Une enquête en caméra cachée menée par Desjardins Assurances et Aviva Canada a permis de faire la lumière sur la vente de polices d’assurance automobile frauduleuses et d’identifier les professionnels de cette industrie en essor.
L’enquête révèle que les professionnels de cette fraude s’en prennent à des conducteurs qui ne se doutent rien, en leur promettant une assurance automobile à bon prix. Les fraudeurs reproduisent les certificats d’assurance de responsabilité automobile, appelés « carte rose ». Ils vendent ensuite les fausses cartes à des consommateurs sans méfiance sur des sites de vente en ligne tels que Kijiji et Craigslist. La plupart des titulaires de police ne se rendent compte de l’arnaque qu’au moment de la réclamation.
Le cas Aly
En 2018, Desjardins Assurances a été mise au courant d’allégations d’activités frauduleuses commises par Sherif Aly, un résident ontarien, non autorisé à vendre de l’assurance automobile. Desjardins a, par la suite, sollicité la collaboration d’Aviva Canada, pour une enquête conjointe inédite. Parallèlement, en octobre 2018, une autre enquête voit le jour, cette fois, menée par la Police provinciale de l’Ontario (PPO).
L’enquête des assureurs est déclenchée lorsque la PPO intercepte un conducteur pour une infraction routière, sans lien avec les allégations en question. Le corps policier se rend compte que l’homme conduisait sans assurance valide et que ses cartes roses étaient frauduleuses. Les deux enquêtes épinglent M. Aly et révèlent qu’il vendait des polices d’assurance sans permis, tout en remettant aux clients des contrats frauduleux en échange d’argent comptant.
« Il s’agit de la pire catégorie de fraude à l’assurance, car elle laisse les victimes sans protection et passibles de charges financières considérables — tout le contraire de ce qu’une police d’assurance est censée apporter, » a déclaré Colm Holmes, président et chef de la direction d’Aviva Canada.
M. Aly a été arrêté le 9 février 2019. Il fait face à deux chefs d’accusation de fraude de moins de 5 000 $, de falsification de livres et de documents et d’intention frauduleuse. Les accusations font suite à l’enquête de la police ontarienne mettant en cause le conducteur de Port Credit sans assurance appropriée et la première victime alléguée, dont la prise de contact avec Desjardins a abouti à l’enquête conjointe.
Un fléau canadien
Aviva Canada a révélé dans son rapport 2018 sur la fraude que « la fraude à l’assurance automobile coute aux Canadiens plus de 2 milliards de dollars par année, et ce sont les conducteurs honnêtes qui paient pour la minorité qui ne l’est pas ».
Les faux vendeurs d’assurances ne sont pas les seuls responsables de ce fléau. Les escroqueries en lien avec le remorquage ou les réparations automobiles constituent une part importante du gâteau. Tout comme les évasions tarifaires, les accidents truqués, les vols fictifs et les fournisseurs de soins de santé et de services juridiques qui font volontairement mentir les assurés pour toucher une part des gains.
En 2016, Aviva Canada a lancé le projet Duffy, une enquête sous couvert qui a mis au jour des activités frauduleuses commises par des fournisseurs de soins de santé et de services juridiques. Les professionnels expliquaient aux assurés comment exagérer leurs blessures sur leur demande d’indemnisation pour toucher des indemnités d’accident dont ils se réservaient une part pour eux-mêmes en guise de paiement pour leurs services. Il arrive également que des patients soient amenés à signer des formules de demande de soins vierges que les fraudeurs utilisent ensuite pour obtenir le paiement de services jamais rendus, révèle Aviva.
L’Ontario au cœur du problème
Un sondage mené en 2018 par la firme Pollara révèle que la plupart des Ontariens sont au parfum du fléau qui subsiste dans leur coin de pays. La moitié d’entre eux pensent qu’une demande d’indemnisation sur quatre est frauduleuse. Près de trois sur quatre (73 %) croient qu’une répression de la fraude à l’assurance auto entrainera une réduction de leur prime d’assurance.
L’Ontario est l’une des provinces où l’assurance automobile est la plus onéreuse. Elle coute près de 1 430 $ en moyenne aux assurés, selon le Groupement des assureurs automobile. La vente et l’établissement de polices d’assurance auto frauduleuses contribuent grandement à l’augmentation des couts de l’assurance.