Le 25 janvier dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a condamné le représentant Michel Vadnais (certificat no 133 675, BDNI no 1643951) à deux peines de radiation temporaire, totalisant un mois et demi, de même qu’à des amendes totalisant 10 000 $.
La plaignante a amendé la plainte pour la ramener de huit à six chefs et ne conserver qu’une seule assise juridique par chef. L’inconnue a reconnu sa culpabilité aux six chefs de la plainte amendée et la sanction a été l’objet d’une recommandation commune des parties.
Les gestes à l’origine de la plainte ont eu envers un couple de clients de Joliette entre janvier 2015 et décembre 2018. Le chef 6 a eu lieu plus tard, entre mars 2017 et janvier 2020.
L’intimé agit à titre de conseiller en sécurité financière et représentant de courtier en épargne collective, et il travaille à son compte depuis novembre 1995. Il n’a aucun antécédent disciplinaire, même s’il a fait l’objet de trois enquêtes de la part du bureau du syndic entre 2003 et 2012. Il a reçu une mise en garde en 2011.
Une relation particulière
« Les parties ont déposé un énoncé conjoint des faits dont il ressort que l’intimé a noué avec ses clients M.P. et L.C. une relation particulière qui est allée bien au-delà de la relation usuelle entre un professionnel et ses clients », écrit le comité.
L’intimé connait M.P. depuis 1995 et il a rencontré un peu plus tard L.C., la conjointe de l’autre consommateur, elle aussi devenue sa cliente. Au fil des ans, il a effectué de nombreux déplacements pour aider le couple, par exemple pour ses soins médicaux, et il a même parfois payé leurs factures. Sa seule rémunération est venue des services financiers qu’il leur a rendus.
En 2015 et 2016, le couple a déménagé plusieurs fois, ce qui a envenimé les relations avec les enfants du conjoint. Les tensions ont grimpé en avril 2015 à la suite de la vente de la maison dont M.P. était propriétaire.
L’intimé était présent lors de la signature de l’acte de vente chez le notaire, et c’est lui qui a remis aux enfants leur part des revenus de la vente. À la suite de cette vente, le client ne voulait plus avoir à remettre la moindre somme à ses enfants et voulait modifier son testament en conséquence. Les discussions ont eu lieu hors de la présence de la conjointe L.P., dont les relations avec les enfants de son conjoint étaient plus que difficiles.
En novembre 2014, l’intimé a été nommé comme liquidateur en troisième position, tant dans le testament du client que dans le mandat de protection de la cliente. L’intimé a contacté une notaire pour obtenir son avis sur une procuration relative aux biens du couple, qui voulait lui confier ses placements financiers. Deux procurations ont été signées en septembre 2015.
Conflit d’intérêts
L’intimé reconnait le fait que devenir leur mandataire avait effectivement été discuté avec les deux clients. Le libellé d’une clause est l’objet des chefs 1 et 2 de la plainte. Même s’il n’a pas eu à utiliser ces procurations, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en se faisant octroyer des pouvoirs pour investir les biens de ses clients dans des placements de son choix.
Les pouvoirs octroyés par ces procurations contreviennent à l’article 18 du Code de déontologie de la Chambre. L’intimé est condamné à une amende de 2 000 $ pour les chefs 1 et 2, où il s’est placé en situation de conflit d’intérêts en participant à la préparation de ces procurations.
M. Vadnais est puni par une première peine de radiation temporaire de deux semaines pour s’être placé en situation de conflit d’intérêts alors qu’il agissait simultanément comme représentant de M.P. et de L.C. (chef 3), ce qui contrevient à l’article 18 du même Code.
Il a encore contrevenu au même article du Code en agissant à titre d’intervenant dans le cadre d’une procédure devant la Cour supérieure entre avril 2017 et juin 2018 (chef 4). Ce geste est aussi puni par une amende de 2 000 $.
Par ailleurs, toujours dans le cadre de cette procédure devant le tribunal, l’intimé a fait une déclaration fausse ou trompeuse alors qu’il était sous serment (chef 5). Cette infraction à l’article 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières est punie par une amende de 4 000 $. Au paragraphe 47 de sa déclaration assermentée, M. Vadnais affirmait n’avoir jamais eu connaissance du mandat du 10 septembre 2015 et ne pas avoir participé à sa préparation ou à sa signature.
Enfin, l’intimé est condamné à un mois de radiation temporaire pour avoir fait des déclarations fausses ou trompeuses à trois reprises, entre mars 2017 et janvier 2020, dans le cadre de plusieurs enquêtes du syndic le concernant (chef 6). Cette entrave au travail du syndic représente une infraction à l’article 342 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
Les deux peines de radiation seront purgées de façon consécutive. L’intimé est également condamné au paiement des déboursés et des frais de publication de l’avis disciplinaire.
Liquidateur
En octobre 2015, l’intimé a été nommé coliquidateur dans le testament de M.P. Il renoncera à exercer cette charge au décès de son client. Il a été désigné mandataire aux biens de L.C. en 2016 et aussi désigné coliquidateur de sa succession en octobre 2016. Sa cliente est décédée en décembre 2018 et il a renoncé à sa charge de coliquidateur.
Ses intérêts multiples ont posé problème lorsque l’un des fils de M.P. s’est adressé à la Cour supérieure pour obtenir l’homologation d’un mandat d’inaptitude et l’ouverture d’un régime de protection pour son père. L.P. a demandé l’intervention de l’intimé dans cette procédure judiciaire. La querelle familiale s’est envenimée en 2017 et 2018.
Généralement, les périodes de radiation imposées au professionnel sont purgées de façon concurrente, et non consécutive. Dans ce dossier, le comité estime que les infractions ne sont pas reliées entre elles et sont de nature distincte, puisque le chef 3 porte sur le conflit d’intérêts alors que le chef 6 porte sur l’entrave au travail du syndic.