Déclaré coupable en mars 2019 de 39 chefs, Jean-Pierre Falet (certificat no111 931, BDNI no2942041) a été condamné à des amendes totalisant 67000 $ par le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière. Quelque 17 chefs ont été punis par une amende, et les 22 autres sont sanctionnés par une réprimande. La sanction a été rendue le 31 aout dernier.

La plainte trouvait son origine dans l’inspection du cabinet de l’intimé, J.P. Falet inc., menée par l’Autorité des marchés financiers. L’inspection a mis à jour de nombreux manquements. L’intimé est premier actionnaire, secrétaire et président du cabinet. Les gestes qu’on lui reproche sont survenus de mai 2002 à décembre 2010.

Les 16 premiers chefs concernaient des problèmes reliés à l’analyse des besoins financiers (ABF). Les chefs 1 à 6 sont punis par une amende de 5000 $, pour un total de 30000 $. Les 10 autres chefs sont sanctionnés par une réprimande.

Pour les chefs 17 à 34, où l’intimé a été déclaré coupable de s’être placé en situation de conflit d’intérêts en prêtant des sommes à ses clients, trois d’entre eux (chefs 23, 32 et 34) sont punis par une amende de 5000 $, tandis que six autres (chefs 17, 20, 24, 27, 30 et 31) sont sanctionnés par une amende de 2000 $. La somme de ces infractions totalise 27000 $. Des réprimandes lui sont imposées sur neuf autres chefs.

Enfin, à cinq reprises entre janvier 2005 et novembre 2012, l’intimé a fait signer en blanc divers documents à ses clients. Les chefs 35 et 39 sont punis par une amende de 5000 $, tandis qu’une réprimande est imposée pour les chefs 36 à 38.

La plaignante voulait la radiation

La plaignante demandait une peine de six mois de radiation temporaire pour les 16 chefs reliés aux ABF. Elle demandait aussi une peine de deux mois de radiation temporaire pour les cinq chefs découlant des documents signés en blanc, à être purgée de manière consécutive aux peines de six mois, pour une période totalisant huit mois de radiation. La plaignante suggérait aussi des amendes totalisant 33000 $ pour neuf chefs et recommandait la réprimande pour neuf autres chefs.

La plaignante a déposé une décision disciplinaire datant de juillet 1998, à l’époque de l’Association des intermédiaires en assurance de personnes, à l’encontre de l’intimé. À ce sujet, l’intimé a indiqué qu’il n’avait pas voulu se battre et avait accepté la recommandation de son procureur de reconnaitre sa culpabilité. Il avait purgé la peine d’un mois de radiation dans le temps des Fêtes. S’il avait su que ce jugement le suivrait jusqu’en 2020, il n’aurait pas accepté la recommandation de son avocat.

L’intimé a pris les engagements suivants devant le comité, soit de conserver les ABF dans ses dossiers, de ne plus faire de prêts aux clients et de ne plus faire signer des documents en blanc.

M. Falet souligne que sa pratique remonte à mars 1969 et sa clientèle de 6 500 consommateurs est composée de « 80 à 90 % de médecins », selon son témoignage. Il souligne qu’il est l’un des trois meilleurs courtiers dans son secteur selon RBC et Manuvie. Son cabinet emploie une dizaine de personnes, dont deux chauffeurs. L’intimé rencontre les clients à leur domicile ou à leur bureau et il remet les polices en mains propres.

« Une radiation même temporaire serait catastrophique pour lui sur le plan personnel, étant en fin de carrière, et pour son entreprise », lit-on dans la décision. Le procureur de l’intimé rappelle qu’il a collaboré à l’enquête et que ce dernier n’a pas nié les faits. Il admet avoir parfois jeté ses notes, car il ne trouvait pas nécessaire de les conserver une fois la police livrée. Dans certains cas, le client ne voulait pas d’ABF.

Les motifs

Le comité rapporte le témoignage de nombreux clients qui ont exprimé « leur très grande satisfaction » pour le travail effectué par l’intimé. Certains clients se disaient même surpris du dépôt de la plainte disciplinaire contre le courtier. Dans tous les dossiers où l’intimé a prêté de l’argent, il a pu raconter les circonstances du prêt.

« Le comité est face à une situation délicate de contravention par l’intimé à des règles importantes dans l’industrie par un représentant aimé de ses clients, en fin de carrière, qui a un antécédent disciplinaire et qui n’est pas malhonnête », écrit-il en s’interrogeant sur la pertinence d’une radiation.

« La conservation des ABF offre une protection à la fois au client, au représentant et à la firme », indique le comité.

Quant à l’octroi de prêts aux clients, cette pratique est inacceptable. « Cette relation est malsaine, comporte une forme d’inégalité et soulève des problèmes importants de conflit d’intérêts. » La preuve montre que l’intimé était de bonne foi dans l’octroi des prêts et qu’il désirait aider ses clients.

Enfin, à propos des documents signés en blanc, le comité constate que les clients ont acquiescé à cette pratique et que ce geste n’était pas animé par une intention malhonnête de la part de l’intimé.

Le comité commente longuement la jurisprudence soumise par les procureurs des parties. Il rappelle aussi la sanction imposée à André Lévesque, qui travaille dans le même cabinet, qui a été condamné à des amendes totalisant 40000 $ (18 chefs). On souligne les ressemblances dans les deux dossiers (absence d’ABF, documents signés en blanc). Comme dirigeant du cabinet, la sanction imposée à M. Falet doit être plus importante.

L’intimé n’a jamais nié les faits, mais a invoqué des motifs en droit lors de l’audition sur culpabilité. Il a modifié sa pratique et les fautes reprochées remontent à quelques années. L’antécédent disciplinaire est relié à une faute commise en 1996 et mérite d’être relativisé, en considérant la longue carrière de l’intimé.

L’intimé est également condamné au paiement des déboursés et on lui accorde un délai d’un an pour payer le montant des amendes.