Les violents feux de forêt qui ont ravagé plusieurs comtés de la région de Los Angeles en janvier 2025 et le séisme au Myanmar, à la fin de mars, ont marqué le premier semestre de 2025.

Selon les bilans récents publiés par divers réassureurs ou firmes de courtage, les dommages assurés reliés aux catastrophes naturelles dans le monde dépassent déjà la barre des 100 milliards de dollars (G$) américains, ce qui est très au-dessus de la moyenne depuis l’an 2000, selon Aon. (Tous les chiffres qui suivent dans cet article sont aussi en dollars américains.) 

Munich Re souligne que les dommages assurés du premier semestre de 2025 arrivent en deuxième place depuis que le réassureur a commencé à documenter le sujet en 1980. La pire année a été 2011 avec le séisme et le tsunami qui a suivi au Japon. Les chercheurs du Swiss Re Institute font le même constat. 

Gallagher Re estime à 21 le nombre d’événements ayant causé des pertes économiques dépassant 1 G$, soit le total le plus faible depuis 2015, où 19 sinistres de cette ampleur avaient été rapportés. 

De son côté, Swiss Re évalue les dommages assurés à 80 G$ au premier semestre de 2025.

Chez Aon, on rapporte 26 sinistres ayant causé des pertes économiques de plus de 1 G$ au premier semestre de 2025. 

La Californie brûle 

Du 7 au 28 janvier, les feux dans les comtés de Pacific Palisades et d’Eaton, en Californie, ont causé une trentaine de décès et des pertes économiques totalisant 57 G$, selon Aon.

De son côté, Gallagher Re rapporte des pertes économiques de 65 G$ pour les deux sinistres, dont 40 G$ en dommages assurés. 

L’estimation rapportée par Munich Re, dont le bilan a été publié le 29 juillet, est de 53 G$ pour ces mêmes incendies dans la région métropolitaine de Los Angeles, dont 40 G$ en pertes assurées.

Le chef de la science du climat du réassureur, Tobias Grimm, explique le caractère inhabituel des feux de janvier dernier en Californie : « Les vents violents de Santa Ana sont fréquents en Californie en hiver. Parallèlement, la saison des incendies de forêt y dure généralement plus longtemps que par le passé, car les précipitations sont souvent moins abondantes pendant les mois les plus froids. » 

« Cela signifie que deux facteurs accélérateurs, la sécheresse et les vents violents, coïncident plus fréquemment, poursuit-il. Il suffit alors d’une seule étincelle au mauvais endroit pour que la catastrophe se produise. » 

L’évaluation faite par Swiss Re est aussi de 40 G$ en pertes assurées en lien avec les feux de janvier 2025 en Californie. « Les feux de forêt constituent un péril complexe à modéliser. Les activités humaines influencent bien plus fortement la fréquence et le potentiel de dommages des feux de forêt que d’autres périls », indiquent les auteurs du bilan semestriel.

« À ce jour, les méthodes traditionnelles d’évaluation des risques, telles que les modèles prédictifs ou probabilistes, n’ont pas pleinement saisi les interactions complexes entre les facteurs de risque, les changements de comportement du feu et la variabilité interannuelle. Les feux de forêt demeurent un péril volatile et, selon nous, on peut s’attendre à des pertes assurées associées plus nombreuses et en augmentation », ajoutent les chercheurs du Swiss Re Institute. 

Les pertes humaines 

Selon le bilan publié par Aon à la mi-juillet, le nombre de décès à l’échelle mondiale causés par ces événements a été nettement inférieur à la moyenne, avec 7 700 personnes ayant trouvé la mort. La moyenne pour le premier semestre annuel depuis le début du 21e siècle est de 37 250 décès.

Plus de 72 % de ces décès ont eu lieu à la suite du tremblement de terre qui a frappé le Myanmar (ex-Birmanie) le 28 mars dernier, où 5 456 personnes ont perdu la vie. Les pertes économiques associées à ce sinistre sont évaluées à 11,9 G$, toujours selon Aon. 

L’estimation des pertes économiques faite par Munich Re est similaire, à 12 G$, mais l’on précise qu’un très faible pourcentage est couvert par l’assurance. Par contre, le réassureur rapporte une estimation moindre pour les pertes humaines, à 4 500 victimes. Chez Swiss Re, le nombre de décès est estimé à 3 900 et les pertes économiques à plus de 14 G$. Le réassureur indique ne pas être en mesure de fournir un chiffre précis sur les dommages assurés. 

Le séisme a atteint une magnitude de 7,7 sur l'échelle de Richter, selon le rapport de Munich Re. L’épicentre était proche de Sagaing et Mandalay, où habitent environ un million de personnes. La faille de Sagaing traverse le pays du nord au sud. La secousse a été ressentie à plus de 1 000 kilomètres jusqu’à Bangkok, en Thaïlande. 

Gallagher Re rapporte des pertes économiques de 14 G$ en lien avec ce sinistre au Myanmar, dont 1,3 G$ en dommages assurés. Son estimation du nombre de victimes est similaire à celle de Munich Re, à 4 521 décès. 

Des sinistres majeurs 

Gallagher Re produit en annexe à son rapport la répartition des sinistres selon le type d’événement : sécheresse, séisme, tempêtes de vent en Europe, inondations ou glissements de terrain, orages convectifs majeurs, tempêtes tropicales, feux de forêt ou tempêtes hivernales. Pour y apparaître, l’événement doit avoir causé des pertes économiques de 100 millions de dollars (M$) ou entraîné la mort de 10 personnes ou plus. 

