Pour marquer le Mois de la littératie financière qui s’est déroulé en novembre 2023, Equifax a révélé les résultats d’un sondage selon lequel les consommateurs canadiens s’inquiètent de leur capacité à payer leurs factures à temps. 

Les jeunes sont plus à risque. Parmi les répondants au coup de sonde de la firme de notation de crédit des particuliers, 36 % des jeunes adultes âgés de 18 à 34 ans ont déclaré avoir manqué un paiement de facture en 2023, comparativement à 23 % de l’ensemble des répondants. 

Selon les réponses, 52 % des jeunes adultes éprouvent de l’anxiété au sujet de leur endettement personnel, ce qui est nettement supérieur à la moyenne globale de 39 % des autres répondants. 

Signes avant-coureurs 

Sébastien Mc Mahon

Les défauts de paiement font partie des signes avant-coureurs de la récession dont les économistes signalent constamment l’imminence. Les signes sont plus marqués aux États-Unis, observe pour sa part Sébastien McMahon, stratège en chef et économiste sénior d’iA Groupe financier

« Aux États-Unis, on constate déjà des défauts de paiements plus élevés chez les détenteurs de cartes de crédit, et celui des prêts auto commence aussi à monter. Du côté des cartes de crédit, le taux de défaut atteint 8 %, alors que le taux prépandémie oscillait entre 5 % et 6 %. Cela n’avait pas été vu depuis 2011. Le taux était monté à plus de 13 % pendant la crise de 2008 », a-t-il soulevé pendant d’une entrevue avec le Portail de l’assurance sur les perspectives économiques.

M. McMahon ne disposait pas encore de chiffres sur la tendance des défauts de paiement sur carte de crédit au Canada au moment de l’entretien. Il dit aussi surveiller de près l’évolution de la situation en ce qui touche les prêts hypothécaires. Selon le sondage d’Equifax, 36 % des Canadiens ont dit craindre que leur prêt hypothécaire soit renouvelé à un taux d’intérêt supérieur à leurs moyens.

Les résultats récoltés par la firme de données sur le crédit révèlent que 31 % des répondants ont dû trouver un revenu supplémentaire pour absorber la hausse de leurs paiements hypothécaires ou de leur loyer, et que 35 % s’inquiètent de leur sécurité d’emploi. 

Taux d’intérêt maintenu 

Malgré le ralentissement de l’inflation au pays, la Banque du Canada, maintient la ligne dure en resserrement monétaire. Le taux d’inflation mesurée selon l’Indice des prix à la consommation global (IPC global) a diminué à 3,1 % en octobre 2023. Il se rapproche de la cible de la Banque du Canada : une inflation contenue entre 1 % et 3 %. L’inflation mesurée par l’IPC global s’était repliée à 3,8 % en septembre, par rapport à 4 % en août.

D’autres facteurs maintiennent le coût de la vie élevé, d’après la banque centrale canadienne. « En plus des intérêts hypothécaires élevés, les loyers et autres frais de logement affichent encore un fort taux d’augmentation.»

Selon la Banque du Canada, les attentes d’inflation à court terme et les pratiques d’établissement des prix des entreprises ne se normalisent que lentement. Elle signale en outre que la croissance des salaires reste autour de 4 à 5 %. « Quant aux mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque, elles montrent très peu d’amélioration », ajoute la banque. 

La Banque du Canada a amorcé un resserrement monétaire, en faisant passer son taux directeur de 0,25 % en mars 2022 à 5 % le 12 juillet 2023, après une série de hausses successives. Elle a fixé son taux directeur à 5 % pour la quatrième fois de suite le mercredi 6 décembre. 

Les entreprises inquiètes 

Pendant ce temps, la confiance des entreprises fléchit. Le Baromètre des affaires de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) révèle que près de 50 % des petites et moyennes entreprises (PME) font face à une baisse de leurs ventes.

Son indice de confiance des propriétaires de PME sur 12 mois a poursuivi sa chute en novembre. Il a atteint 45,6 points. « En dehors des 3 derniers mois, jamais des résultats n’ont été aussi faibles (sous les 50), sauf pendant les récessions de 2008-2009 et 2020 », dit la FCEI.  

Dans le baromètre de la FCEI, un niveau inférieur à 50 signifie qu’il y a plus de propriétaires pessimistes que de propriétaires optimistes quant à la performance de leur entreprise. Les résultats de novembre montrent entre autres que 53 % des propriétaires de PME sont préoccupés par les coûts d’emprunt. 

Lueur d’espoir en 2024 

« La Banque centrale européenne (BCE) nous semble la mieux positionnée pour amorcer la ronde des coupures de taux d’intérêt », affirme Sébastien M. McMahon. Cela s’explique selon lui par le fait que la BCE a eu une politique monétaire plus restrictive. « Elle aura des conditions gagnantes pour commencer à couper les taux dès les premiers mois de 2024 », explique M. McMahon. Il ajoute que l’inflation totale « est rendue à 2,5 % dans le Vieux Continent ». 

Au Canada et aux États-Unis, il faudra attendre la mi-année pour voir les premières coupures du taux directeur, d’après M. McMahon. « Les marchés anticipent de plus en plus des coupures de taux d’intérêt à partir de la mi-année 2024, tant du côté de la Réserve fédérale américaine que de la Banque du Canada », a-t-il précisé. Il a rappelé que le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a suggéré en novembre que les hausses de taux pourraient être terminées.