Trois périodes de radiation de quatre mois à être purgées de façon concurrente. C’est la sanction qu’a reçue de la part du conseil de discipline du Collège des médecins une omnipraticienne qui a mis plus d’un an et demi pour expédier à un assureur ses notes médicales dans un dossier d’invalidité.
La Dre Chantal Valois, une médecin de famille pratiquant à Saint-Adolphe-d’Howard, dans la région des Laurentides, s’était fait reprocher son manque de disponibilité raisonnable envers une patiente en ne transmettant pas dans des délais acceptables les documents que son assureur lui réclamait.
La syndique adjointe du Collège l’avait aussi blâmée de ne pas avoir respecté l’engagement qu’elle avait pris de faire parvenir sans délai les informations exigées par la compagnie d’assurance.
Son manque d’empressement à transmettre ses notes à l’assureur lui avait valu un autre chef d’accusation, celui d’avoir entravé la représentante de son ordre professionnel dans l’exercice de ses fonctions.
Plainte disciplinaire et démarches de l’assureur
Les faits reprochés à la Dre Valois débutent il y a trois ans. En décembre 2022, elle remplit un certificat médical d’invalidité pour une de ses patientes.
Le 26 janvier 2023, la dame lui fait parvenir par courriel un formulaire de son assureur qu’elle doit remplir à propos de son diagnostic. Malgré plusieurs suivis de sa patiente, elle ne le fait pas.
À la fin du mois de mars 2023, l’assureur s’apprête à fermer le dossier de prestation d’invalidité de la dame puisqu’elle n’a jamais reçu les informations de la Dre Valois.
Le 26 avril suivant, la personne responsable du dossier à sa compagnie d’assurance transmet au médecin une demande de renseignements supplémentaires afin que deux notes médicales des visites des 21 septembre et du Ier décembre 2022 de sa patiente lui soient envoyées pour compléter sa demande.
Mise en demeure et plainte au Collège
Malgré cette nouvelle requête, la patiente n’obtient toujours aucune réponse du médecin. Exaspérée par son inaction, le 26 mai 2023, la dame lui fait parvenir une mise en demeure par courrier recommandé lui demandant de transmettre les deux notes médicales à son assureur dans un délai de sept jours, à défaut de quoi elle entreprendra des démarches auprès du Collège des médecins.
Cette menace ne donne aucun résultat.
En l’absence de réaction de l’omnipraticienne, la patiente fait parvenir une demande d’enquête au bureau du syndic de son ordre professionnel.
Le 12 juin, lors d’un appel avec la syndique adjointe, la Dre Valois s’engage à faire parvenir ses notes médicales à l’assureur. Neuf jours plus tard, la Dre Valois ne s’est pas encore exécutée malgré ses promesses à la représentante du Collège.
Le 3 août, la patiente informe le bureau du syndic que sa médecin n’a toujours pas acheminé les documents.
Il faudra attendre le 13 novembre 2024, soit deux jours avant l’audition du conseil de discipline, pour que la médecin communique à l’assureur les deux notes médicales qu’il avait réclamées un an et demi plus tôt, en avril 2023.
Ce que dit le Code de discipline
Bien que la Dre Valois ait finalement obtempéré, le Conseil se saisit malgré tout de la plainte en raison de sa lenteur à faire parvenir les informations à la compagnie d’assurance, même après s’être engagée à le faire auprès de sa syndique. On lui reproche ses manquements aux articles 37 et 97 de son Code de discipline.
L’article 37 dit ceci : « Le médecin doit être diligent et faire preuve d’une disponibilité raisonnable envers son patient et les patients pour lesquels il assume une responsabilité de garde ».
L’article 97 précise pour sa part : « Le médecin doit fournir au patient qui en fait la demande, ou à telle personne que celui-ci indique, tous les renseignements qui lui permettraient de bénéficier d’un avantage auquel il peut avoir droit ».
Le Collège a reçu d’autres dénonciations de patientes qui se plaignaient de délais déraisonnables de la part de la Dre Valois.
Ses explications
La médecin de famille a plaidé coupable dans le dossier de l’assureur qui a dû attendre un an et demi dans le dossier d’invalidité.
Devant son Conseil de discipline, elle a reconnu que son comportement n’était pas acceptable. Elle a expliqué sa conduite par de nombreuses difficultés personnelles (problèmes de santé) et professionnelles, notamment par la perte de sa secrétaire à temps plein. Elle avait dû former trois secrétaires à temps partiel, ce qui avait nécessité un grand investissement en temps de sa part.
Ces difficultés l’ont plongée dans un état d’épuisement et l’ont amenée à prioriser les activités cliniques de ses patients et à leur permettre de la consulter en urgence, dans un délai de 24 à 48 heures lorsque leur état de santé le nécessitait.
Elle plaide coupable
Elle s’est dite bouleversée par le fait qu’une plainte ait été déposée contre elle devant le Conseil de discipline. Le 15 novembre 2024, elle a plaidé coupable aux trois chefs de la plainte disciplinaire déposée contre elle.
Parmi les facteurs aggravants retenus contre elle, le Conseil indique que son comportement a eu des conséquences non négligeables sur sa patiente et sa santé, déjà fragile, et a engendré des conséquences financières pour la dame.
Au nombre des aspects atténuants, la médecin était prête à reconnaître sa culpabilité dès la première audition et a exprimé des excuses profondes auprès de sa patiente, qui les a acceptées.
Elle a été trouvée coupable des trois chefs déposés contre elle. Le 6 décembre dernier, elle s’est vu imposer une radiation de quatre mois pour chacun des chefs, mais à être purgée de façon concurrente.
Elle compte utiliser cette période pour continuer à former ses secrétaires, améliorer l’organisation de son bureau et s’assurer que les demandes de copies de dossiers des patients soient bien transmises dans des délais appropriés.