Inégalités sociales. Esclavage moderne. Entreprises zombies. Révolution dans les transports. Effets méconnus sur la santé.

Voilà quelques-uns des phénomènes sociétaux que les assureurs doivent prendre en considération comme risques émergents alors que s’amorce la relance post-COVID-19, affirme Swiss Re dans son rapport SONAR 2021 : New Emerging Risks Insights.

Les écarts de fortune entre riches et pauvres inquiètent au premier chef le réassureur. Ce dernier indique que la croissance de la classe moyenne a ralenti en 2020 et que la pauvreté s’est élevée à de nouveaux sommets. « Plusieurs cols blancs ont pu poursuivre leur travail de la maison. Il en va tout autrement dans le domaine des services, notamment pour le commerce de détail, le tourisme et la gastronomie, où le taux de chômage a été élevé », rappelle le réassureur.

Cela a eu un impact sur la classe moyenne, puisque 54 millions de personnes de moins que prévu y ont accédé en 2020. Les pays ayant offert des stimulus financiers pour répondre à la pandémie s’en sont mieux tirés que les autres, fait remarquer Swiss Re. Le hic, c’est que ce sont les plus jeunes générations qui en ont payé le prix, ajoute le réassureur.

« Cette réduction des revenus dans de nombreuses sphères de la communauté mondiale menace la croissance récente de la demande d’assurance observée sur de nombreux marchés. Elle met l’accent sur le développement de solutions d’assurance privée abordables pour combler le déficit de protection des segments à revenu moyen et faible », peut-on lire dans le rapport.

Entreprises zombies et esclavage moderne

La relance postpandémique vient avec un autre danger, affirme Swiss Re, soit celui du retrait du soutien financier gouvernemental envers les entreprises. « Ces stimulus ont aidé de nombreuses entreprises viables à rester à flot. Toutefois, des mesures de relance ont aussi soutenu des entreprises non viables, les soi-disant entreprises zombies », dit le rapport.

Selon Swiss Re, les entreprises zombies représentent un fardeau potentiel pour le secteur financier, en particulier en ce qui concerne l’augmentation des taux de défaut de crédit. Ainsi, les faibles taux d’intérêt incitent les entreprises à contracter des crédits bancaires, créant un risque de défaut de paiement à grande échelle sur ces prêts une fois que le soutien du gouvernement se tarit et que les entreprises zombies deviennent insolvables.

« Pour éviter une augmentation potentielle des défauts de paiement et des faillites, les gouvernements devront soigneusement décider comment et quand retirer les plans de relance. Pour une reprise économique durable, la politique devrait soutenir les entreprises viables à long terme et faciliter la restructuration ordonnée des entreprises non viables », affirme le réassureur dans son rapport.

S’ajoute à cela un autre phénomène, dit Swiss Re : l’esclavage moderne. « Les entreprises subissent des pressions croissantes pour s’assurer qu’elles ne sont pas parties ou associées à des formes d’exploitation des personnes, y compris au niveau des fournisseurs dans leurs chaînes d’approvisionnement. Les lois et réglementations nouvellement introduites pourraient potentiellement augmenter les risques de litiges associés à l’esclavage moderne », indique le réassureur dans son rapport.

Quel impact sur les assureurs ? « L’identification de l’exploitation pourrait conduire à d’importantes réclamations en responsabilité, en particulier en ce qui concerne les couvertures des administrateurs et dirigeants (D&O) », prévient Swiss Re.

Révolution dans les transports

Par ailleurs, la décarbonisation des voitures et leur électrification réduiront de 24 % les émissions de gaz à effet de serre. Cette révolution des transports pose toutefois des risques pour les assureurs, prévient Swiss Re.

« Les urbanistes sont confrontés au défi de créer des moyens pour que les nouveaux véhicules électriques coexistent en toute sécurité avec les transports et les infrastructures traditionnels. Les blessures causées par les scooters et les vélos électriques sont une source potentielle de nouvelles réclamations en responsabilité. De plus, le modèle de location de bon nombre de ces nouvelles formes de transport urbain nécessite le partage d’informations personnelles, ce qui donne lieu à des risques de vol de données. La législation et la réglementation devront donc être mises à jour afin d’atténuer ces risques », suggère le réassureur dans son rapport.

Effets méconnus sur la santé

La pandémie vient aussi avec son lot d’effets sur la santé des humains. La priorité a été de lutter contre la COVID-19, mais à quel prix pour le traitement des autres maladies ?

« Dans tous les pays, les dépistages de routine, les chirurgies et les traitements planifiés ont souvent été reportés afin d’éviter que les services de santé ne s’effondrent. En conséquence, de nombreux patients n’ont pas reçu les soins dont ils avaient besoin au bon moment. Cela pourrait entraîner une détérioration de l’état de santé général », dit le réassureur.

De plus, diverses enquêtes montrent que l’incidence des troubles de santé mentale tels que l’anxiété et la dépression ont augmenté pendant la pandémie. Cela s’ajoute à des modes de vie moins sains, ce qui comprend une diminution de l’activité physique et une augmentation de la consommation d’alcool et/ou de drogues.

« Les effets à long terme tels que la réduction de l’espérance de vie, en particulier pour les groupes de population à risque, sont une possibilité bien réelle. Ajouté à cela l’écart grandissant entre riches et pauvres, il y a un risque bien réel que les inégalités sociales exacerbent le tout, ce qui aurait des impacts sur la demande d’assurance », dit le rapport.