndicats. 

Le 26 mai 2025, La Tribune de l’assurance a écrit qu’à compter du 1er janvier 2026, les agents du ministère de l’Économie et des Finances de France doivent être couverts par une assurance complémentaire santé obligatoire, financée à 50 % par l’employeur.

« Déjà attributaire des appels d’offres santé des services du Premier ministre (SPM) en septembre 2024 (couverture de 15 000 agents) et du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires en octobre 2024 (couverture de 60 000 fonctionnaires), Alan s’offre désormais Bercy avec 130 000 agents supplémentaires pour leur couverture santé », rapporte l’article. 

Trois jours plus tôt, L’Argus de l’assurance rapportait la vive réaction des syndicats. La publication a écrit que l'attribution du marché santé des agents du ministère de l'Economie et des Finances à la compagnie Alan met en difficulté la mutuelle historique Mgéfi.

« Les syndicats manifestent leur opposition à cette décision », peut-on lire. Mgéfi offre entre autres une protection santé et prévoyance pour les agents de la fonction publique. Sa couverture santé inclut une garantie maintien de salaire.