Le cas de Samuel Archibald a trouvé écho à la Commission des finances publiques, a appris le Journal de l’assurance. Le ministre Carlos J. Leitão n’a pas caché son agacement face à la façon dont certains utilisent ce cas.

Le 22 février, la députée Nicole Léger, députée de la circonscription de Pointe-aux-Trembles pour le Parti Québécois, a lu dans son intégralité article publié sur le site du Journal de l’assurance le jour même. Pour la Chambre de la sécurité financière, le cas vécu par Samuel Archibald représente peut-être un avant-gout de ce que les consommateurs vivront une fois le projet de loi 141 adopté.

Une interprétation « absurde » selon Leitão ; Richard Boivin abonde

Le ministre des Finances y a réagi. « C’est de la désinformation pure. Le projet de loi 141 n’amoindrit pas la protection des consommateurs, a-t-il dit. Nous le faisons autrement. L’esprit et le contenu font que la protection des consommateurs sera améliorée. Elle sera rendue plus forte. Prétendre que le cas mentionné est un avant-gout de ce qui arriverait, c’est absurde ! »

M. Leitão a ensuite invité Richard Boivin, sous-ministre adjoint aux Finances, à réagir. Ce dernier s’est dit totalement en accord avec le ministre.

« C’est de la désinformation. Ce n’est pas l’intention du projet de loi et ce n’est pas ce que l’on fait. Les propos rapportés mélangent différents éléments. Plutôt que tenter de créer de la confiance tous ensemble, on crée plutôt de la confusion. On vient miner le travail des assureurs, des représentants, celui de l’Autorité des marchés financiers et de l’ensemble du secteur financier. C’est une lecture partielle, pas faite dans son ensemble », a dit M. Boivin.

Des experts inquiets du phénomène

Avant même que le débat autour du cas de Samuel Archibald prenne une telle ampleur, des experts en commercialisation numérique avaient identifié des dérives que pouvait poser la vente d’assurance par Internet. Deux d’entre eux avaient d’ailleurs fait part de leurs préoccupations au dernier Congrès de l’assurance et de l’investissement, tenu en novembre.

Alex Veilleux, copropriétaire et chef de l’innovation et stratège de produits chez Vooban, est l’un d’eux. M. Veilleux a  joué un rôle central dans le lancement d’Ajusto, l’outil de télématique en automobile de Desjardins Assurances

Lors du Congrès de l’assurance et de l’investissement, il a déclaré : « ce que je vois, c’est qu’il y a une possibilité qu’une génération soit mal conseillée et se retrouve avec le mauvais produit. Je pense par exemple à une propagation des produits d’assurance vie temporaire, alors que la réalité de tout un chacun n’est pas la même ».

Des produits simples

M. Veilleux a expliqué que le hic avec les insurtechs en assurance vie, c’est qu’elles offrent des produits simples et qu’il s’agit souvent de la seule option qui se présente aux consommateurs qui ne magasinent que de manière 100 % numérique, dit M. Veilleux. Ce n’est peut-être pas le bon produit pour eux, a-t-il soutenu.

D’ailleurs, selon les plus récents chiffres de la firme de recherche LIMRA, l’assurance vie temporaire est maintenant le produit d’assurance vie le plus vendu au Canada en termes d’unités absolues. Auparavant, la vie entière et la vie universelle, qui offrent des protections de plus longue durée et plus adaptées à des besoins plus élaborés, étaient les produits les plus vendus.

Pas une réponse à tous les problèmes

Lors du même congrès, Michel Bergeron, associé chez EY, a souligné que le numérique ne résout pas tous les problèmes. « Un conseiller uniquement numérique rencontrera aussi des problèmes », a-t-il dit.

Pour M. Bergeron, les gens veulent être servis de la façon dont ils le désirent. « Les entreprises ne peuvent pas être en contrôle des canaux avec lesquels les consommateurs interagissent. C’est plutôt eux qui doivent l’être  », a conclu M. Bergeron.

Pour appuyer ses dires, il donne les banques en exemple. Lors du Congrès, il a dit anticiper que les banques ne fermeront jamais leurs succursales. Elles ont et auront sans doute un nouveau format, avait-il aussi précisé. Les succursales en font partie, dit-il.

Desjardins fait volteface

À l’invitation du Journal de l’assurance, le Mouvement Desjardins a accepté d’expliquer les raisons qui l’ont poussé à accepter d’indemniser Samuel Archibald. Sa filiale Desjardins Assurances avait refusé de l’indemniser initialement.

« C’est à la lumière de nouveaux renseignements qui ne figuraient pas au dossier avant sa réévaluation que nous avons pu informer M. Samuel Archibald qu’il était admissible aux prestations d’invalidité prévues à son contrat d’assurance collective », a indiqué Valérie Lamarre, porte-parole du Mouvement Desjardins, au Journal de l’assurance.

Des effets malheureux

Elle ajoute que le Mouvement est conscient que cette situation a eu des « effets malheureux » pour M. Archibald. La coopérative s’en dit « sincèrement désolée ».

« Si nos équipes avaient eu l’ensemble des renseignements dès la première évaluation du dossier ou encore, dans le cadre d’une demande de révision, notre décision aurait été de verser les prestations, a aussi révélé Mme Lamarre. D’ailleurs, ce processus de révision est disponible, offert et communiqué aux assurés qui souhaitent en appeler d’une décision. »

Un exercice rigoureux

Elle ajoute, au nom de Desjardins, que l’examen d’un dossier d’invalidité demeure un « exercice rigoureux » qui repose sur des expertises médicales et sur les données dont l’assureur dispose.

« Desjardins est particulièrement sensible à la cause des maladies mentales qui sont à l’origine d’une part de plus en plus importante de cas d’invalidité. C’est un enjeu de société qui nous interpelle tous : employés, employeurs, professionnels de la santé et assureurs. Ainsi, comme dans toutes nos sphères d’activités, nous allons continuer de voir comment nous pouvons nous améliorer », dit Mme Lamarre.