À la toute fin du répertoire, apparaît cette fois la catégorie « autres » qui mentionne la canicule qui a frappé l’Europe dès le 24 juin, notamment en Grande-Bretagne, France, Italie, Espagne, Allemagne, Portugal, Hongrie et Croatie. En date du 3 juillet, Gallagher Re rapporte déjà 2 308 décès associés à la chaleur extrême

En additionnant les chiffres associés à ces 151 sinistres importants, le Portail de l’assurance dénombre 8 696 décès associés à des catastrophes naturelles, selon Gallagher Re, qui ne rapporte pas de total. 

La fonte du glacier en Suisse

Le rapport d’Aon met l’accent sur un sinistre révélateur des changements climatiques, soit l’effondrement d’un glacier du mont Bietschhorn qui a entièrement submergé le village de Blatten, dans le canton de Valais, en Suisse, le 28 mai dernier.

Les quelque 130 bâtiments du village ont été ensevelis, sans compter les habitations submergées par le lac qui s’est formé quand la rivière Lonza a été coupée en deux. Heureusement, les 300 habitants de Blatten avaient été évacués dès le 19 mai. Le corps d’une victime a néanmoins été retrouvé le 24 juin. 

Les assureurs suisses ont estimé les dommages assurés à plus de 320 millions de francs suisses (400 M$), ce qui fait de cet événement le 11e sinistre le plus coûteux de l’histoire. Le volume des glaciers dans les Alpes suisses a diminué de 38 % entre 2000 et 2024. Dès le 4 juillet 2025, la neige et la glace de l’hiver précédent avaient fondu, ce qui contribuera à réduire un peu plus l’épaisseur des glaciers d’ici l’hiver 2026. 

La saison des ouragans 

En juillet, les experts de l’Université de l’État du Colorado (CSU), établissement partenaire du Gallagher Research Center, prévoyaient une saison de 16 tempêtes tropicales dans le bassin Atlantique, dont 8 seraient classées comme ouragans.

Trois d’entre eux seraient majeurs (catégorie 3 ou plus). Le CSU estimait à 51 % la probabilité qu’un de ses trois ouragans majeurs touche la partie continentale des États-Unis. 

Un premier ouragan majeur, de catégorie 4 sur l’échelle Saffir-Simpson, longe la côte sud-est des États-Unis depuis le 18 août. Durant les premiers jours où la tempête Erin a pris forme dans l’Atlantique, elle a causé au moins neuf décès au Cap-Vert en raison des inondations et des glissements de terrain, selon ce que rapporte Aon. Quelque 200 mm de pluie ont frappé cet État insulaire les 10 et 11 août dernier. 

Les 20 ans de Katrina 

Le rapport de Gallagher Re fait aussi un récapitulatif de l’année 2005, où quatre ouragans majeurs ont frappé les États-Unis, dont Katrina, qui a inondé 80 % de la municipalité de La Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Ramenées en dollars de 2025, les pertes économiques ont totalisé 298,4 G$, dont 145,9 G$ en dommages assurés pour les ouragans issus de l’océan Atlantique.

Quelque 1,5 million de personnes ont été évacuées à la suite du passage de Katrina en Alabama, au Mississippi et en Louisiane. Il s’agit du plus important déplacement de population découlant d’un événement météorologique depuis les tempêtes de sable qui ont frappé les États du Midwest dans les années 1930 (Dust Bowl). Quelque 40 % des personnes évacuées en raison de Katrina n’ont pu réintégrer leur domicile.

Selon le réassureur, les impacts des ouragans de 2005, qui suivaient une année 2004 assez mouvementée en matière de tempêtes tropicales, ont bouleversé de manière importante la manière dont les assureurs perçoivent le risque catastrophique associé au climat. Le libellé des polices a été entièrement revu. 

Certains États américains ont depuis revu leurs codes de construction pour rendre les résidences plus résistantes aux ouragans. Cependant, selon l’Insurance Institute of Business Home Safety, le Texas, l’Alabama, le Mississippi et la Géorgie doivent imiter la Louisiane, la Floride, la Caroline du Sud et la Virginie et revoir leurs règles encadrant la construction domiciliaire.

Le Swiss Re Institute a aussi publié un rapport sigma sur les 20 ans de l’ouragan Katrina, qualifié de « moment charnière » pour l’industrie de l’assurance. Le nombre d’habitants dans la région métropolitaine de La Nouvelle-Orléans est 20 % plus bas qu’en 2005. 

L’estimation des pertes faite est toutefois inférieure à celle faite par Gallagher. En dollars de 2024, Swiss Re évalue les pertes économiques à 225 G$ et les dommages assurés à 105 G$. Des indemnités d’environ 26 G$ ont été versées par le National Flood Insurance Program (NFIP), le régime public de l’agence fédérale de gestion des urgences (FEMA). 

De leur côté, les assureurs privés ont déboursé 79 G$ en indemnités, en dollars de 2024, selon les chercheurs du Swiss Re Institute. Cela représentait quelque 11,3 % du capital de l’ensemble de l’industrie de l’assurance de dommages des États-Unis cette année-là, une proportion record. Quelque 13 G$ avaient été versés aux exploitants pétroliers actifs dans le golfe du Mexique.