Le 26 janvier dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a ordonné la radiation temporaire pour une durée d’un mois de Jeanne Berlie Bazelais (certificat no 197 123, BDNI no 2902711), de même qu’à des amendes de 15 000 $.
Les gestes à l’origine de la plainte ont eu lieu dans la région de Montréal entre mars et avril 2016. L’intimée a alors vendu une police d’assurance à deux de ses clients. Elle a procédé préalablement à l’analyse des besoins financiers (ABF) et rempli la proposition d’assurance pour ce couple de consommateurs auprès de Primerica. La nouvelle police remplaçait deux contrats détenus auprès d’Industrielle Alliance.
La plainte initiale comprenait six chefs d’accusation, mais le syndic a accepté de retirer le chef 5. L’intimée a reconnu sa culpabilité aux cinq autres chefs de la plainte. La sanction a été l’objet d’une recommandation commune des parties.
On accorde à l’intimée un délai de 18 mois pour payer le montant des amendes par versements mensuels égaux et consécutifs. Elle est aussi condamnée au paiement des déboursés et des frais de publication de l’avis disciplinaire.
Depuis janvier 2019, toutes les transactions de l’intimée sont vérifiées par un ou des superviseurs. Elle a suivi et suit de façon assidue des séances de formation relativement à l’ensemble des manquements soulevés dans la plainte, en plus de ses formations continues obligatoires.
Signatures
La peine de radiation temporaire d’un mois est imposée sur le chef 6. L’intimée n’a pas agi avec compétence et professionnalisme en apposant une signature en lieu et place de ses clients sur la lettre d’annulation des polices. Ce geste contrevient à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre.
Le comité précise que l’intimée avait obtenu le consentement des clients pour apposer lesdites signatures. L’honnêteté de l’intimée n’a pas été mise en doute par le syndic. C’est plutôt pour rendre service à ses clients qu’elle aurait agi de la sorte.
« La nécessité pour les consommateurs de bien comprendre les tenants et aboutissants des actes qu’ils concluent, la certitude de la validité du contrat et la transparence font en sorte que les consommateurs doivent nécessairement lire et comprendre les documents (formulaires et contrats) qu’ils s’apprêtent à signer et qui donneront naissance à des actes juridiques les engageant pour l’avenir. Ces documents doivent être signés personnellement par le consommateur », écrit le comité.
À la suite du remplacement de police, les consommateurs ont perdu leur protection en cas d’invalidité, souligne le comité au paragraphe 48 de la décision.
ABF et préavis
En mars 2016, l’intimée n’a pas recueilli tous les renseignements et procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers (ABF) de ses clients alors qu’elle leur faisait souscrire la proposition d’assurance temporaire individuelle (chef 1). Trois motifs sont retenus : 1) l’intimée n’a pas consigné les polices détenues par le couple dans l’ABF, 2) le montant des placements détenus et le fonds de pension ne sont pas consignés, 3) la présence de contradictions entre les documents associés à l’ABF concernant la date de naissance de l’enfant et le solde du prêt hypothécaire du couple. L’intimée est punie par une amende de 5 000 $ pour cette infraction à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants.
Une autre amende de 5 000 $ est imposée à l’intimée pour son manque de professionnalisme en omettant de fournir des renseignements à l’assureur dans la proposition d’assurance, notamment en n’indiquant pas les contrats d’assurance vie et en indiquant des renseignements médicaux inexacts à l’égard de la cliente (chef 4). Ce geste contrevient à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
Une autre amende de 2 500 $ pour les chefs 2 et 3 est imposée à l’intimée pour n’avoir pas correctement rempli le formulaire de préavis de remplacement d’un contrat d’assurance de personnes alors qu’elle faisait souscrire cette proposition d’assurance vie temporaire individuelle, laquelle était susceptible d’entraîner la résiliation du contrat de la cliente (chef 2) et du client (chef 3). Les deux infractions contreviennent à l’article 22 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants.
Recommandation commune
Le comité conclut la décision en soulignant qu’il doit suivre la recommandation des parties sur la sanction, mais il s’interroge à l’égard de la peine de radiation sur le chef 6, en soulignant que le montant total des amendes proposées est non négligeable.
« Une période de radiation, quelle qu’elle soit, est une sanction d’une grande sévérité qui peut amener des conséquences très importantes pour un professionnel et les stigmates d’une radiation laissent des marques sombres qui ne s’estomperont que très lentement et jamais complètement », écrit le comité.
La jurisprudence soumise concernant l’infraction sur les signatures est reliée à la décision rendue par la Cour du Québec en 2006 en appel d’une décision rendue par le comité de discipline de la Chambre. Dans cette affaire, l’intimé Brazeau avait 25 ans d’expérience. Le tribunal avait réduit la sanction de radiation temporaire d’un an à deux mois. M. Brazeau avait agi à l’insu de sa cliente, contrairement à l’intimée dans le présent dossier.
« L’importance de favoriser la certitude en vue d’un règlement doit primer dans les circonstances », ajoute le comité en décidant d’entériner les recommandations communes des parties, même si elles sont sévères.
Celles-ci sont le résultat d’un compromis obtenu par des concessions mutuelles négociées entre les parties représentées par des avocats et elles ne sont pas contraires à l’intérêt public.